Quel que soit l’élu en France, le citoyen soucieux d’un mode de vie encourageant les ressources renouvelables sera déçu


Emmanuel Macron peut-il encore échouer? La fonction présidentielle pourrait-elle lui échapper?

PAR CHRISTIAN CAMPICHE

Sa concurrente, Marine le Pen, a beau avoir progressé de 6 points par rapport à 2012, elle a beau avoir apporté au Front national le meilleur résultat de son histoire, le scénario d’une sainte alliance contre elle a toutes les chances de se réaliser. La présidente du FN connaîtrait ainsi le destin de son père, battu par Jacques Chirac en 2002. Cette année-là, toute la gauche s’était mobilisée pour faire échec au leader de l’extrême-droite en reportant ses votes sur le candidat bourgeois.

Au soir du premier tour, les commentaires titraient en majorité sur le séisme français. Parce que le PS a sombré. Parce que la droite traditionnelle ne participera pas au deuxième tour, pour la première fois de son histoire. On peut le voir comme ça. Mais on peut aussi se dire que ces cultures antagonistes se maintiennent au pouvoir grâce à Emmanuel Macron. Où se situe véritablement le financier trentenaire? A gauche, à droite? Au centre de l’opportunisme, en tout cas.

L’avènement de Macron bouleverse les schémas moins en raison d’un rupture idéologique – ses allégeances au grand capital sont évidentes, en témoigne la réaction euphorique de la bourse de Paris au lendemain du premier tour – que par la manière. Comment un pur produit marketing, un personnage créé de toutes pièces, lancé comme une marque de lessive peut-il parvenir au sommet de l’Etat? Le monde des affaires qui mise sur lui a réussi son coup. Avec Macron, l’Elysée prendra la voie de son championnat de football, sponsorisé par une chaîne de supermarchés.

« En marche, vers quoi? » ironisait ce matin un quotidien suisse, jouant sur le slogan d’Emmanuel Macron. Ce dernier n’est pas encore sur la marche suprême, deux semaines de marchandages s’ouvrent, qui verront une palette de prétendants à un poste de ministre monnayer leur soutien. Peu importe qu’ils soient de gauche ou de droite, l’important est que cette coalition de bric et de broc dame le pion à dame Le Pen. Laquelle fait ses calculs. Les déçus du premier tour ne nourriront pas seulement les rangs des abstentionnistes. Ils se vengeront en votant pour le FN. Dix pour cent de mélenchonistes ajoutés à dix pour cent de fillonistes, cela lui fait 45% de voix au second tour. Le graal est à quelques encablures. Mais il faudrait un retournement de situation à la Trump pour que Le Pen l’emporte.

Macron ou Le Pen. Quel que soit l’élu, le citoyen soucieux d’un mode de vie encourageant les ressources renouvelables sera déçu. Un seul exemple, le nucléaire. Tant Macron que Le Pen ne remettent pas en question le modèle énergétique fondé sur l’atome. Plus de 50 centrales en France! Qui dit mieux? L’Allemagne et l’Italie, ses grands partenaires européens y ont renoncé. La Suisse se prépare à la transition. La France n’y songe pas. Pourtant ses réacteurs vieillissent. Or les nuages, on le sait depuis Tchernobyl, ne s’arrêtent pas aux frontières.

Une raison de plus pour que les Suisses se sentent concernés par le grand jeu électoral français.

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8 commmentaires à “Quel que soit l’élu en France, le citoyen soucieux d’un mode de vie encourageant les ressources renouvelables sera déçu”

  1. La Méduse 24 avril 2017 at 14:58 #

    A relire: La destruction de la classe politique dirigeante a commencé:
    https://lilianeheldkhawam.com/2017/02/03/la-destruction-de-la-classe-politique-dirigeante-a-commence-liliane-held-khawam/

  2. Pierre Adler 25 avril 2017 at 11:51 #

    En évoquant la question énergétique par le biais de celle des énergies renouvelables, l’article de Christian Campiche touche le talon d’Achille des sociétés industrielles contemporaines et donc de leur gestion politique, que cette dernière soit de gauche ou de droite.

    La question énergétique est en fait infra-politique au sens où ce sont carrément le destin et la survie même de nos sociétés industrielles (qui ont la caractéristique de n’être pas simplement industrielles, mais thermo-industrielles, une distinction sur laquelle je vais revenir dans les lignes qui suivent) qui sont l’enjeu central de notre monde, que nous le voulions, que nous le reconnaissions ou non. La tendance principale des habitants de nos sociétés et de ceux qui les dirigent, qu’ils soient de droite ou de gauche, c’est le déni du mur vers lequel nous nous précipitons à grande vitesse.

    Sur cette question de l’énergie, Macron et Le Pen sont d’accord, car les deux pratiquent le déni, à savoir la politique de l’autruche et de la mauvaise foi. D’où le fait que à la fois Macron et Le Pen évitent la question décisive du statut des sources d’énergie sans lesquelles nos sociétés ne seraient pas ce qu’elles sont, c’est-à-dire des sociétés qui vivent et s’agitent par le feu et la chaleur que leur fournissent les sources fossiles d’énergie, à savoir les combustibles que sont le pétrole, le gaz naturel et le charbon. C’est cette dernière caractéristique que décrit l’expression ‘société thermo-industrielle’. Naturellement, on peut en dire tout autant du reste des partis et des tendances politiques contemporaines : ils sont tous dans le déni.

    Le destin des sociétés thermo-industrielles dépend entièrement de celui des sources fossiles d’énergie (ce qui inclut le pétrole et le gaz de schiste). Toute l’activité productiviste (extraction et appropriation des richesses de la terre, et leur transformation en biens ou produits, transport, mise en vente et consommation de ces produits, gestion des déchets occasionnés par les dites production et consommation) dépend d’apports énergétiques, car c’est l’énergie, qu’elle que ce soit sa nature, qui permet la transformation du monde (pas de mouvement sans énergie) et, plus spécifiquement en ce qui nous concerne, c’est l’énergie fortement concentrée des carburants fossiles qui seule permet la transformation intensive et extensive du monde caractérisant le thermo-industrialisme.

    Pour ne prendre qu’un exemple, une éolienne et son infrastructure (notamment, des routes) ne peuvent pas être construites à partir de l’énergie éolienne seule. Uniquement la thermo-industrie peut produire ce genre de machine et son infrastructure. Cela s’applique aussi aux usines nucléaires: elle ne peuvent pas être construites sans sources fossiles d’énergie.

    Bien qu’effectivement fort abondante, l’énergie solaire, elle, est diffuse, et ne peut donc pas remplacer l’énergie extrêmement concentrée des carburants fossiles au sens où elle permettrait de produire les mêmes effets d’ensemble et de puissance que les carburants fossiles. Cela signifie que la société thermo-industrielle est essentiellement une anomalie historique, une gigantesque “bulle”, et que la transition énergétique inévitable hors des carburants fossiles donnera lieu à une société modérément industrielle (à technologie essentiellement cloisonnée) dont la source d’énergie sera principalement solaire et qui sera radicalement différente de la société thermo-industrielle qui est la nôtre: elle sera bien plus spartiate, bien plus sobre et, bien sûr, beaucoup plus locale, puisque les moyens de transport à haute consommation de carburants fossiles (avions et automobiles, en particulier) vont graduellement disparaître.

    Troisième point, déjà touché dans le paragraphe précédent: la société thermo-industrielle à terme va disparaître et ce probablement avant la fin du siècle, principalement sous l’effet de l’épuisement des sources fossiles d’énergie accessibles et dont l’exploitation est rentable (c’est-à-dire dont le coût d’exploitation énergétique n’est pas supérieur à l’énergie produite par la source de carburant exploitée).

    La question politique, c’est donc la suivante : allons-nous sortir de la société thermo-industrielle à l’aveuglette et dans le chaos généralisé, ou de manière organisée et raisonnable?

    En ce moment, tout porte à croire que la sortie sera extrêmement chaotique et douloureuse.

    Repères pour ceux qui veulent en savoir plus :

    Pablo Servigne et Raphaël Stevens, “Comment tout peut s’effondrer. Petit manuel de collapsologie à l’usage des générations présentes” (Seuil, 2015).

    En anglais, John Michael Greer, “The Long Descent” et tout récemment “Dark Ages America”. Pour Greer, l’effondrement, qui a en fait déjà commencé, se fera principalement par phases de descente successive, avec des plateaux de calme relatif entre deux phases.

    Pour la différence entre société industrielle et société thermo-industrielle, voir Alain Gras, “Le choix du feu” (Fayard, 2007).

    Pour la question de l’énergie, des types d’énergie (concentrée et diffuse), de l’entropie et de leur rapport à l’économie, voir Nicholas Georgescu-Roegen, “Demain la décroissance. Entropie, écologie, économie” (Editions Favre, 1979; réédité depuis).

  3. Pierre Adler 25 avril 2017 at 13:31 #

    Pour une réflexion d’ensemble sur la situation politique française actuelle et les élections, je me permets de recommander l’interview toute fraîche d’Alain de Benoist:

    http://blogelements.typepad.fr/blog/2017/04/emmanuel-macron-est-une-petite-chose-caract%C3%A9rielle-manipulable-et-incapable-de-d%C3%A9cision.html

  4. La Méduse 25 avril 2017 at 18:00 #

    Merci Pierre Adler. Je vous suis dans votre question politique, à la fin. Nous vivons dans un monde totalement schizophrénique qui ne fait pas de lien entre son mode de vie à consommation frénétique et les dérèglements qu’il dénonce dans de stériles conférences internationales.

  5. Pierre Adler 25 avril 2017 at 22:49 #

    Une petite correction, dans le 4è para de mon premier commentaire ci-dessus:

    quelle que soit sa nature

    et non pas:

    qu’elle que soit sa nature

  6. Ringo Veauma 25 avril 2017 at 23:43 #

    Juste un détail : il n´y a pas “plus de 50 centrales nucléaires en France” mais seulement 19… avec au total 58 réacteurs.

  7. Ringo Veauma 26 avril 2017 at 17:01 #

    Et j´ajoute que sur ces 19 centrales françaises, six sont actuellement en phase de démantèlement. Car une centrale nucléaire, ça ne se ferme pas comme une porte de garage… et cela prend donc des années.

  8. brigitte 27 avril 2017 at 05:54 #

    Je ne vais pas entrer dans le débat vu le bulletin de vote concernant les énergies déjà rempli et prêt à être posté
    Cependant une question taraude mon esprit est-ce que tous les pays membres de L’UE dont nous ne faisons pas partie devront aussi participer aux frais du démantèlement des centrales nucléaires comme en France ?
    Espérons que non sinon bonjour tristesse pour les viennent ensuite surtout qu’on voit mal les autres pays membres de l’UE fort endettés voler au secours de la descendance Suisse
    qui espérons le ne soit plus aussi facilement arnaquée que ses anciens qui depuis 2004 regrettent le temps ou le numérique n’était pas encore si précis pour gruger tant de citoyens

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