Big Mac of Switzerland


Vous n’avez pas compris pourquoi la Banque nationale suisse a laissé flotter le franc. La politique de Quantitative Easing de la Banque centrale européenne, c’est de hébreu pour vous. Vous ne comprenez rien au grand jeu de la finance mondiale. Vous n’êtes pas le seul!

PAR MARC SCHINDLER

Heureusement, le vénérable “The Economist”, la bible des milieux d’affaires, consent à vous donner une leçon gratuite. En utilisant le prix du Big Mac dans le monde. Vous n’en mangez jamais? ça ne fait rien.

Selon l’encyclopédie en ligne Wikipedia, “The Economist”, publié depuis 1843, est «l’un des hebdomadaires de référence à l’échelle mondiale. Reconnu pour la qualité de ses analyses, il couvre l’ensemble de l’actualité mondiale, en étudiant en particulier l’économie et les relations internationales. Journal d’information, il prend régulièrement parti sur les grandes questions d’actualité, défendant une vision libérale en matière économique, mais également sociétale et culturelle (légalisation des drogues, mariage de personnes de même sexe, etc… Son fondateur, James Wilson, était un fabricant de chapeaux, qui croyait au libre-échange, à l’internationalisme et à un minimum d’intervention de l’État, sur les marchés en particulier. Il a créé le journal en 1843 pour faire campagne contre des lois protectionnistes (Corn Laws)». En février, “The Economist” va vivre une vraie révolution: pour la première fois depuis 171 ans,sa rédaction va être dirigée par une femme, Zanny Minton Beddoes, une ancienne économiste du FMI.

“The Economist” est un hebdomadaire sérieux. Son Big Mac Index, lancé en 1986 comme un gag est devenu un instrument un peu fruste, mais reconnu, de comparaison de la valeur des principales devises – le dollar, l’euro, le yen, la livre sterling et le yuan chinois. Selon l’hebdomadaire lui-même, «il est devenu un standard global, qui fait partie de plusieurs ouvrages d’économie et le sujet d’au moins 20 études universitaires». The Big Mac Index sert à vérifier si les monnaies sont à leur niveau correct. Dans leur langage inimitable, les économistes distingués déclarent que «l’économie du Burger n’a jamais voulu être une jauge précise du mauvais alignement des monnaies, mais surtout un instrument pour rendre plus digeste la théorie du taux de change». Ca va, vous me suivez? Pourquoi le prix du Big Mac? Elémentaire, Dr Watson! Le Big Mac, dans le monde entier, c’est deux steaks hachés entre deux tranches de pain, du cheddar fondu, des oignons, des cornichons, sur un lit de salade et avec une sauce. Une bombe calorique. On aime ou on déteste. En janvier, il coûte $ 4.79 aux Etats-Unis et $ 2.77 en Chine au taux de change actuel. Cela veut dire que le yuan est sous-évalué de 42% par rapport au dollar.

Et en comparaison internationale, the Big Mac Index winner is? Switzerland! C’est au pays du franc fort que le Big Mac est le plus cher, $7.54, soit 6.50 francs suisses au taux actuel. Cela signifie que le franc suisse est sur-évalué de 57.5% par rapport au dollar. Si vous avez vraiment envie de manger un Big Mac pas cher, allez donc à Kiev, en Ukraine. Il vous coûtera seulement $ 1.20. Le Hryvnia, la monnaie locale, est sous-évalué de 74.9% par rapport au dollar.

Mais c’est normal, me direz vous, les salaires et le coût de la vie sont beaucoup plus bas à Kiev qu’à Genève. Tout faux, mon cher Watson: selon la théorie de la parité de pouvoir d’achat, à long terme, les taux de change vont tendre vers un taux qui égalisera les prix pour un même produit, notre fameux Big Mac. Les Ukrainiens vont s’enrichir et ils pourront se payer autant de Big Mac que les Suisses. A long terme, d’accord, mais aujourd’hui? C’est là que “The Economist” abat son atout: il compare les prix du Big Mac au pouvoir d’achat individuel pour 48 pays, ce qu’il appelle l’indice ajusté. Et là, le palmarès change. Par rapport au pouvoir d’achat, le Big Mac le plus cher, on le trouve à Rio: $ 5.21, ce qui veut dire que le Real est surévalué de 68.5%. La Suisse n’arrive qu’en 4e position. Le franc suisse n’est surévalué que de 27%. Dans la zone euro, le Big Mac est vendu $ 1.46. L’euro est donc surévalué de 1.4 %. Et l’Ukraine est toujours dans le fond de la classe.

A chaque publication, the Big Mac Index déclenche les réactions des lecteurs, critiques ou amusées. J’adore celle de ce lecteur du “Guardian” britannique à propos du prix du Big Burger: « Qui se soucie de son prix. Le prix réel viendra quand vous essayerez de vous regarder dans le miroir, après».

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2 commmentaires à “Big Mac of Switzerland”

  1. Yasmine Motarjemi 8 février 2015 at 08:08 #

    Cela fait plaisir de lire un article intelligent ecrit avec humour.

  2. Schindler 8 février 2015 at 15:34 #

    merci pour vos compliments qui m’encouragent à poursuivre mes commentaires sur l’actualité.
    Bien à vous.

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