Chronique d’Alès – Publie d’abord, vérifie ensuite!


« Publish first, check later ». Comme on pouvait le craindre, le Covid-19 n’est pas seulement une pandémie qui tue dans le monde entier et qui provoque une terrible crise économique. Le virus est aussi le déclencheur d’un tsunami de fake news.

Ceux qui savent – les médecins et les scientifiques – parlent peu, mais ceux qui ne savent rien répandent leurs dangereux bobards sur les réseaux sociaux. Ça ne fait pas rire l’OMS, les gouvernements et les autorités de santé, qui essaient d’informer sans faire peur et qui prennent des mesures pour maîtriser le fléau. Tous les démentis, les mises en garde et les avertissements ne peuvent rien face à ceux qui l’ont lu sur Facebook, ceux qui ont recueilli les confidences de leur cousin sur WhatsApp ou ceux qui savent, grâce à Twitter, les secrets qu’on cache aux peuples.

Tout y passe : c’est l’armée américaine qui a infecté la Chine ; les enfants sont immunisés ; le virus meurt à 27 degrés ; un verre d’eau envoie le virus dans l’estomac où les sucs gastriques le détruisent ; le virus survit 12 h. sur le métal ; enfin, si vous retenez votre souffle pendant 10 secondes sans tousser, vous n’êtes pas infecté ! Les sinistres idiots qui propagent ces bobards utilisent toujours la même rhétorique. Eux, ils ont leurs sources : « Message d’un médecin que je connais », « Information d’un chercheur qui lutte contre l’épidémie ». Et hop, le bobard se répand sur les réseaux sociaux comme un incendie.

Bien sûr, c’est la peur et l’incertitude qui alimentent la fabrique à fake news. Depuis des années, beaucoup de gens sont persuadés que le gouvernement leur ment, qu’il cache la vérité et qu’il défend les intérêts des multinationales. Le laboratoire Sanofi fait des recherches pour trouver un vaccin. Sur le site Mediapart, les lecteurs se déchaînent : « Sanofi, des salopards de première », « Tous les labos sont des escrocs… Bayer, crapule qui a mis au point le gaz létal d’Auschwitz ».

Ce déferlement de fausses nouvelles et de commentaires enflammés est inquiétant. Il encourage l’illusion que l’épidémie n’est pas si dangereuse que ça, que des remèdes simples permettent de guérir et que les mesures de confinement prises sont inutiles. Bien sûr, affirment ceux qui ne savent rien, mais qui disent tout : le pouvoir utilise le virus pour contrôler le peuple. Regardez la Chine : des cameras partout, la police devant chaque immeuble, des contrôles incessants. Evidement, ils ont réussi à juguler le Covid-19. C’est ça qui nous attend !

Bien sûr, personne n’est joyeux quand le gouvernement vous confine chez vous, quand il vous oblige à remplir un formulaire pour chercher votre pain ou pour aller chez le médecin. Personne n’est enthousiaste quand l’école est fermée, quand votre patron vous met au chômage, quand vous êtes obligé de fermer votre commerce.

La presse, la radio, la télévision multiplient les éditions et les émissions spéciales pour donner la parole aux gouvernants et aux médecins. Le maire de ma ville, Alès, informe par téléphone chacun de ses administrés. Mais, quand l’avenir est incertain, quand on craint que sa boîte fasse faillite, quand il faut s’occuper toute la journée des gosses, quand on comprend que les vacances de Pâques sont foutues, bien des gens pensent qu’il est plus rassurant de faire confiance aux charlatans de Facebook, de Twitter et de WhatsApp.

Le président Macron a affirmé que la France était en guerre contre le virus. En dramatisant pour faire accepter les mesures de confinement, il savait bien qu’il relançait la machine à fausses nouvelles et qu’il donnait raison à Rudyard Kipling qui écrivait : « la première victime de la guerre, c’est la vérité ».

Marc Schindler

Dessin: Stephff

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