Lettre de Lima – Elections au Pérou, la surprise vient de religieux fondamentalistes


C’était écrit! Aucun parti politique n’obtient plus de 10% de suffrages, à l’exception de « l’Accion Popular » (PP) – 10,1% -, une vieille formation de droite, que la pudeur politique place au centre-droit de l’échiquier du système. 

L’énorme surprise vient d’un parti à la connotation religieuse fondamentaliste marquée, que personne n’attendait, le Frepap. Autrement dit, le Front populaire agricole du Pérou, qui a surfé allègrement sur la désillusion et le rejet des électeurs des classes politiques traditionnelles non inféodées à un mouvement.

Le discours du Frepap se nourrit d’un mysticisme obscurantiste, saupoudré d’une vague diatribe politique. Il n’empêche, avec ses 8,9% d’appui des électeurs, il est devenu dimanche soir la seconde formation politique du pays.

En 1989, Ezequiel Ataucusi Gamonal, auto-proclamé prophète, fonde l’Asociación Evangélica de la Misión de Israel del Nuevo Pacto Universal. Dit en français, l’Association évangélique de la mission d’Israël du nouveau pacte universel. 

Son prosélytisme, il l’initiera d’abord en Amazonie, dans la région centrale du Pérou. Aujourd’hui, ses centres de «capacitacion biblica » touchent pratiquement l’ensemble des provinces, avec des milliers de fidèles.

Le Frepap avait frappé à la porte du Congrès il y a une vingtaine d’années, avec deux législateurs en 1992 et un en 1995. Le diable se cache dans les détails, dit-on. Qu’importe, le Frepap passe aux yeux des médias – et de nombre de ses électeurs sans doute – pour un parti politique. Et non pour une secte. Laquelle s’ajoute pourtant aux dizaines et dizaines d’autres qui sévissent au Pérou et en Amérique latine. Des sectes, dit en passant, qui exploitent la misère et l’ignorance à leurs convenances politiques, souvent à des fins d’enrichissement de faux prophètes.

Le sociologue José Luis Pérez Guadalupe pose sans doute la question à laquelle le Pérou devra bien un jour répondre: jusqu’à quel point peut-on dissocier la religion de la politique? Pour l’heure, ni le Pérou ni le continent américain dans son ensemble n’ont su le faire…

Reste que les élections de ce week-end divisent comme jamais le pays, fractionné entre dix partis qui obtiennent entre 10 et 5% d’approbation dans les urnes. Au-delà de la tornade Frepap, les Péruviens ont durement sanctionné le fujimorisme, principale force politique du pays, qui disposait jusque-là de 73 sièges sur 120. Ses adeptes devront se contenter désormais d’une douzaine de sénateurs. Soit 12 de mieux que l’Apra, éjecté de la scène politique. Une fois les résultats connus, ce parti a fermé les portes de son siège. 

Comme prévu, les formations de gauche, plus divisées qu’un couple en plein divorce, se trouvent à la traîne. Unies, elles seraient devenues la seconde formation du Pérou en termes de sièges. Voire la première, au gré d’alliances pas déshonorantes.

Pierre Rottet

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