Franz Gertsch ou le renouveau de la gravure sur bois


Le Musée Jenisch présente 22 estampes (souvent de très grand format) d’un créateur suisse d’envergure internationale. Né en 1930, le Bernois Franz Gertsch est l’inventeur d’une nouvelle technique qui a renouvelé la xylogravure.

Un court film permet de comprendre celle-ci, que nous allons sommairement décrire. Sur des planches rigoureusement assemblées et formant de grands panneaux, l’artiste projette une image photographique sous forme de diapositive. Il s’est exprimé à ce propos: «La réalité ne peut plus être saisie qu’avec un appareil photographique, car l’homme s’est habitué à considérer la réalité photographique comme le rendu maximal du réel.» Puis il marque les contours et l’intérieur des formes projetées – par exemple des branches d’arbres – d’un nombre infini de petits trous obtenus avec un gouge-couteau à lame en biseau. L’œuvre, encrée au rouleau, est ensuite imprimée sur du papier japon, ou de papier à la main obtenu à l’aide de fibres de mûrier et de lin préparé… au Japon, dans l’atelier du maître Heizeburo Iwano.

Par cette technique très originale – dont on peut cependant craindre qu’elle ne devienne un peu répétitive et ne finisse par se muer en procédé – l’artiste obtient des œuvres étranges, dans la mouvance à la fois du pointillisme et de la peinture photographique. Elles tiennent certes de l’hyperréalisme, mais ont en même temps une véritable charge poétique.

Que représente Gertsch sur ses estampes monochromes? Des paysages de sous-bois, des plantes et des feuilles, qui ne sont pas sans rappeler ici et là la peinture chinoise hua-hui (fleurs et oiseaux). Celle-ci, de manière métonymique, évoque l’ensemble de l’univers à travers quelques feuilles de bambou ou une branche d’arbre. Notons que la technique utilisée par l’artiste convient particulièrement bien pour représenter les eaux, dont on perçoit alors le mouvement et les reflets.

Nous avons été moins convaincus par les portraits exposés dans la deuxième salle. Les visages eux aussi monochromes, mais très pâles, presque évanescents, dégagent certes une impression à la fois d’étrangeté, de paix et d’éternité.

Dès 1969, Franz Gertsch a abandonné l’abstraction pour revenir à la figuration. Une figuration qui cependant n’est pas la représentation fidèle du visible, mais sa transposition poétique, voire magique.

Pierre Jeanneret

«Franz Gertsch visages paysages», Vevey, Musée Jenisch, jusqu’au 4 février 2018

Domaine Public

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