Pas facile pour l’éditeur de trouver chaque matin le sujet qui va titiller le lecteur et remplir son tiroir-caisse. Pour la presse traditionnelle, le drame est patent. Si pub et annonceurs ont depuis belle lurette pris la clé des champs, quelques opus en papier persistent et signent. Ils sont ce que la camera digitale est à ce bon vieil argentique, du vintage avant la lettre, un reliquat du bon vieux temps, un combat perdu d’avance.
Au bistrot du coin, tout en parcourant les news en diagonale, on cachait autrefois son verre de blanc derrière l’immensité des pages, on lorgnait son prochain accoudé au comptoir.
Les Feuilles d’avis avaient leurs raisons d’être. Foin des avis mortuaires et des tourments du monde, la paysanne y emballait ses salades, le peintre du dimanche y nettoyait ses pinceaux, l’ouvrier y cherchait un emploi, l’émigrée d’ Appenzell une place de fille de salle, quand elles ne servaient pas encore à la toilette intime.
A la Une de notre quotidien orange, l’été nous a comblés. Bandaison virile, masturbation féminine, sexe pour tous, l’analyse quasi clinique et quotidienne de nos envoyés spéciaux en a instruit plus d’un. Autour du café-croissant, elle a rendu nos aubes plus joyeuses.
Et la liste n’en finit pas d’échauffer nos sens. La statistique (!) est effrayante pour qui se pique encore de morale. Les ados seraient accros du porno. La technologie aidant, et on les comprend, il est sûr qu’ils ne s’embarrasseront plus de préliminaires. Une presse l’a bien compris, qui pour se maintenir en vie donne chaque matin son lot de bons offices. Les sexologues de service ont le vent en poupe. Mais jusqu’à quand?