Nouveaux livres et bonnes pages – Jura 1962-1969, les Affaires Berberat, Fleury, Varrin


Dans les années 60, une chasse aux sorcières vise ceux et celles qui manifestent des opinions séparatistes.

La recrudescence des actions des milieux autonomistes a le don d’exaspérer les autorités bernoises. Elles décident de réagir en s’engageant sur la voie de la répression. La Berne cantonale prend des mesures contre ceux et celles qu’elle suspecte d’être favorables à l’autonomie du Jura. Elle projette de stopper l’engouement de la jeunesse par l’intimidation. Une chasse aux sorcières s’organise, avec les enseignants en première ligne. D’autres Jurassiens, dont le seul tort est d’afficher des sentiments séparatistes, sont sanctionnés. Les médias s’emparent de quelques-unes de ces affaires.

Romain Berberat, domicilié à Lausanne, s’est adressé à la foule (en civil) du haut de la tribune lors de la Fête du peuple de 1962. Il parlait en qualité de porte-parole des Jurassiens de l’extérieur. Intolérable pour l’exécutif cantonal. La sentence ne tarde pas. L’armée accède à la requête du Gouvernement bernois et retire le commandement de sa compagnie jurassienne à l’officier Romain Berberat.

Le gendarme Robert Fleury, en poste à Bienne, ni afflué au Bélier, ni au RJ, est sommé le 23 septembre 1964, sous menace de révocation, de démissionner dans les cinq jours. Il refuse vu qu’aucune faute professionnelle ne peut lui être reprochée. Le commandant de la police confirme sa demande de révocation le 30 septembre. Le gendarme Fleury fait l’objet d’une mise à pied … avant d’être réintégré dans ses fonctions en novembre. Quatre mois plus tard, le Gouvernement bernois blanchit totalement Robert Fleury. Victorieux mais dégoûté, il quitte volontairement le corps de la police bernoise à la fin de 1965.

La Confédération commet à son tour un délit d’opinion à l’encontre de Bernard Varrin qui, en raison de ses activités politiques – il était responsable du Groupe Bélier – n’est pas réélu en tant que fonctionnaire postal. Les employés postaux jurassiens de la section neuchâteloise des fonctionnaires postaux interpellent le conseiller fédéral Roger Bonvin, contraint de débattre de cette affaire au Conseil national. Bernard Varrin choisit de quitter les PTT de son plein gré en 1969.

Ces événements – ils ne sont que la pointe de l’iceberg – ont frappé l’opinion publique et donné du grain à moudre au mouvement indépendantiste.

Faire un exemple

« Les autorités bernoises désiraient mater ces séparatistes et au travers de ma personne faire un exemple », affirme Robert Fleury, ancien gendarme, maire de Develier de 1976 à 1984. « Très dur moralement à vivre quand on est jeune marié et père d’un bébé de quelques mois. Il m’a fallu retrouver du boulot. Dans le Jura, vu les remous provoqués par cette affaire, les employeurs hésitaient à m’engager. J’ai d’abord retrouvé, grâce à un Jurassien de l’extérieur, durant deux ans un emploi à Lucerne avant de revenir dans mon pays. Les policiers qui avaient participé à la cabale ont été montés en grade par le Gouvernement bernois.»

Jean-Pierre Molliet

(Extrait de l’ouvrage de Jean-Pierre Molliet “Les événements qui ont modelé l’Histoire jurassienne“. Delémont, Editions D+P SA, 2017)

 

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