USA, le massacre des innocents

Chaque jour, 20 enfants sont hospitalisés pour blessure par des armes à feu. Cela se passe aux Etats-Unis, selon une étude de l’Académie américaine de pédiatrie. 7391 jeunes Américains blessés par balles en 2009, dont 453 en mourront.

PAR MARC SCHINDLER

Cela coûte chaque année 147 millions de dollars aux hôpitaux. Selon le FBI, les armes à feu tuent plus d’enfants en âge pré-scolaire que de policiers! C’est l’une des principales causes de décès des jeunes. Des chiffres effrayants, qui révèlent une des faces les plus sombres de l’Amérique: sa passion incontrôlée pour les armes.

A la fin de l’année dernière, une mère de famille d’une ville de l’Idaho s’est rendue dans un centre commercial avec son fils de 2 ans. Le gosse a fouillé dans le sac de sa mère, en a sorti le pistolet qu’elle détenait légalement, a pressé la détente et l’a tuée. En novembre, dans l’Etat de Washington, un garçon de 3 ans a été tué par un gosse de 4 ans. En Pennsylvanie, un garçon de 2 ans a tiré et tué sa soeur de 11 ans.

A chaque drame, les médias américains et l’opinion s’indignent. Mais rien ne change. Pourquoi? Parce qu’une majorité d’Américains soutient la toute-puissante National Rifle Association, qui revendique plus de 5 millions de membres. Elle se présente souvent comme la plus ancienne organisation des droits civils aux États-Unis. Elle protège le droit de posséder et de porter des armes comme il est stipulé dans le deuxième amendement de la Constitution. La NRA est surtout l’un des plus redoutables lobbies à Washington, qui apporte beaucoup de voix aux candidats aux élections. Sur son site, elle rappelle les noms des candidats qu’elle a soutenus pour le Sénat ou comme gouverneurs et elle fustige les partisans du contrôle des armes. En 2008, la NRA a réussi à faire confirmer par la Cour suprême le droit de chaque Américain de posséder une arme et de s’en servir, notamment dans les cas d’auto-défense, confirmant par là son interprétation du second amendement. Elle mène une guerre impitoyable contre la politique du président Obama, qui veut contrôler les armes.

Selon le Centre de recherche pour la prévention des crimes, les ventes d’armes auraient explosé depuis l’élection d’Obama: 21 millions par an en 2012 et 2013. Officiellement, 11 millions d’Américains ont un permis de port d’arme cachée (concealed carry). Ils peuvent légalement détenir une arme et la porter de manière discrète. En réalité, les «citoyens armés» sont beaucoup plus nombreux. Parce que tous les Etats américains autorisent le permis de port d’armes, mais dans cinq Etats, pas besoin de permis pour acheter un pistolet ou un fusil! Au Dakota du Sud, pour 10 $, vous avez votre permis pour 4 ans, sans formation au tir. Résultat: 12% des braves citoyens ont un permis. En Floride et au Texas, 8% de la population sont des «citoyens armés».

Vous pensez que les meurtres par armes à feu entraînent un retrait de permis? Naïfs incurables! Le Centre de recherche pour la prévention des crimes a enquêté. En Floride, où 2,6 millions de permis ont été accordés, seuls 168 ont été retirés. Motif: violation de la loi, qui interdit de porter une arme dans une école ou un aéroport!

Toutes les tentatives de contrôler la vente d’armes ont été bloquées par des politiciens favorables à la NRA, qui finance leur campagne. Alors, des fabricants d’armes malins ont lancé les «smart guns», des armes qui ne peuvent tirer qu’après avoir activé un levier. «Aucun enfant de moins de 8 ans ne peut tirer», proclame fièrement le célèbre fabricant Smith & Wesson, qui a vendu une demi-million de ces armes «intelligentes». Un autre artiste de la gâchette a inventé le pistolet qui reconnaît votre empreinte digitale. Le fabricant allemand Armatix 1P1 fait encore plus fort: pour tirer, il faut porter une montre bracelet homologuée! Ca ne vous étonnera pas que la NRA s’oppose aux «smart guns», car elle craint qu’ils ne deviennent obligatoires. Certains experts affirment: ils vont sauver des vies, en rendant les armes aussi sûres que des produits de consommation. Un enfant ne pourra pas utiliser un «smart gun». Un voleur non plus. Ce n’est pas rien, dans un pays où 150 000 armes sont volées chaque année.

Les «armes intelligentes» ont même convaincu le grand reporter du “New York Times”, Nicholas Kristof, qui leur a consacré une chronique: «Est-ce que ce n’est pas bizarre qu’il faille un PIN pour sécuriser votre smartphone et que cette option n’existe pas pour une arme?» Allons, la passion mortifère pour les armes a encore de beaux jours aux Etats-Unis. Même un grand journal qui soutient les efforts d’Obama contre la NRA fait la promotion des marchands d’armes «intelligentes»!

Bien sûr, ça ne pourrait pas se passer en France, où 20 millions d’armes se baladeraient dans la nature, selon certains experts. Où un Français sur trois aurait une arme chez lui. Et où, pour 200 €, on trouve une Kalachnikov comme celle qui a massacré la rédaction de Charlie Hebdo.

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