Un espion dans mon smartphone


Vous en avez marre des injonctions officielles ? Vos ne supportez plus d’être confiné à la maison ? L’attestation de déplacement dérogatoire vous donne des boutons ? Vous avez choisi d’ignorer le virus et d’aller à la plage faire votre footing ? Vous serez peut-être piégé par votre smartphone, votre espion préféré.

En Suisse, l’Office fédéral de la santé envisage «d’observer les regroupements de personnes qui ne respecteraient pas les directives en matière de distance sociale ». Le patron de cet office prévient : « Nous avons analysé si, avec les données de téléphone portable, nous pouvons savoir si les gens se croisent de trop près ». Comment, vous ne savez pas que votre smartphone est un espion qui vous suit pas à pas, qui sait tout ce que vous faites, où vous allez et avec qui ? Vous ne regardez jamais les séries policières où les fins limiers savent quand le smartphone de la victime « borne » avec celui de l’assassin ? Même les ados accro à Facebook, à Instagram ou à WhatsApp le savent quand ils font un Live avec leurs potes. Nos vies sont dans nos téléphones portables.

Et avec la géolocalisation, il y a de bonnes raisons de traquer votre smartphone : on vous l’a volé, vous l’avez perdu, vous devez surveiller vos gosses, vous voulez suivre vos collaborateurs en déplacement. C’est légal. Il y a aussi de moins bonnes raisons : votre conjoint agit bizarrement, vous avez des soupçons sur sa fidélité, vous voulez piéger un concurrent. Très facile : selon la marque de votre précieux portable, la géolocalisation est activée par défaut. Vous vous connectez à votre compte ou vous faites sonner le bijou et hop, vous voyez une carte qui vous donne son emplacement. Tout cela grâce au GPS, ce réseau mondial de satellites qui tournent au-dessus de nos têtes et qui transmettent automatiquement votre position. Pour traquer un autre portable, il existe même des applications qui s’installent en quelques minutes, comme le bien-nommé mSpy qui vous permet « d’enregistrer également appels, messages, contenus de réseaux sociaux et toute autre activité de votre cible ». Désormais, votre nom est « Bond, James Bond ».

Il y a longtemps que les pros de la sûreté savent « aspirer » toutes les données de votre smartphone en quelques minutes et déverrouiller n’importe quel portable, grâce à un petit boîtier israélien, qui est à la portée de tout policier. Bien sûr, il y a une directive européenne de 2016 qui vous protège de l’utilisation de vos données sensibles (biométriques, politiques, religieuses ou orientation sexuelle). Seulement en cas de « nécessité absolue ».

Tous les opérateurs de téléphonie mobile utilisent une technologie qui permet aux publicitaires de collecter des informations qui seront utilisées pour vous inonder de pub en plantant dans votre smartphone un cookie, un logiciel espion. Tous ces généreux opérateurs jurent qu’ils ne collectent pas « les noms, les adresses, les numéros de téléphone ou les mails qui permettent d’identifier personnellement l’utilisateur ».

Avec la pandémie du Covid-19, les gouvernements trouvent d’excellentes raisons pour utiliser vos précieuses données stockées chez les opérateurs pour vous repérer quand vous faites un barbecue avec vos potes ou un petit footing collectif sur la plage, alors que c’est interdit. Des chercheurs de l’université d’Oxford travaillent sur une application installée sur votre smartphone, qui vous géolocalise en permanence. Magnifique : on pourrait juguler l’épidémie sans paralyser le pays. La Chine a massivement utilisé cette technologie et Israël repère ceux qui sont en contact avec un malade. Selon le Washington Post, l’administration américaine discuterait avec les géants du numérique pour avoir accès à leurs données et mieux lutter contre le virus. Evidement, le PDG de Facebook dément. Vous savez, c’est lui qui affirmait : « Il y a longtemps, la vie privée était gardée. Aujourd’hui, les gens veulent partager, les gens sont plus ouverts ». J’espère que ça vous rassure. Moi pas !

Marc Schindler

Dessin: Stephff

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