L’Europe, un débat d’une pauvreté navrante


Les pro-européens auraient-ils dû voter contre la libre circulation? Maniant le paradoxe, un intervenant sur les ondes de la radio romande a eu une remarque intéressante. Il a dit qu’un refus populaire aurait créé une situation telle que la Suisse n’aurait pas eu d’autre choix, dans un deuxième temps, que de négocier son adhésion pure et simple à l’Union européenne.

La provocation ne manque pas de sel car le “oui” helvétique est en effet moins un témoignage d’amour envoyé à Bruxelles qu’une réaction pragmatique. Prudents, les Suisses refusent de s’embarquer dans une aventure dont ils ne maîtrisent pas les tenants et aboutissants. Inutile de provoquer le grand ensemble et de s’exposer à des représailles.

Machiavéliques, les Suisses n’en repoussent pas moins une nouvelle fois la question de l’adhésion aux calendes grecques et l’on appréhende déjà de le prochain psychodrame, celui qui suivra l’entrée de la Croatie dans l’UE. Si l’on nous refait encore le coup du référendum, je promets de ne plus ouvrir un journal. Le matraquage des informations officielles, lors de la campagne, donnait la nausée.

Navrante est surtout la pauvreté du débat. En limitant ce dernier à l’appétit d’un oiseau noir au long bec, les commentateurs ont laissé passer l’occasion de réfléchir à la construction politique du continent. Il faut bien en convenir, celle-ci est un échec et ce n’est pas feu Denis de Rougemont qui me démentira. L’écrivain suisse, l’un des seuls véritables architectes de l’Europe intellectuelle (1) appelait de ses voeux une fédération culturelle et non économique.

Or force est de constater que l’Europe n’a pas dépassé le stade du grand marché selon un modèle consumériste fortement mis à mal par la crise financière que nous vivons depuis plusieurs mois, soit dit en passant. Symptomatiques de cette panne d’inspiration sont les clins d’oeil adressés à l’OTAN par la France, un pays qui semble prêt à renier un demi-siècle de vision gaullienne.

(1) “Le Nègre de la Rose”, par Christian Campiche, www.lhebe.ch

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Un commentaire à “L’Europe, un débat d’une pauvreté navrante”

  1. rené 9 février 2009 at 18:16 #

    A lire le communiqué de presse du Comité national de syndicalistes, socialistes, militants de diverses tendances du mouvement ouvrier contre la libre exploitation des travailleur
    “La reconduction de l’accord aura pour conséquence une offensive de l’Union Européenne pour affaiblir les maigres protections contenues dans les mesures d’accompagnement. Le Conseil fédéral reprendra son offensive contre la loi sur les marchés publics de manière à la rendre conforme à la directive européenne sur les travailleurs détachés et aux arrêts de la Cour européenne de justice. Il ne fait aucun doute que le patronat reprendra son offensive pour affaiblir les CCT et remettre en cause leur caractère national. Car sous l’appellation frauduleuse de « libre circulation des personnes » et de « libre prestation de service », il s’agit en fait de généraliser la sous-traitance et les bas salaires, il s’agit d’une ignoble instrumentalisation des « travailleurs détachés » et immigrés pour tirer le coût de la force de travail vers le bas.”

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