L’Afghanistan dans le miroir des médias, guerre et bons voisinages


 

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L’un des plus sérieux obstacles à une information crédible sur l’Afghanistan provient d’une méconnaissance du pays et de la région où il se trouve. On ne le dira jamais assez.  Ce serait prendre acte qu’il s’agit d’une guerre par procuration. Les intérêts intérieurs et extérieurs entrent en conflit et soutiennent les talibans, mais aussi Daech et le groupe Haqqani entre autres. Les victimes sont afghanes, soldats et population également.

PAR SIMA DAKKUS RASSOUL

Pris entre l’Iran, ses problèmes, ses stratégies nationales et internationales et le Pakistan, son ambition et ses vues sur l’Afghanistan, les Afghans doivent se confronter à des enjeux qui les dépassent et contrarient la fin de la longue guerre de quatre décennies. Non seulement, le pays s’appauvrit, mais encore la guerre met un frein au progrès de l’éducation et la situation des femmes. La question des fraudes flambe à l’approche des élections prochaines dont on ne sait si elles auront lieu, ni quand.

Imran Khan, nouveau premier ministre pakistanais, ancien joueur star de cricket, né en 1952, a fondé le Mouvement du Pakistan pour la Justice en 1996 et remporté les élections qui ont fait, cet été, de son parti la première force de son pays. Universitaire, philanthrope et figure reconnu de l’opposition pakistanaise avant son accession au pouvoir, il est issu d’une grande lignée pachtoune, en discontinuité de la tradition au Pakistan d’avoir des premiers ministres pendjabis.

Son arrivée était donc très attendue en Afghanistan notamment en raison des relations tendues entre les deux pays voisins depuis la naissance de l’État pakistanais. Les Afghans se sont montrés prudents dans les médias et réfréné leur optimisme. Le 17 septembre, Imran Khan a promis la citoyenneté pakistanaise à 1,5 millions de réfugiés afghans en ajoutant qu’il allait accorder des passeports aux parents d’enfants nés au Pakistan.

De l’autre côté de la frontière, les réactions ont été mitigées. La proposition du premier ministre pouvait paraître comme une forme d’annexion qui touche les Afghans réfugiés sur son territoire.

Le Premier ministre a rencontré également des résistances sur le sujet sur le terrain politique. Il est revenu sur ses déclarations, en partie, en arguant que c’était une proposition et qu’elle serait objet de débats. Il a cependant maintenu l’offre de citoyenneté devant le Parlement.

Les médias, les politiciens et intellectuels afghans ont débattu de la prise de position d’Imran Khan. Sur le principe, le nouveau premier ministre pakistanais invoque la question du droit international pour accorder leur droit aux réfugiés afghans – particulièrement ceux nés au Pakistan. Mais ce n’est qu’une partie de relations complexes et délicates entre les deux pays et dont l’Afghanistan est le bouc émissaire régional.

Pour mieux comprendre les enjeux, on peut reprendre l’excellent historique de Soraya Parwan* concernant la présence de réfugiés afghans au Pakistan et de règles internationales concernant les réfugiés :

Les premiers réfugiés afghans sont entrés au Pakistan en 1979, avec l’invasion russe en Afghanistan – au cours des trente derrières années, les régimes ont changé à de nombreuses reprises et provoqué des violences qui ont généré des déplacements. Les organisations indiquent qu’il y a au total 2,5 millions de réfugiés afghans au Pakistan et de 600’000 à 1 million qui ne sont pas enregistrés. On estime que 60 percent d’entre eux sont nés au Pakistan qui, donc seraient à même de demander la citoyenneté pakistanaise.
L’Article 14  de la déclaration universelle des droits humains, 1948, reconnaît le droit d’une personne à chercher refuge dans d’autres pays en cas de persécution. Le Pakistan a pu avancer l’argument qu’il n’avait pas à traiter les Afghans qu’il accueillait selon le standard imposé par la loi internationale, parce qu’il ne faisait pas partie de la Convention de 1951 relative au Statut de Réfugié, ni au Protocole de 1967.

Depuis juillet 2016, selon le Human Rights Watch, plus de 600,000 réfugiés afghans ont résidé au Pakistan. 365,000 desquels étaient enregistrés et ont été  forcés de retourner en Afghanistan. Le plus vaste retour de réfugiés au monde au cours des dernières années. Les mesures de coercition prises comportaient la menace de leur retirer leur statut légal, de les déporter en plein hiver, et des manoeuvres policières comportant extorsions, détentions arbitraires et raids policiers de nuit. Dans la province de Khyber Pakhtunkhwa, la police a annoncé l’arrestation de 2000 « résidents illégaux ». De plus, les abus de la police étaient si brutaux que les Afghans devaient restreindre leurs mouvements – ce qui avait un impact négatif sur leur accès à l’éducation et au travail. La campagne de retour forcé lancée en 2017 qui a connu trois rappels est considérée comme ayant largement échoué.

Le principe de non-refoulement en loi internationale interdit à un quelconque pays avec des réfugiés de les renvoyer dans un pays où ils peuvent être persécutés pour des raisons de « race, religion, nationalité, comme membre d’un groupe social ou d’opinion politique ». En outre, le principe d’usage selon la loi internationale s’applique à tous les Etats même s’ils n’ont pas signé de conventions sur le statut de réfugié.

Trad. SDR de l’anglais

*Soraya Parwan, Vice-présidente de la Communication du Conseil des jeunes pour la Fondation Asia Pacific.

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