Bernard et Donald, une certaine ressemblance


Depuis plusieurs mois la presse internationale nous rabâche les oreilles avec la course à la présidence américaine.

PAR  ALBERT EBASQUE

C’est ainsi tous les quatre ans depuis de nombreuses années, mais cette fois la personnalité d’un homme et ses outrecuidances braquent un peu plus les projecteurs sur ce long moment de la vie politique américaine. Cet homme, c’est évidemment l’ineffable Donald Trump que je ne peux m’empêcher, toutes choses égales par ailleurs, de rapprocher de Bernard Tapie, ancien astre luisant de la vie politique et des affaires en France. Ces deux personnalités ont en effet quelques points communs mais aussi de grandes différences, notamment sur leurs parcours respectifs et leurs affinités politiques.

Commençons par les différences: Donald est né avec une cuillère d’argent dans la bouche, ce qui n’est pas le cas de Bernard. Ce dernier vient en effet d’un milieu assez modeste mais, grâce à son talent, son culot et son intelligence parvient à se hisser au top niveau de la scène médiatique au milieu des années quatre-vingt. Par ailleurs, sur l’échiquier politique, Donald est clairement conservateur tandis que Bernard a le cœur qui penche à gauche sans que l’on sache très bien s’il s’agit de convictions profondes ou bien affaire d’opportunisme. En outre, Bernard a connu la case prison à la suite de ses agissements en tant que président d’un grand club de football et autres casseroles plus ou moins bien identifiées. Rien de cela pour Donald qui aura mené une vie de milliardaire sans paraît-il payer les impôts qu’il aurait dû payer… et cela en toute légalité.

Quant aux ressemblances, j’en vois essentiellement trois: en premier lieu, un physique ne laissant pas indifférent. C’est important à l´heure de l’image de ne pas ressembler à Quasimodo car la plupart des gens s’identifient à des personnes qui présentent bien… même si Donald est un peu ridicule avec son teint orangé et ses cheveux peroxydés. Deuxièmement, un sens inné de son marketing personnel avec un bagout exceptionnel. A l’ère de la communication, il faut en effet savoir parler, savoir convaincre et mettre à terre ses contradicteurs. Sur ce point, Bernard est (ou était) presque imbattable sur les plateaux de télévision tandis que Donald a lui aussi le sens du spectacle et maîtrise tous les rouages de la contradiction. Enfin, dernier point commun entre ces deux artistes: ils sont venus à la politique par le business, par les affaires. Donald a hérité de millions de dollars de son père tandis que Bernard a racheté des sociétés en faillite pour les renflouer à crédit, les compartimenter puis les revendre avec profit. L’affaire Adidas-Crédit Lyonnais à l’issue encore incertaine vingt ans après les faits reste le point d’orgue de la carrière de Bernard dont on ne sait plus à ce jour s’il est riche ou bien sur la paille.

Mais ces deux bêtes de scène entourées d’une armée d’avocats pour défendre leurs intérêts ont bien compris une chose: plus c’est gros, plus ça passe auprès d’une opinion publique souvent prête à écouter de beaux parleurs. Il y a alors un phénomène d’identification qui s´exerce auprès des foules et rares sont les personnes capables d’analyser en profondeur la cohérence des propositions, des promesses et des engagements car la forme est plus importante que le fond. Les bateleurs occupent alors le terrain sans que personne ne leur pose les bonnes questions….

L’Histoire du monde a vu de nombreux hommes providentiels. Exemple extrême mais significatif, l’Allemagne en a connu un dans les années trente qui dut son ascension à son culot et à son art du discours. Loin de moi l’idée de comparer Bernard et Donald à ce fou furieux qui entraîna son pays et le monde dans la guerre. Mais le point-clef réside dans la force de l’image et du verbe supplantant celle des idées et du projet politique. Car la complexité du monde rend séduisants les discours simplistes et c’est une raison supplémentaire pour aller au fond des choses lorsque surviennent un homme ou une femme ayant les réponses à toutes les questions.
Ainsi, Bernard et Donald, au-delà de leurs différences, ont-ils des profils assez similaires: l’argent est au centre du système, la parole est facile et l’homme est séduisant. Une certaine réussite à laquelle on rêve et le tour est joué. Soyons donc vigilants et ne nous laissons pas endormir par ces «winners» charmants, charmeurs et d’allure charismatique car le réveil sera certainement cruel.

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