Mme Mitterrand et les dérives financières


Les journaux tricolores l’interviewent rarement. Et son dernier ouvrage aura laissé les critiques littéraires de marbre. L’une des seules raisons pour lesquelles certains médias ont évoqué «Le Livre de ma Mémoire» (Editions Jean-Claude Gawsewitch) est la distance prise par Mme Mitterrand par rapport au Parti socialiste, dont elle conteste le flirt de maints dirigeants avec le libéralisme .

Elle n’est pas du genre à se laisser manipuler ou récupérer: même à l’époque où son mari ciselait la diplomatie française, elle fréquentait des personnalités polémiques (tels le commandant Marcos et Fidel Castro) et elle bataillait ferme sur le front des droits de l’homme. Honnie par une bonne partie du quai d’Orsay, maison réputée conservatrice, elle a créé la Fondation France Libertés en 1986. Elle s’est aventurée dans presque tous les pays. Elle a pris position en faveur des indépendantistes sahraouis, tibétains et kurdes. Elle a critiqué les multinationales dans la gestion de l’eau, secteur où les Français ont acquis un indéniable savoir-faire…

Danielle Mitterrand (83 ans) demeure fidèle à un mot : la Résistance. C’est aux heures parmi les plus sombres de l’histoire de l’humanité qu’elle a pu se forger une opinion sur les injustices, les dérives liées à la soif de pouvoir. Ses parents, instituteurs, étaient résolument de gauche.De son livre se dégage, en toile de fond, un parallèle entre la montée du péril nazi et les dérives de la mondialisation financière, dont plusieurs événements récents (les secousses telluriques de la bourse, le scandale de la Société générale) illustrent les ravages. «Ah, les belles années de l’insouciante enfance (…) Le plus grand chaos s’annonce et se prépare à l’échelle d’un continent, et il semblerait que nul ne le voie venir.»

François Mitterrand proclamait son mépris pour l’argent facile qui achète tout. Sa veuve acquiesce. Elle justifie son attachement aux thèses de l’altermondialisme par l’aversion pour le capitalisme qui fait la part belle aux profits accumulés par une minorité. «Dans ma logique, l’argent est un outil d’échanges, selon la mission qui lui a été dévolue à sa création par nos ancêtres. Je dénonce l’hérésie consistant à lui demander de se reproduire à l’abri des coffres bancaires en spéculant sur des taux usuraires inconsidérés.» Danielle Mitterrand a la dent dure contre le Forum de Davos : «L’adoration du veau d’or, le Yalta des temps modernes.»

*Article paru sur www.journaldegeneve.ch

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