S’il est un domaine dans lequel tout le monde avance en aveugle, c’est bien celui de la vidéo à la demande (streaming). Apple TV est arrivé sur le marché suisse le 1er novembre et Disney fera son entrée en Europe le 24 mars. Première plateforme en place, Netflix va être soumis à une très forte concurrence et nul ne peut prédire l’évolution du marché.
Nous nous trouvons dans une situation de pure économie de marché. C’est là un des aspects les plus fascinants de cette sombre lutte entre opérateurs. Les Suisses, comme les autres Européens, restent des spectateurs devant leur écran comme face aux pages économiques des journaux. Impossible de savoir quels seront les vainqueurs – au cas où il peut y en avoir.
Le précédent des cassettes vidéo
Un combat similaire a vu s’affronter les fabricants de cassettes vidéo. En 1975, Sony invente la Betamax. L’année suivante, une autre firme japonaise, JVC, crée la VHS et, en 1979, Philips propose la V2000. Philips et Sony ont la taille de géants que JVC reste loin d’atteindre et leurs produits sont, de l’avis des experts d’alors, de bien meilleure qualité que celui de JVC. C’est pourtant la VHS qui l’a emporté, faisant disparaître les produits concurrents: la VHS était moins coûteuse, et JVC une entreprise plus petite et plus réactive.
Les dinosaures ne courent vite que dans les films de Spielberg! La sombre bagarre autour du streaming ne laissera peut-être elle aussi qu’un seul vainqueur. On pourrait parier sur Disney, le plus gros, le plus riche, mais pas forcément le plus affamé.
La supériorité américaine, ou disons plutôt californienne, dans le domaine du numérique et de l’électronique de divertissement tient avant tout à cet énorme marché intérieur de 320 millions d’habitants dans lequel tout le monde parle la même langue et où tout peut être essayé. L’Europe et ses petites nations aux langues multiples si diverses semble larguée, dépassée. Mais pour filer la même métaphore, les mammifères étaient aussi tout petits avant qu’une météorite liquide les grosses bêtes voici 65 millions d’années.
Les innovations et les succès futurs pourraient aussi venir de nos vieux pays. Mais encore faut-il que l’Europe impose un imaginaire qui donne envie au reste du monde de regarder nos productions audiovisuelles. On en est encore loin.
L’alternative des coffrets de DVD
A l’heure actuelle, il est permis de se rabattre sur les coffrets de DVD qui proposent des trésors à bas prix.
Vous y découvrirez des pépites que vous ne trouverez pas forcément sur les plateformes de streaming. Pour exemple: l’édition par Warner Home Video d’un coffret de dix des plus grands western de l’histoire du cinéma comme La prisonnière du désert, La horde sauvage ou Pale rider. Et dans la même collection: dix comédies musicales dont Chantons sous la pluie et Un Américain à Paris. Vous pouvez obtenir ces vingt films pour le prix de deux mois d’abonnement à une plateforme de streaming.
Ce ne sont que des exemples. Mais posséder quelques objets matériels reste tout de même une bonne réponse aux incertitudes des réseaux et de la dématérialisation. Bien sûr, on se retrouve encore à Hollywood. Mais si l’Europe s’est suicidée au 20e siècle, la Californie n’y est pour rien.
Jacques Guyaz
