Accro à House of Cards


Comment, vous n’avez pas encore vu «House of Cards», la célébrissime série américaine produite par Netflix?

PAR MARC SCHINDLER

Vous n’avez jamais entendu parler de Frank Underwood, le congressman le plus manipulateur de Washington, ni de sa femme, la belle et ambitieuse Claire? Le nom de la journaliste Zoe Barnes ne vous dit rien? Mais vous vivez sur quelle planète, vous avez passé toute l’année dans un igloo en Sibérie, sans télé, sans journaux, sans smartphone? Incroyable!

Bon, vous êtes certainement un cas désespéré d’autiste social. Je ne vais pas vous résumer l’intrigue. Ce serait trop long, trop compliqué et vous n’y comprendriez rien. Je vous dirais seulement que «House of Cards»est une série télé de 13 épisodes dont la première saison a été diffusée aux Etats-Unis et au Canada d’un seul coup, en février 2013 par Netflix. En France, d’août à septembre 2013, par Canal +. La deuxième saison, 13 épisodes aussi, commence sa diffusion aux USA, au Canada et en France. Et une troisième saison va être tournée aux Etats-Unis. Cette série a déjà ramassé les prix de l’une des meilleures séries TV de l’année et de la meilleure distribution. And so what?

Résumé de Télérama: «C’est un thriller sur fond de Maison Blanche et de Congrès américain, mais où la finalité est toujours de savoir qui Frank va dessouder, et comment. De la politique politicienne, donc, où le bonheur du peuple ne donne pas franchement d’ulcère aux dirigeants. Le comportement de Frank, de plus en plus brutal depuis ses agissements de fin de saison 1, l’éloigne d’ailleurs d’une figure d’homme d’état crédible, et le rapproche d’un criminel pur et dur. A moins, bien entendu, de voir le sang qu’il a sur les mains comme une métaphore…» Bref, «House of Cards», c’est ambition forcenée, cynisme effronté, crapulerie, mensonges, coups tordus, petit meurtres entre amis, coups de poignard dans le dos, un zeste de sexe, beaucoup d’alcool – un vrai régal!

Je suis un accro et je ne me soigne pas! Mais je ne suis pas le seul: il paraît que Barack Obama passe ses week-ends devant cette série et qu’il demandé à ses «amis» de Facebook de ne pas révéler la fin. Pour prendre des leçons de stratégie politique? Son service de presse ne confirme pas. Mais le pire n’est pas là: «House of Cards» pousse à la boulimie télévisée. Au début du mois, 670 000 personnes se sont ruées sur la série pour voir les 13 épisodes en un week-end. 12 heures de télé d’un seul coup! On appelle ça du «binge watching» comme le «binge drinking», qui consiste à se bourrer la gueule le plus vite possible. Pourquoi? Mais pour connaître la fin avant tout le monde. Toujours Télérama: «Un coït sériel accéléré, sans préliminaires, sans retenue, sans tendresse. Pour un peu, ils sauteraient des épisodes ou, plus vraisemblablement, appuieraient sur la touche avance rapide quand une scène leur semble trop longue. Pourquoi tout voir tout de suite? Pour spoiler ceux qui prennent le temps? Pour ne pas pouvoir en parler avec ses amis moins rapides? Pour attendre plus longtemps encore la saison suivante? Sans doute pour s’en mettre plein la poire, d’un coup, plutôt que de ménager leur plaisir. Une orgie par an, plutôt qu’un câlin par semaine.» C’est comme dans la vraie vie, nous voulons tout, tout de suite: le train à l’heure, la connexion Internet sans bug, le réponse pour hier. Sinon, c’est l’angoisse et le stress.

Allez, que cela ne vous décourage pas. «House of Cards», c’est une superbe série télévisée qui vous fera passer de bonnes soirées. Mais c’est comme l’alcool: «A consommer avec modération». Et si vous aviez encore des illusions sur la moralité des hommes politiques, sur leur engagement au service de la nation, sur leur indépendance et leur désintéressement, je suis sûr que vous n’en aurez plus. Mais, attention: ça se passe en Amérique, pas en France, bien sûr!


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