Fastweb, l’aveuglement de Swisscom


L’amère aventure de Swisscom avec sa filiale Fastweb commence à s’apparenter au désastre de Vivendi en Italie il y a dix ans. Le groupe, à travers Canal+, était devenu propriétaire de Telepiù, une plateforme de télévision payante lancée en 1990 par Silvio Berlusconi. Un investissement prometteur à ses débuts, mais qui en 2001 avait fait perdre 352 millions d’euros au groupe français. Afin d’arrêter l’hémorragie,  le groupe Vivendi avait été contraint en 2002 à la vente de Telepiù à Rupert Murdoch pour seulement 1,5 million d’euros.

Swisscom vient de notifier un amortissement sur Fastweb qui va délester de 1,2 milliard son résultat net de 1,8 milliard de francs.  C’est brutal. En cause: la crise qui frappe l’Italie et freine la croissance de la filiale spécialisée dans l’Internet à haut débit. Une très mauvaise nouvelle qui vient s’ajouter à d’autres affaires qui ont touché Fastweb depuis son acquisition (à hauteur de 82%) par Swisscom pour 6,9 milliards de francs en 2007.

Début 2010, Fastweb fut l’objet d’une importante opération judiciaire menée par le parquet de Rome, section antimafia. Fastweb était accusé d’avoir recyclé 2 milliards d’euros à travers un système d’échanges commerciaux fictifs avec la société Telecom Sparkle entre 2003 et 2006. L’accusation portait aussi sur évasion fiscale de TVA à hauteur de 400 millions d’euros. 56 personnes se voyaient mises en examen, parmi lesquelles Nicola Di Girolamo, un député du parlement italien issu du PDL, la coalition conduite par Silvio Berlusconi. Le scandale s’avérait national car Nicola Di Girolamo était accusé d’entretenir des liens avec la ‘ndrangheta’ calabraise. Celle-ci aurait d’abord favorisé son élection par le trucage de bulletins avant d’utiliser Nicola Di Girolamo comme pion politique pour favoriser le système de recyclage à travers Fastweb.

Fin février 2010, le porte-parole Josef Huber affirme que Swisscom était au courant de l’enquête lors de l’acquisition de 82% de Fastweb en 2007, au prix de 47 euros par action. Un investissement si prometteur que Swisscom avait décidé de courir le risque de la procédure judiciaire. Puis le cours de l’action Fastweb chuta. Fin 2010, Swisscom acquit Fastweb dans sa totalité, achetant les titres restants au prix de 18 euros par action.
Courant 2011, les condamnations liées à l’affaire Fastweb tombaient les unes après les autres, dont celle, en juillet, à l’encontre de Nicola Di Girolamo: 5 ans de réclusion.

Cette affaire et la perte de 1,2 milliard n’empêchent pas le PDG de Swisscom,  Carsten Schloter, d’affirmer qu’il croit toujours au développement de Fastweb. L’Italie, internet et la fibre optique: Swisscom semble avoir été obnubilé par cet investissement, mais ses dirigeants ont-ils été très éclairés?

Article paru dans “Un ristretto!

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