Chronique médicale – Dons d’organes, qui ne veut pas sauver des vies?

Le don d’organes est un geste noble et généreux. Mais voilà qu’une organisation de médecins et de soignants ÄPOL (Aerzte und Pflegefachpersonen gegen Organspende am Lebensende) s’insurge et publie un article dans le bulletin des médecins suisses (BMS 2019;100 (14): 508-510). Elle propose d’interdire le prélèvement d’organes de personnes en fin de vie. Les arguments avancés sont les suivants:

1) Seuls des organes vivants peuvent être transplantés. Les donneurs sont donc encore vivants lors du prélèvement, qui provoque leur décès. 

2) La médecine de transplantation ne sait pas ce qui se passe au niveau de la conscience, ni au niveau psychique et intellectuel, mais fait comme si elle le savait. 

3) La médecine de transplantation prélève des organes à des personnes en mort cérébrale. Cela signifie implicitement que seule la mort cérébrale est importante, mais que celle du corps et des autres organes ne compte pas dans le décès d’une personne. Cette hypothèse ne peut être prouvée. 

4) La médecine de transplantation transplante des organes vivants. Elle intervient donc dans la vie – celle du donneur aussi – et il convient de prouver qu’elle ne porte pas préjudice à la vie des donneurs. Ce qui est impossible. 

5) Le processus de mort n’est pas terminé au moment du prélèvement d’organes et est donc perturbé.

L’ÄPOL ajoute: « Nous rectifierons ensuite les informations trompeuses véhiculées dans l’opinion publique sur le concept de mort cérébrale et sa survenue et présenterons les conclusions actuelles des débats internationaux. »

La réaction ne s’est pas fait attendre et un groupe de patients transplantés pulmonaires (Patientengruppe der Schweizer Lungentransplantierte) a manifesté son incompréhension (Lungentranplantierte schütteln den Kopf) et critiqué le journal pour avoir « offert une plateforme à cette organisation » alors qu’eux-mêmes n’ont pas eu la possibilité de s’exprimer. (BMS 2019;100 (116): 581)

Dans sa réplique, l’ÄOPL (BMS 2019;100 (19): 646) maintient ses arguments, ajoutant que la « mort cérébrale » ne concerne que 3% de l’organisme.

Le débat n’est certainement pas clos et risque d’être passionnant et passionné!

Dr Werner Häfliger, médecin FMH

Dessin: Stephff

Sources:

Définition de la mort et prélèvement d’organes – Aspects constitutionnels. Olivier Guillod, professeur, directeur; Jean-François Dumoulin, collaborateur scientifique Institut de droit de la santé (IDS), Université de Neuchâtel 

Ordonnance sur la transplantation, 810.211


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