(Dis)Credit Suisse


Toujours pas de réponse après un prêt douteux au Mozambique.

PAR JEAN-DANIEL DELLEY

Le dossier n’intéresse plus guère. Faire le dos rond reste une stratégie payante, même si Actares, l’actionnariat pour une économie durable, persiste à demander des comptes à Credit Suisse au sujet d’un crédit accordé au Mozambique en 2013/2014 dans des conditions pour le moins douteuses.

Domaine Public a relaté les faits dès qu’ils ont été rendus publics. Nous avons traduit et publié la lettre ouverte de l’association Contrepoint à la direction de Credit Suisse (DP 2145), lettre restée sans réponse. De même la direction de la banque n’a pas daigné répondre aux questions d’Actares lors de l’assemblée générale des actionnaires de 2017 (DP 2164). Actares est revenu à la charge à l’occasion de la récente assemblée générale de 2018, sans plus de succès, le président Rohner bottant une nouvelle fois en touche.

Rappel des faits. Conjointement avec une banque russe, Credit Suisse Londres a accordé un prêt de plus de deux milliards de dollars au Mozambique, officiellement pour la constitution d’une flottille de pêche au thon. Etrangement, l’argent est versé à une entreprise franco-libanaise, commanditaire des bateaux. Dans l’opération, un quart du montant du crédit a disparu sans laisser de trace. On soupçonne que cet argent a servi à des achats d’armes dans un contexte de reprise de la guerre civile dans le pays. Quant aux bateaux, ils se sont révélés inutilisables et rouillent actuellement dans un port mozambicain.

Dans cette affaire, Credit Suisse a manifestement manqué à son devoir de surveillance. En effet, l’octroi du crédit était lié à trois conditions dont aucune n’a été remplie: feu vert de la banque centrale du Mozambique, surveillance du processus par la justice administrative du pays et information du Fonds monétaire international (FMI). De plus, la garantie d’Etat exigée par CS n’a pas reçu l’aval du Parlement comme le prescrit la Constitution.

Il y a deux ans, lorsque le scandale éclate, le FMI et les pays donateurs, dont la Suisse, interrompent leur aide financière jusqu’à complet éclaircissement de cette affaire. Le FMI exige un audit, conduit par une société indépendante et prolongé à trois reprises, tant Maputo montre sa mauvaise volonté à coopérer sous prétexte de «sécurité nationale» (DP 2179).

Résultat: le Mozambique, l’un des pays les plus pauvres de la planète, est en cessation de paiement; il s’avère incapable de financer son budget et coupe dans ses dépenses de formation et de santé. Mais, pour les patrons de Credit Suisse, l’assemblée des actionnaires n’est pas le lieu pour entrer dans ces détails. Lesquels actionnaires approuvent sans broncher les rémunérations de la direction – 9,7 millions de francs pour le directeur général et 69,9 millions pour les 13 autres membres de la direction – et du conseil d’administration – 11,456 millions à partager entre ses 12 membres. A Credit Suisse, le silence est d’or.

Domaine Public

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