L’Onu tire la sonnette d’alarme sur la situation à Cizre, ville située au sud-est de la Turquie.
PAR JESSICA CAVALLERO
Des rapports, émanant de diverses sources crédibles, suggèrent que plus de 100 personnes seraient mortes brûlées vives, alors qu’elles avaient trouvé un abri dans trois sous-sols encerclés par les forces de sécurité.
«Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme a reçu des rapports faisant état de civils non armés, dont des femmes et des enfants, intentionnellement pris pour cible par des tireurs embusqués » a dit son porte parole Rupert Colville, mardi dernier à la presse à Genève (photo Jessica Cavallero).
La ville aurait été le théâtre de violences commises par des groupes de jeunes et par d’autres agents non étatiques, qui seraient affiliés au PKK. Dans certains cas, les ambulances et le personnel médical ont été empêchés d’accéder aux personnes blessées.
L’ONU a appelé à enquêter sur la situation dans le sud-est du pays. Alors que le Gouvernement turc n’avait pas répondu favorablement aux demandes du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme et d’autres organisations internationales, le Haut-Commissariat a fait savoir vendredi que ce même gouvernement se déclarait désormais prêt à accueillir une mission de l’ONU destinée à enquêter sur les violations graves qui auraient été commises. Selon les ONG, 100.000 résidents auraient fui la ville de Cizre qui a connu le couvre-feu jusqu’en mars dernier.
Et l’Union européenne? En février 2016, la commissaire en charge des Affaires étrangères, Federica Mogherini, avait appelé à un «cessez-le-feu immédiat» dans le Kurdistan turc. Après, plus de nouvelles. L’UE paraît toujours timide quand il s’agit d’élever la voix.
L’accord avec la Turquie peut représenter, il est vrai, une étape importante dans la stabilisation de l’exode migratoire vers l’Europe et en vue d’un apaisement des relations entre Turquie et l’«Occident». Mais qui gagne le plus?
Selon l’accord Turquie-UE, tous les nouveaux migrants en situation irrégulière qui partent de la Turquie en direction des îles grecques sont renvoyés en Turquie depuis le 20 mars dernier. Pour chaque Syrien renvoyé en Turquie au départ de la Grèce, un autre Syrien sera réinstallé de la Turquie vers l’UE. Les contreparties au plan d’accord sur les migrants obtenues par la Turquie montrent une capacité de négociation très élevée de la part d’Ankara.
Les obligations en matière de visa pour les citoyens turcs seront levées au plus tard à la fin du mois de juin 2016. L’UE, en étroite coopération avec la Turquie, accélérera encore le versement du montant de trois milliards d’euros initialement alloué au titre de la facilité en faveur des réfugiés en Turquie et assurera le financement d’autres projets en faveur de personnes bénéficiant d’une protection temporaire.
Le meilleur reste à venir: l’UE et la Turquie ont confirmé une nouvelle fois leur volonté de relancer le processus d’adhésion. D’ici-là qu’adviendra-t-il de la population de Cizre?
Il faut lire l’article paru ce week-end dans « Le Courrier » sur le sort que le gouvernement turc inflige à certaines cités kurdes. Leurs quartiers historiques, après avoir été bombardés par l’armée turque, sont expropriés sous prétexte de reconstruction par l’Etat ! les habitants survivants sont chassés, la vie locale anéantie au profit de futurs équipements touristiques. Et de très anciennes églises syriaques, chrétiennes sont également parmi les victimes de ces forfaits.