Courtoisie marine


Quand la réalité dépasse la fiction. Comme si l’horreur de ce vendredi 13 janvier 2012 devait en apporter une nouvelle preuve. Voilà juste un siècle, le fameux Titanic, fleuron de la flotte britannique, piquait du nez dans les profondeurs marines. Emportant des cris qui ne seront réellement perçus qu’à travers une fiction. Le Titanic de James Cameron a tenté en 1997 de les fixer en les imaginant. Accrochée dorénavant au top des “meilleurs” films, entre “Les Intouchables et La Grande vadrouille”, la traversée avortée du Titanic semblait une fois pour toutes avoir payé pour celles à venir.

A croire que son sacrifice n’a pas eu d’écho, que cette leçon – trop – vieille d’un siècle, n’a pu immuniser les nouveaux officiers, aux lourds galons d’or, de jouer à la roulette pour épater la galerie. Babord, tribord ou mille sabords, qu’importe la manœuvre, pourvu que la croisière s’amuse.

A relire son histoire, le Titanic n’avait “pas vu venir”. A sa décharge, c’était son premier voyage. Il devait inaugurer une marine d’exception, vitrine des nouvelles technologies et des ambitions de l’Empire britannique. Mais une conjonction d’avaries l’a précipité en quelques heures dans les eaux sombres de Terre-Neuve. Peu en réchappèrent. On raconte que le commandant fut fidèle au poste et les hommes des gentlemen.

Dans un petit port de la vieille Toscane, un rocher sournois a l’autre soir éventré un monstre. En galante compagnie, le capitaine du vaisseau et sa belle équipe, à l’heure de goûter à la réserve du patron, ont cédé à la tradition. L’inchine. Tous feux toutes flammes, la parade en a jeté jusqu’au fond du golfe. On s’est incliné courtoisement. Sauf qu’à ne pas respecter la bonne distance, la vapeur s’est renversée. Le plumage de Francesco a eu raison de ce jeu tragique.

Ce désastre ne va pas refroidir les plaisanciers, qui toujours plus nombreux à vouloir braver la mer et goûter au génie de la technique navale, vont continuer à gonfler les bulletins de commande des voyagistes. Ces paquebots, qui conjuguaient autrefois transport et voyage, mêlant immigrés ou forbans en quête d’une nouvelle vie, esprits forts poursuivis par les régimes totalitaires, beau linge et rebelles de tout acabit, se sont mués en tours de Babel tout confort, la ville en plus, ses machines à sous, ses bars, saunas, joies diverses pour qui a acheté du rêve clé en main.

A jouer comme sur terre sur l’eau, le monstre s’est effondré.

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