Rideau

Micheline nous quitte. Ouf, diront ceux qui piaffent dans le starting-block. Enfin, diront les esprits chagrins. Sauf que nous n’adhérons pas à ce concert de députés désabusés, tant notre présidente, pair-e en tant normal, a su distraire notre quotidien morose, rendant à la geste diplomatique un panache d’Ancien Régime. Elle existait sous le plumet qui sans être trop rouge conférait à son casque une aura que d’autres auront en vain cherché toute leur vie. Des mèches en black and white, qu’un figaro tout dévoué à sa cause, même sans la comprendre, savait rendre utilement visibles, donnaient à son action politique des accents dramatiques. On la voyait ainsi de loin, et même jusqu’à Zurich.  Son départ imminent soulève contre toute attente, sinon un tsunami – les excès ne participant pas de notre mentalité – du moins quelque chose de plus qu’un succès d’estime. Néanmoins il a fallu ces jours que les médias s’épient, tant ils ne savaient toujours pas comment définir son bilan. Les otages en Lybie, les courates en Corée, le voile islamique, la casquette rouge en Somalie, le discours féminist-e, les droits de l’homme rendus humains, la Genève internationale, l’Arc lémanique, trop tendu pour certains, tout conspirait à lui nuire. Et la voilà pourtant, alors qu’elle meurt en politique, presque montée sur piédestal. Qui sait si les Genevois-ses, à court de grands-es hommes-femmes, ne vont-ils-elles pas lui tailler un monument en dur perpétuant le souvenir de son sourire trademark.  Micheline, à jamais.