Le CHUV est toujours un paradis pour l’eau Eden.
PAR CHRISTIAN CAMPICHE
L’an dernier, des patients avaient demandé à la direction de l’établissement hospitalier vaudois de revoir sa politique en matière d’approvisionnement en eau potable. Ils s’indignaient de constater que les bonbonnes installées dans les couloirs du CHUV portaient l’étiquette du groupe israélien Eden Springs qui exploite les sources d’eau du Golan.
Directeur administratif et financier du CHUV, Oliver Peters recevait alors un mandat bien précis: faut-il remplacer les bonbonnes Eden par l’eau du robinet? M. Peters promettait une décision avant la fin de l’année («La Liberté» du 11 septembre 2008). Aujourd’hui, il est beaucoup plus vague: «Le projet avance mais aucune décision n’a été prise.» Le CHUV, dont le contrat avec Eden Springs porte sur un montant annuel de 120 000 francs, envisage aussi de revoir la distribution de bouteilles d’eau minérale Henniez.
La cible des pacifistes
Leader suisse dans la distribution d’eau en bonbonnes de cinq gallons (19 litres), Eden Springs a son siège européen à Préverenges, dans le canton de Vaud. Il exploite à Dorénaz, en Valais, une source et une usine d’embouteillage. Ce qui n’empêche pas des mouvements tels que l’organisation pacifiste israélienne Gush Shalom d’associer le groupe à la pénurie d’eau dont souffre la Palestine. De l’aveu même de la Chambre de commerce France-Israël, la moitié des eaux qui alimentent le lac de Tibériade trouvent leurs sources sur les hauteurs du Golan et au Liban.
Les événements de Gaza ont relancé la polémique. A Glasgow, en Ecosse, les étudiants de l’Université de Strathclyde, réputée pour sa formation d’ingénieurs ainsi que pour son école de commerce, ont demandé au rectorat de couper les ponts avec Eden Springs. Dans un communiqué diffusé le 6 février 2009, la direction de l’institution a exprimé sa solidarité: «Le développement durable est notre priorité. Nous devons éviter d’acheter de l’eau embouteillée à une large échelle. L’Université ne s’approvisionnera plus en eau chez Eden Springs.»
Ironie de l’histoire, le 11 mars dernier, la Wizo, l’organisation sioniste internationale féminine, plaçait Eden Spings en tête des entreprises à boycotter. Elle s’en prenait à une publicité de la compagnie dans laquelle la top-modèle israélienne Bar Refaeli fait la promotion de la marque sous le slogan «le comptoir que vous avez toujours souhaité à la maison». Le CHUV n’en est pas là. Ses responsables ne veulent pas prononcer le mot de boycott. L’eau du robinet est utilisée notamment par l’Hôpital cantonal de Fribourg et celui de Genève. En plus, elle est quasiment gratuite et d’excellente qualité – meilleure que l’eau en bonbonnes, disent certains – à Lausanne. Las, elle attendra le bon vouloir des experts de la maison.
Article paru dans “La Liberté” du 7 avril 2009