Tribune libre – Migrations, que ferait Churchill?


Parmi les grands défis auxquels l’Europe est confrontée, le phénomène migratoire revêt depuis plusieurs mois une acuité particulière. La crise au Proche-Orient a en effet jeté et jette encore sur les routes des dizaines voire des centaines de milliers d´hommes, de femmes et d’enfants en quête d’un avenir meilleur. Attirées par le mirage de nos économies occidentales, des familles entières quittent leur pays, souvent encouragées par des passeurs peu scrupuleux. Leur vie ne se conçoit plus sur leurs terres ravagées par l’Islamisme radical ou bien par la misère: quand on n’a rien ou peu de choses, on n’a rien à perdre…

En dépit des efforts louables des organismes onusiens comme le HCR, le défi d´intégration est immense pour nos sociétés qui, plus que jamais, doivent protéger à la fois leur identité et leur système social. Quant à nos comportements, le curseur se déplace d’un extrême à l’autre: soit un rejet total et sans condition avec fermeture des frontières de façon à se protéger de ces hordes barbares. Soit une approche généreuse teintée d’angélisme avec ouverture des frontières et accueil organisé de ces pauvres gens rejetés par la guerre et la misère. Mais ces deux positions ne sont pas tenables par leur binarité extrême et leur caractère exclusif. Il faut donc adopter une politique médiane qui soit à la fois pragmatique, réalisable et supportable. Le regretté Pierre Desproges résumait à sa façon cette situation ambivalente il y a trente ans déjà par une boutade restée dans les annales: «Il nous faut être généreux et accueillants avec ces pauvres gens. Mais pas chez moi, y’a pas d’place à cause du piano à queue»…

Censées coordonner la politique de l’Union Européenne en la matière, les instances bruxelloises sont évidemment débordées par les mesures adoptées par chaque pays et les accords de Schengen devront sans doute bientôt être remodelés ou remisés dans le placard des accessoires. Peu à peu, chaque pays-membre rétablit des services de contrôles aux frontières et la belle idée de libre circulation des personnes au sein de l’Union devient elle aussi problématique… notamment en France avec l´état d’urgence qui pourrait être prolongé pour plusieurs mois.

Bref, entre nos beaux sentiments d’humanité et nos égoïsmes plus ou moins naturels, il n’est pas facile de déterminer une attitude médiane qui pourrait satisfaire le plus grand nombre. Dans ce genre de situation, que feraient de grands hommes d’Etat comme un de Gaulle ou un Churchill? Trouveraient-ils les mots pour apaiser les craintes de leurs concitoyens? Quel type de mesures seraient-ils capables de mettre en œuvre pour résoudre ce terrible problème?

Personne ne peut répondre à ces questions mais quelques évidences s’imposent autour de trois idées-clefs: il faudra bien d’une façon ou d’une autre réguler et contrôler les flux migratoires; il faudra sans doute fixer des quotas pour chaque pays-membre en fonction de critères à déterminer; il faudra certainement mettre en place une aide technique et financière pour les pays les plus exposés comme la Grèce et l’Italie. Car même si une grande partie de ces migrants sont capables de s’intégrer dans nos sociétés, ni eux ni nous n´ont intérêt à ce que se crée un sous-prolétariat qui viendrait fragiliser encore davantage le tissu social de nos économies. Et il nous faudra bien trouver cette solution médiane qui permettra de gérer au mieux ce formidable défi trouvant son origine dans les troubles du Proche-Orient.

Ceci étant dit, une question reste entière: que deviendront toutes celles et tous ceux que l’Europe n’aura pas acceptés ?

Albert Ebasque, Nîmes

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Un commentaire à “Tribune libre – Migrations, que ferait Churchill?”

  1. Zutter 2 février 2016 at 22:15 #

    Certains réfugiés déçus par l’Europe sont déjà rentrés chez eux, mais d’autres ne pourront pas faire de même. Il est donc, urgent de trouver une solution, mais les dirigeants européens semblent pour le moment, hélas, être assis sur un toboggan.
    Philippe Zutter

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