Je me fais du mauvais sang pour les métempsychosistes. Ils croient à la transmigration de l’âme mais comment s’y prendre si les climatologues nous prédisent la disparition des espèces?
« Rin del angelito » est une très belle chanson andine de Violeta Parra. « Quand meurt la chair, l’âme cherche à se loger, à l’intérieur d’un papillon ou d’un petit oiseau ». Abeilles, hirondelles, mésanges, vous qui nous contemplez de haut, existerez-vous encore lorsque je quitterai ce monde? Offrirez-vous l’hospitalité à l’ange qui s’envole?
Bêtes de l’Arche, tenez bon! Lions, opossums, tigres, girafes, éléphants, baleines, résistez au feu et aux poisons qui dévorent la planète! Sans vous, l’être humain n’aurait pour destination finale que le corps d’un autre homme, d’une autre femme. Des coreligionnaires à qui l’on prédit aussi un funeste destin.
A moins que… Oui, à moins que les fourmis ne sauvent la planète. Avez-vous vu comment cet insecte résiste aux inondations? Des milliers de fourmis se sacrifient pour créer un pont sur lequel se juchent des milliers d’autres. Leur sens de l’organisation est tel qu’elles peuplent l’univers souterrain et le dominent en dépit de leur petite taille. Rien ne les arrêtera: leurs prédateurs, pangolins et autres tamanoirs, sont en voie d’extinction. Résultat, elles continuent de proliférer. Personne n’a jamais pu les compter, mais les estimations donnent le tournis. On parle de dix millions de milliards de fourmis. De quoi caser outre-tombe des millions de fois nos sept milliards de Terriens!
Je ne crois pas en la métempsychose, ni en la réincarnation. Quel intérêt à fantasmer sur un passé hypothétique de roi ou bandit, saurien ou moustique, puisque je n’en ai pas la conscience aujourd’hui? Cela m’avance à quoi d’espérer que je serai un jour grenouille ou président des Etats-Unis? Mais je respecte les croyances des autres, si cela les aide à résister à la détresse ambiante! Je leur demande seulement de respecter les miennes. Si je dois un jour ressusciter, que ce soit pour retrouver de chers disparus. Mes amours, mes amis, mes emmerdes.
Christian Campiche