La France offrira bientôt le triste spectacle de luttes fratricides pour choisir le candidat ou la candidate capable de représenter son parti à l’élection présidentielle de Mai 2017.
PAR ALBERT EBASQUE
Cette façon de procéder est assez récente et semble symptomatique d’un certain malaise de la vie politique française. Car ce qui est choquant ce n’est pas la procédure en elle-même mais bien le nombre de postulants à ces élections primaires. Ces choix internes à chaque parti supposent en effet des débats sur la place publique… puis le rabibochage de tout ce petit monde devant les caméras, projecteurs et autres feux de l’actualité: embrassons-nous Folleville…
Mais quelles sont les motivations de ces prétendants? En premier lieu, être précisément pendant environ trois mois sous le feu des projecteurs. Cela contribue à accroître leur notoriété auprès du grand public, et cela même s’ils savent pertinemment que leurs chances de remporter cette pré-sélection sont absolument nulles. Ensuite, cela flatte leur ego – élément indispensable de tout bon politicien qui se respecte. Enfin, et c’est là que se pose le plus grand problème, cette course à l’échalote est aussi un concours de promesses dont chacun sait qu’elles sont illusoires: réductions d’impôts, augmentation des salaires, baisse du chômage, travailler moins pour gagner plus et autres fadaises sentant bon le clientélisme. Bref, rien que des bonnes nouvelles car ce n’est évidemment pas le moment de parler de sacrifices, d’efforts ou bien d’économies…
Qui est légitime pour se présenter à ces primaires? A priori, ce sont les chefs des partis ou bien des personnalités ayant joué un rôle-clef dans les rouages de la République au cours des dix à vingt dernières années. Mais de nombreux petits malins souhaitant se faire connaître du grand public profitent de cette tribune inespérée pour monter sur le manège de ce grand cirque électoral. Ainsi, en cet été 2016, au moins sept candidats pour le PS et pas moins de treize (!!!) pour Les Républicains sont-ils annoncés. Parmi les uns et les autres, des gens célèbres mais aussi de parfaits inconnus sans doute membres d’une certaine nomenklatura parisienne qui pensent tirer de cette opération un possible profit médiatique.
La technique est d’ailleurs assez efficace et parfaitement rôdée: je me présente en sachant que je n´ai aucune chance de gagner. Avec mes petits camarades, nous nous étrillons plus ou moins gentiment pendant plusieurs semaines au cours de débats télévisés qui me permettront d’accroître ma notoriété. Puis vient l’élection de la primaire et je tombe alors dans les bras du vainqueur auquel je jure fidélité sur la tête de ma mère et de ma belle-mère réunies. Tout cela n’est certes pas très glorieux mais c’est le prix que je dois payer si je veux avoir un poste de ministre dans un prochain gouvernement… à condition bien sûr que le vainqueur de mon parti soit ensuite élu au suffrage universel. Et si ce n’est pas le cas, je me serai au moins installé dans le paysage politico-médiatique pour quelques années. Mon ralliement au vainqueur m’aura fait revenir sur certaines de mes convictions, mais je ne suis pas à cela près…
Gageons que la raison prévaudra au cours des mois à venir pour ces primaires qui réuniront la crème et la sous-crème de nos politiciens. Espérons que cet exercice ne sera pas trop dévastateur à l’heure de la confrontation des projets et des idées. Sinon, une grande partie des électeurs se tourneront alors vers les marchands d’illusions, vers les extrêmes, vers celles et ceux qui se déclarent anti système ou prônent des solutions simples pour des problèmes complexes. Ceux-là ne rentrent d’ailleurs pas dans ce jeu absurde de la primaire car ils en connaissent les pièges.
La vie politique est pleine de noblesse quand elle est authentique, efficace et honnête. Mais elle peut aussi être affligeante quand elle donne lieu à ces mascarades qui n’intéressent que ceux qui en sont les acteurs. Imagine-t-on une seule seconde un De Gaulle ou un Mitterrand participant à une primaire? Non, car avec eux au moins on savait qui était le patron. Inquiétant, non?
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