Tribune libre – La Pila, polar fribourgeois de l’été


Nul besoin de chercher les origines de ce nom de lieu, à Fribourg c’est un synonyme de fumée et d’embrouilles. On peut le rapprocher de Poya et H189, un autre foireux récent déjà oublié.

Châtillon, Grangeneuve, Hauterive, des appellations contrôlées, sympathiques qui cachent les défaillances des politiques qui ont piloté le canton des Dzozets. Dans les années cinquante, avec le changement des habitudes de consommation sont apparues les boîtes de conserve, les bouteilles, les frigos et les cuisinières à gaz ou électriques. Le recyclage était inconnu. Les déchets, devait disparaître. Les communes ne s’embarrassaient pas. Un ravin, une dépression naturelle à combler et tout était réglé. Chaque village avait son ruclon. Estavayer-le-Lac a même gagné du terrain sur les rives du lac. La Ville de Fribourg a comblé Pérolles pour en faire un boulevard. Ce nouveau quartier, à huit cent mètres de la gare CFF, a été la première zone industrielle du canton. Des entreprises connues ont établi leur quartier et leur atelier à la limite de la ville du haut : Chocolat Villars, Sarina, Winckler, Cafag, Papro, L’Industrielle, l’Imprimerie St-Paul, la Fabrique de lampes, une Verrerie, Lonza et même la fabrique de papier-photo Telco rachetée par Ilford. A deux pas, on trouvait Cardinal et Dyna Le Parfait. Sur le Boulevard quatre garages avec station essence. La Fédération des Syndicats agricoles, une Fonderie et le dépôt des trams. Vous ajoutez deux cliniques. Un vrai eldorado.

N’oublions pas Boxal, Métar, Condensateur Fribourg SA et la régie des Entreprises Electriques Fribourgeoises. 3000 postes de travail dans ce périmètre.

Ce nouveau quartier c’est: Fribourg en avant! La machine tournait. La Ville encaissait impôts et taxes. Les entrepreneurs Radicaux nourrissaient les pauvres fribourgeois sortis de la chape du PDC. Les syndicats engrangeaient des membres. Les Socialistes montants goûtaient au gâteau du développement. Après avoir comblé les ravins en ville, il fallait trouver une nouvelle décharge pratique, proche et presque gratuite. La Pila de 1952 à 1975 a accueilli tous les déchets industriels et ménagers de Fribourg. L’économie tournait. Plus il y avait de tas d’ordures, plus les politiques étaient heureux. La Chambre du Commerce et de l’Industrie y trouvait une source de fierté. Les élus, les entrepreneurs, les notables, tous pouvaient profiter de cette nature gratuite.

On sait que la Ville de Fribourg était responsable de cette décharge. Que le canton n’a rien fait mais les pollueurs responsables sont bien connus. Leurs noms sont dans la liste d’entreprises ci-dessus. C’est ainsi que l’Etat de Fribourg déclare : «Pour répondre à l’urgence de la situation, une organisation de projet a été mise sur pied en octobre 2007 pour mener les investigations, surveiller et assainir le site.» Ainsi 12 ans, c’est un rythme d’urgence pour l’administration fribourgeoise. Rien n’a été fait pour rechercher et punir les responsables. Au contraire, avec le temps qui passe les sociétés ont été vendues, fusionnées, déplacées ou ont changé leur structure comme la régie EEF devenue Groupe e société anonyme. Condensateur, Condis, Montena, à Rossens puis CFR Properties AG qui paie ses impôts à Zürich.

Maintenant c’est place aux experts et à une autre opération juteuse. Une tentative illusoire de réparation et d’assainissement. De la poudre aux yeux. Polluer encore plus en dépolluant mais en faisant payer un demi-milliard aux citoyens fribourgeois et suisses. Stop au jeu des technocrates incompétents intéressés par l’argent. L’Etat de Fribourg constate : «Cette ancienne décharge a contaminé les poissons de la Sarine en rejetant des PCB de type dioxine.» La catastrophe est connue. En 65 ans, la pollution a gagné la Mer du Nord. Il n’y a pas eu d’alerte pour la santé publique. Les poissons, les oiseaux, les rongeurs, la végétation sont toujours là, dans cette forêt qui vit. Pendant ce temps, l’administration ouvre des bureaux, donne des mandats et nos Conseillers d’Etat se baladent en avion.

Avant de se lancer encore plus loin dans ces dépenses inutiles, sauf pour la caisse des experts de la nature, il faut savoir qui va payer selon la règle du pollueur-payeur. Aucune volonté de l’Etat de Fribourg de poursuivre les sociétés qui ont profité de ce site bucolique.

Narcisse Niclass, Nierlet-les-Bois

Photo NN

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