Les journalistes libres vivent la galère


Etre journaliste libre en Suisse s’apparente le plus souvent à la galère. S’il faut en croire les résultats d’un sondage réalisé par le groupement des Journalistes libres romands (JLR) auprès de ses 350 membres, la convention collective de travail (CCT) n’est vraiment respectée que dans deux cas sur cinq.

Des clauses particulières régissent les conditions des journalistes libres au sein de la CCT signée entre Presse suisse, l’association des éditeurs, et impressum, la principale organisation faîtière des journalistes de Suisse. Y sont notamment spécifiés les barèmes ainsi que la rémunération relative aux droits d’auteur et de reproduction. Les médias signataires s’engagent par ailleurs à payer la part patronale AVS et LPP comme ils le font pour les journalistes salariés. Autant d’engagements qui restent lettre morte pour près de la moitié des journalistes libres.

Abus

« La CCT est-elle respectée ? ». A cette question, seuls 38% des sondés répondent par l’affirmative. 17% ne sont pas en mesure de répondre, parce qu’ils travaillent pour des médias non conventionnés, étrangers ou qu’ils sont sortis du circuit traditionnel. Les 45% restants estiment que la CCT n’est « jamais respectée », « souvent pas » ou « pas toujours ». Les abus les plus fréquemment dénoncés concernent la non application des barèmes de la convention collective de travail. La grande majorité des médias payent les articles à la ligne et non selon le temps de travail, comme l’exige pourtant la CCT.

Peu de groupes de la presse écrite échappent à la critique de n’avoir pas appliqué la CCT au cours des dernières années. La situation est à peine plus enviable dans les médias électroniques. Certaines radios régionales n’appliquent pas les barèmes de la CCT qu’elles ont pourtant signée. Sont également épinglés la Radio suisse romande pour des droits de rediffusion ignorés, Swissinfo et la Télévision suisse romande qui appliquent une CCT différenciée « au rabais » pour leurs correspondants à l’étranger.

Précarisation

« La CCT, ça fait rire tout le monde », témoigne tel sondé. Près de la moitié des journalistes libres interrogés sont unanimes : les conditions de travail se sont dégradées, tant au niveau des tarifs que des rapports avec les rédactions. Commentaire des membres du JLR qui ont réalisé le sondage: « la précarisation de la situation des journalistes libres est d’abord le fait des éditeurs qui, cherchant des économies à tout prix, n’hésitent pas à proposer des rémunérations indécentes aux collaborateurs extérieurs, qu’ils soient signataires ou non de la CCT ».

En résulte un sentiment d’impuissance mais pas de résignation. Début juillet entrera en vigueur une nouvelle CCT romande, comprenant des barèmes des minima révisés à la hausse pour les journalistes libres, incluant des droits pour les applications multimédia. Impressum, qui a négocié âprement avec Presse Suisse pour que l’ancienne CCT ne passe pas à la trappe, est déterminé à en surveiller l’application, comme le confirme Dominique Diserens, secrétaire centrale . «Nous restons très attentifs . « Lors de la négociation, nous avons trouvé des solutions pragmatiques s’agissant des Libres et des droits d’auteur afin que les éditeurs appliquent la CCT. Ils s’y sont engagés. A défaut, nous pourrons saisir la Commission paritaire pour le suivi de l’application de la CCT. »

Dénoncer

Le groupe des JLR encourage l’association professionnelle à persévérer en n’agissant plus seulement sur dénonciation de cas concrets, comme cela était le cas jusqu’à aujourd’hui. « Ce rapport alarmant le montre, les abus sont bien plus nombreux que les plaintes déposées auprès de l’asssociation professionnelle. Une surveillance proactive permettrait de déceler des abus sans que les journalistes libres ne mettent en péril leur activité professionnelle, en dénonçant leurs clients-éditeurs. »

Article paru dans “La Liberté

 

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