Chère Mobilière, très chère Mobilière…


Vingt dieux (voire plus !), quel pinâcle d’être administrateur à La Mobilière. Un jour de séance, et hop, 9 000 francs sur le compte en banque. Comme l’assurance bernoise estime que c’est « justifié », cela donne envie de lui écrire une lettre. Comme dans les pubs.

PAR JOËL CERUTTI

Chère Mobilière. J’apprécie beaucoup vos spots de pub qui se terminent avec ce slogan : « Quoiqu’il arrive, nous vous aidons rapidement et simplement. » Sur votre site, vous appuyez cette démarche par cette phrase : « L’étroite relation qui nous lie à nos clients nous permet de tenir les promesses de nos publicités. » Je vous en remercie car votre sincérité se prouve par des actes. Je suppose que vos administrateurs possèdent des assurances en votre sein. Comme « clients », la presse du jour m’a appris ô combien vous les soigniez, ô combien vous étiez attentifs à leur bien-être. Vous les rétribuez 36000 francs par an, si j’en crois 24 heures et le Tages-Anzeiger. À raison de quatre séances réparties sur douze mois, cela offre un confort pécunier de 9 000 francs « en moyenne ». J’apprécie cette générosité envers vos dévoués administrateurs.

Entre nous, aucun chat ne mérite d’être fouetté si on débat sur la nécessité d’une telle somme.

Comparons-la avec ce que gagne Bill Gates, l’homme élu le plus riche de la planète depuis quatre années consécutives. Cela relativisera les hurlements de certains jaloux miséreux. Bill Gates trône au sommet d’une fortune de 86 milliards, soit 11 milliards en bonus par rapport à 2016. En 36 secondes, son compte en banque accumule les 9 000 francs que perçoit un modeste administrateur qui œuvre chez vous, Chère Mobilière.

Je m’excuse. Un tel calcul, cela remet des montres à l’heure, Rolex ou pas Rolex.

Après, c’est facile de balancer, comme Thomas Minder – oui, celui de l’initiative sur les rémunérations abusives – que : « Les sommes sont beaucoup trop élevées. Les assurés devraient réagir en résiliant leur contrat. » Oh ! Si les citoyens vous boycottent, vous ne pourrez plus les aider « rapidement et simplement » comme vous le faites déjà avec vos vénérables administrateurs. Qui sont d’ailleurs « responsables » en cas de «problèmes».

Selon votre dernier rapport annuel 2016, Chère Mobilière, vous réalisez un bénéfice consolidé de 439,5 millions de francs (contre 383,7 millions en 2015). Pourtant personne n’est jamais trop prudent ! D’aucuns connaissent la fragilité des millions, les catastrophes n’épargent personne. Et si vos administrateurs devaient commencer à limer sur les 9 000 francs par séance, où irait la logique d’entreprise helvétique ? Je ne vous le demande même pas !

Chère Mobilière, je me dois quand même d’émettre un bémol : votre communication envers la presse. Aux attaques du Tages-Anzeiger, votre seule riposte a été un mou : «Ce montant est entièrement justifié». Entre nous, en interne, je vous l’accorde, vous avez raison. Face à l’extérieur, soyez plus explicite, faites passer vos administrateurs pour des héros qui bossent trois mois pour préparer ces séances. À plein. La caissière de supermarché – enfin ceux où il en reste encore – entrera en empathie : 3 000 francs par mois, c’est moins que son salaire à elle et sans faire face à de lourdes responsabilités. Avec votre « entièrement justifié », je croirais presque ce sont des branleurs nantis que vous convoquez pour la frime, leurs noms et leurs réseaux de lobbys. Chère Mobilière, vous et moi savons que ce n’est pas le cas, hein ?

PJ Investigation

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