Uber et Cabify quittent les rues de Barcelone


En claquant la porte, les deux VTC Uber et Cabify viennent donc de quitter les rues et routes de Catalogne après que son gouvernement ait voté une nouvelle réglementation sur les transports. Les taxis officiels barcelonais se réjouissent de ce dénouement après plusieurs années de bataille pour faire valoir leurs droits. 

La branche espagnole du VTC américain Uber, à laquelle s’est allié son concurrent direct Cabify a décidé de cesser leurs activités en Catalogne. A partir du 1er février 2019. L’un des articles contraignants de cette loi oblige notamment les clients de n’importe laquelle des compagnies VTC à réserver leur course au plus tard 15 minutes à l’avance. De plus, les autorités catalanes peuvent étendre ce délai jusqu’à une heure si elles l’estiment nécessaire. Elles interdisent également le principe de géolocalisation.

A leur tour, les chauffeurs de taxi de Madrid sont sur le pied de guerre et, stimulés par cette récente décision, feront tout pour parvenir à une loi similaire. L’attitude d’Uber voulant qu’on ne cède rien aux gouvernements qui pourraient être défavorables est une méthode qui ne semble pas porter ses fruits.

C’est un tremblement de terre pour Uber, qui fait suite à tout un chapelet de procès en Europe de l’ouest et du sud. Uber doit, dans la plupart des cas, faire appel aux décisions de justice. La société américaine, pour son procédé de mise en relation entre chauffeurs (VTC) et passagers, a été condamnée, le jeudi 10 janvier 2019 à requalifier son contrat de travail en contrat commercial l’ayant lié à un chauffeur indépendant entre octobre 2016 et avril 2017. Ce dernier, Maximilien Petrovic, avait été débouté en premier instance en juin 2018 par le Tribunal des prud’hommes de Paris et, ayant fait appel devant la cour de cassation, a fini par obtenir gain de cause. Ce jugement positif en faveur d’un chauffeur indépendant est une première en France. Le chauffeur, à l’origine de la plainte, avait saisi la justice en juin 2017, deux mois après qu’Uber avait désactivé son compte en le privant de la possibilité de recevoir de nouvelles demandes de réservation.

Dans sa décision, la cour expliquait que l’employé ne pouvait être considéré (comme voulait le prétendre Uber) comme une entreprise individuelle indépendante parce qu’il ne pouvait pas créer sa clientèle propre. Or, c’est précisément ce qu’Uber impose à ses employés. Elle leur interdit la maîtrise de l’organisation de leurs tâches, la recherche d’une clientèle et le droit à s’adresser à des fournisseurs de leur choix. 

Si un chauffeur décide de se déconnecter, Uber se réserve le droit de restreindre ou carrément de désactiver l’accès ou l’utilisation de l’application. Cette pratique a pour but d’imposer aux chauffeurs de se tenir constamment à la disposition d’Uber sans pouvoir choisir librement, comme le ferait un chauffeur indépendant, la course qui leur convient ou non, chose possible pour un taxi indépendant. Dans cette affaire, les juges ont considéré qu’il y avait un degré inacceptable dans l’accord qu’Uber faisait signer à ses chauffeurs. 

Cet aspect juridique est en train de faire son chemin dans les cours de justice un peu partout sur notre planète et fera probablement jurisprudence si d’autres jugements ont lieu ailleurs dans le monde. Des avocats britanniques ont, par exemple, montré un vif intérêt, même si la juridiction britannique est assez éloignée de celle de la France. L’un des principaux syndicats britanniques qui soutenait les chauffeurs à l’origine de la plainte, l’Independent Workers Union of Great Britain (IWGB), estime que “Uber devrait simplement accepter le verdict et cesser d’essayer de trouver des failles qui privent les gens de leurs droits durement acquis et de leur salaire durement gagné”.

Coup dur pour Uber à Londres. Regulator Transport for London a  refusé le renouvellement de sa licence d’exploitation à compter du 30 septembre 2018. Avec ou sans une procédure d’appel de la part d’Uber, c’est une nouvelle destination business qui tourne le dos au leader mondial des VTC.

Après le Danemark ou la Hongrie, Uber voit une nouvelle fois son champ de manœuvre restreint, tandis qu’en parallèle, elle est confrontée à d’autres batailles juridiques aux Etats-Unis ou à travers le monde. On constate que, dans une stratégie incompréhensible, Uber ne cesse de faire appel à des procès et ne cesse de perdre en persistant à refuser les verdicts propres à chaque pays en cherchant en vain des échappatoires. Aux Pays-Bas, c’est la Sécurité routière qui a demandé d’arrêter les activités de la plate-forme VTC pour les excès de vitesse et les prises de risque en matière de circulation automobile. Lorsqu’il y avait infraction, Uber remboursait les PV aux chauffeurs, encourageant les dépassements de vitesse pour offrir plus de rapidité de service aux clients. Jusqu’alors, les chauffeurs VTC étaient moins surveillés que les autres aux Pays-Bas. Les choses viennent de changer, la Sécurité routière néerlandaise étant parvenue à interdire les activités d’Uber sur son territoire. Selon un porte-parole de la police néerlandaise, Uber utiliserait souvent de jeunes conducteurs inexpérimentés. “Ces chauffeurs sont payés à des prix très compétitifs par trajet et ils doivent conduire beaucoup pour gagner un peu d’argent”, explique-t-il. “Cela se traduit par des vitesses excessives et un comportement dangereux et irresponsable.”

Certes, après la fermeture d’Uber et de Cabify à Barcelone, de nombreux emplois seront supprimés et c’est bien malheureux, mais, comme dans la théorie du verre à moitié vide ou à moitié plein, on peut y trouver des aspects positifs. Le premier est que, pour une fois dans l’histoire d’Uber et de Cabify, aller ailleurs faire leur pratique d’emploi au rabais, à la limite de l’esclavage, permettra à certaines de ses personnes de trouver peut-être un travail mieux rémunéré, plus gratifiant et plus légal. Le second aspect positif sera la dure bataille à laquelle s’étaient engagés les chauffeurs de taxi officiels, plus particulièrement les petits exploitants qui, respectant la loi catalane et étant inscrit officiellement, trouvent dans ce déroulement un certain côté positif, sans compter l’éviction d’un dangereux prédateur en matière de concurrence déloyale.

Gérard Blanc / Je pars 

Sources : Le Monde, Le Parisien, journal de Montréal, le Figaro

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