Boeing 737 Max, la suite du feuilleton


Depuis la catastrophe de Lionair et d’Ethiopian Airlines, Boeing admet son  erreur et s’enfonce dans un gouffre. Trump ne peut pas s’empêcher de mettre son grain de sel par des déclarations farfelues.

Après la décision d’American Airlines d’annuler 115 vols opérés par des Boeing 737 MAX, Donald Trump n’a pas pu s’empêcher de twitter « Je ne connais peut-être rien en image de marque (et pourtant j’ai été élu président),  mais si j’étais Boeing, je réparerais les B737 Max  et je commercialiserais l’avion sous un autre nom». Cela rappelle un autre stupide tweet de sa part indiquant qu’il fallait envoyer des Canadairs pour éteindre le l’incendie de Notre-Dame de Paris !

Soyons sérieux : j’imagine que Boeing n’a que faire de tels conseils du président des Etats-Unis. Pour l’instant, le constructeur a reconnu l’existence d’un nouveau problème de logiciel sur ses 737 MAX, en plus du système anti-décrochage MCAS défectueux qui est à l’origine des accidents précités. Il s’agit d’une autre fonction n’ayant rien avoir avec le décrochage. 

Dans le Financial Times, l’avionneur veut se montrer néanmoins optimiste en informant d’une progression en cours. Voulant minimiser la gravité de ces deux inconvénients, Boeing a déclaré qu’il s’agissait de problèmes mineurs, ce qui contredit une enquête du quotidien Washington Post qui, a contrario, conclurait à des disfonctionnements primordiaux pour la sécurité des passagers.

Selon le New York Times, beaucoup de pilotes de Boeing 737 Max n’étaient pas informés de façon appropriée sur les particularités de ces avions et ont appris à les manipuler sur des iPad. Les syndicats de pilotes des sociétés Southwest Airlines et American Airlines auraient à plusieurs reprises demandé à Boeing de mettre au point un simulateur pour le modèle Max mais leurs demandes étaient restées lettres mortes, la Federal Aviation Administration américaine (FAA) ayant conclu que les pilotes n’avaient pas besoin d’entraînement supplémentaire. Greg Bowen, président de l’association des pilotes de Southwest Airlines aurait dévoilé au quotidien newyorkais que Boeing avait prévu la conception future d’un simulateur de vol, tout en ayant déjà livré les appareils.  Les pilotes se seraient alors rabattus sur leurs IPad pour remédier à cette lacune.

On imagine que Boeing  aurait pu se passer de cette mauvaise publicité à laquelle va immanquablement s’ajouter la défiance de nombreux passagers pour embarquer sur de tels appareils.  Fort heureusement sans passagers à bord, un Boeing 737 MAX de Southwest Airlines s’est posé fin mars 2019 en catastrophe à Orlando (Floride). C’est à la suite de cet incident que la FAA a décidé de clouer au sol tous les Boeing 737 MAX sur le territoire des USA. 

Ne nous voilons pas la face, l’immobilisation des B737 dans le monde entier  coûte très cher à de nombreuses compagnies aériennes. Celles-ci doivent louer des avions de remplacement et réclament à Boeing  des compensations.  On s’en doute, Boeing n’est pas la seule entreprise à être impactée financièrement par ce problème. Les fournisseurs de l’avionneur ont  vu le cours de leurs actions d’effondrer dans son sillage, comme Spirit AeroSystems et le Triumph Group aux USA, mais aussi Safran, Melrose et Meggit en Europe. On estime le retour dans les airs des Boeing 737 MAX pas avant six mois et la production globale des B737, jusque-là prévue autour de 630 exemplaires, pourrait être inférieure à 500. A ce jour, environ 4700 appareils de la famille MAX  monocouloirs sont en attente de livraison. 

Sans rentrer dans des explications trop techniques, disons que le défaut principal viendrait d’une sonde d’ « d’angle d’attaque » (AOA)  ou capteur d’incidence alimentant  en information le système anti-décrochage qui fut la cause des accidents précités. Or, ne disposant que d’une seule AOA, Boeing a mis cette fonction comme « optionnelle ». Un 737 MAX coûte aux environs de  110 millions de dollars sur catalogue, mais lors des tractations de vente, le prix peut descendre jusqu’à 55 millions de dollars. A ce tarif-là, on imagine que certaines fonctions (manque de formation, mauvaise relations homme-machine, etc.) peuvent être  négligées au prix de vies humaines.  A ce jour, la solution de Donald Trump est une vaste rigolade. Le mal est fait et l’industrie aéronautique, jugée fiable jusqu’alors peut en prendre pour son grade, 

Tant que l’argent passera avant la sécurité, d’autres accidents se produiront, en dépit d’une conclusion cynique qui pourrait dire : « On ne fait pas d’omelette sans casser des œufs». Insupportable ? Oui, mais je dirais surtout  bêtise humaine. 

Gérard Blanc

Je pars

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