La politique française en ébullition


Elections régionales en France : «’Choc’ et ‘menace’ du FN font la une des quotidiens régionaux.» Journal “Le Monde” 7.12.2015

PAR BERNARD WALTER

Le choc est terrible.

Mais pourtant: ce résultat est le résultat d’un vote on ne peut plus démocratique!

Quand il s’agit d’expliquer le monde, les Occidentaux n’ont que le mot «démocratie» à la bouche. Ils l’invoquent constamment, c’est un fleuron de notre culture, de notre sens de la justice, de notre évolution, supérieure au reste du monde, de ce stade de civilisation qu’il faut apporter à l’entier de la planète.

En même temps, ces mêmes Occidentaux utilisent ce même concept pour justifier leur crimes les plus inavouables: en Irak, Afghanistan, Afrique, Libye, et maintenant en Syrie, pour ne citer que les principaux lieux où ils ont sévi récemment et continuent de le faire.

Mais quand ça ne leur convient plus, alors le concept de «démocratie» disparaît. Ce vote français devient comme une punition de dieu, une punition inexplicable, une malédiction tombée du ciel, comme une profonde injustice, et une injure faite à la démocratie!

Et on crie au loup, comme si la France était une bergerie.

Mais: ce système politique de nos pays inféodés au capitalisme, qui ne fonctionne que sur la concurrence entre les gens, sur les discriminations en tous genres, qui depuis 40 ans n’a fait que paupériser une majorité de la population au profit d’une toute petite minorité de gens qui accumule les dollars avec une totale indécence, et mépris ou inconscience, un système qui fonctionne sur tout sauf la solidarité et l’amour, un système qui fonctionne sur la multiplication des promesses non tenues et des déclarations de bonnes intentions qui conduisent le peuple en enfer, un tel système ne peut qu’engendrer des phénomènes tels que les nationalismes en tous genres, nazismes, bushismes et lepénismes, avec en corollaire racisme, brutalité et violence.

Le Front national est un avatar d’un tel système, alors que les Valls, Hollande, Obama et consorts ne se plaignent pas de ce qu’ils enfantent.

Et s’ils en appellent maintenant à la démocratie, on ne peut que les qualifier de menteurs vautrés dans leurs mensonges.

Ceci dit, en considérant la situation que provoquerait une élection de Mme Le Pen à la présidence de la République en 2017, chose pas impossible, je ne suis pas persuadé que les classes populaires auront plus à souffrir de Mme Le Pen que de François Hollande. La population syrienne, elle non plus, ne souffrira pas plus des entreprises de Le Pen que de celles de Hollande. Ce sont les populations de «migrants», comme on les qualifie pudiquement, en provenance d’Afrique, de Syrie et d’ailleurs, qui auraient probablement le plus à regretter un tel vote pour Le Pen. Même si leur sort n’est actuellement pas enviable.

Mme Le Pen a l’avantage de n’être, aux yeux des gens, pas liée à des intérêts, d’où le côté libre de sa parole. Pour l’instant, elle ne porte pas sur ses épaules tous les vices de la politique traditionnelle: opportunisme, clientélisme, arrivisme, soumission à la finance, ignorance de la réalité de la vie des gens, coupure d’avec la population.

Elle ne fait allégeance à rien du tout, son discours n’est pas compromis par les mensonges de l’exercice du pouvoir.

Elle s’est engagée fermement à être la présidente de tous les Français, sans discrimination aucune. A voir. Mais elle ne pourra certainement pas mentir plus que François Hollande qui a laissé miroiter un avenir souriant pour les Français lors de sa campagne présidentielle. Chez Hollande, ce n’est pas le bilan qui inquiète. C’est la manière. C’est la soumission à la loi du plus fort, loi du marché, loi des armes.

Marine Le Pen ne sera sans doute pas une va-t-en guerre comme Hollande.

C’est une souverainiste, qui s’est déclarée contre toutes les guerres d’agression que les Occidentaux ont menées depuis plus de 20 ans: Irak, Afghanistan, Lybie, Syrie, ainsi que celle des Saoudiens au Yémen.

Si elle est élue, il reste à la voir à l’œuvre, c’est certain. Car chez les politiciens, il y a loin des déclarations aux actes.

Mais au moins ce cas de figure ferait renaître une véritable opposition, et les forces républicaines auraient l’occasion de se ressaisir et, peut-être, de regagner en crédibilité.

Je ne me définis pas comme partisan de la droite, tout le contraire. Je déplore profondément la disparition de la vraie gauche, historiquement la vraie représentante des couches populaires, disparition résultant en particulier des politiques socialistes depuis Mitterrand qui n’ont eu de cesse de démolir le parti communiste français. Ce qui a pour conséquence qu’une partie importante de la classe ouvrière s’est tournée vers le Front national. Régulièrement, les simples citoyens interrogés dans la rue, dont beaucoup votent pour la première fois Front national, déclarent: «On n’en peut plus, nous voulons un changement.»

Il y a un symbole très parlant du désintérêt de la classe politique en place pour les gens du peuple, c’est l’histoire de ce petit village où sur 20 personnes ayant voté, 18 ont voté Front national. Une raison invoquée par les villageois: aucun parti ne s’est donné la peine d’afficher son candidat sur les panneaux publics, à l’exception du Front national.

Et comment ne pas être choqué par la capitulation des socialistes qui maintenant s’en remettent à la droite pour faire échec au Front national? Au mépris de tous les citoyens qui leur ont donné leur voix. Alors que depuis des dizaines d’années, gauche et droite traditionnelle ne cessent de se faire la guerre, de s’invectiver et de se mettre les bâtons dans les roues. Maintenant donc on en est à «Hollande-Sarkozy même combat»! Comment s’y retrouver?

Quand Mme Le Pen dit que les électeurs socialistes sont traités comme de la «chair à voter», comment lui donner tort?

Et Manuel Valls, chef de la capitulation, a le culot, en parlant de Jean-Pierre Masseret, l’homme qui refuse de remettre toutes les voix qu’il a reçues aux mains de ses adversaires de droite, de déclarer: «On ne s’accroche pas à un poste». Alors que M. Masseret ne fait que défendre la cause, l’idée, le principe du socialisme, auquel il reste fidèle.

L’auteur de ce présent article n’y développe aucune conviction politique personnelle. Il ne fait que défendre le processus démocratique qui lui a été inculqué depuis son enfance. Même s’il exprime quelques doutes quant à l’honnêteté avec laquelle cette «démocratie» est traitée par les personnes en charge de la représenter et de la défendre.

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2 commmentaires à “La politique française en ébullition”

  1. Pierre-Henri Heizmann 12 décembre 2015 at 10:29 #

    Bravo, vous avez tout est dit! Et le courage de le dire vous honore!

  2. Christian Campiche 13 décembre 2015 at 16:40 #

    La COP21 est finie, on va enfin pouvoir passer à autre chose…

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