Le confinement, laboratoire des nouvelles technologies de l’information et de la communication


PAR JACQUES GUYAZ

Les crises sont souvent des accélérateurs d’innovations techniques. Sans remonter à Alan Turing et au décryptage des codes nazis, le premier développement industriel de l’informatique doit tout à l’effort des Etats-Unis pour rattraper le retard accumulé sur l’Union soviétique dans le domaine spatial au début des années 60, en pleine guerre froide. Loin de réduire la dématérialisation de la finance, la crise des subprimes a accentué, dès 2008, de rapides évolutions dans la technologie des algorithmes.

Quels seront les effets du confinement pour cause de Covid-19? On ne peut bien sûr les prévoir, mais dans les domaines de la consommation des médias et des usages du numérique, des pratiques contrastées sont à l’œuvre.

Comme dans tous les grands événements mobilisateurs, la télévision a retrouvé un rôle central. Le conseiller fédéral Alain Berset et Daniel Koch, responsable de la division des maladies transmissibles à l’Office fédéral de la santé publique, communiquent via le petit écran. Leurs consignes et les règles à suivre sont transmises par les journaux télévisés et, en continu, par le fil de l’actualité du site de la première chaîne. La radio est aussi très présente, abordant les sujets avec une diversité d’interlocuteurs. D’une manière générale, cette crise marque une intensification des interviews de spécialistes qui s’invitent chez les gens à qui l’on enjoint de «rester à la maison». A la presse écrite d’approfondir, dans un deuxième temps, ce que la presse romande fait moins bien que la presse alémanique – question de moyens.

Dans un autre registre, le journaliste culturel du Monde Michel Guerrin, avec sa chronique du 4 avril dernier, oppose la «culture de salon», illustrée par les films et les séries que l’on peut regarder en vidéo à la demande sur Netflix, Disney+ ou AppleTV, à la «culture de sortie», à savoir le théâtre, les musées ou le cinéma. Ces sorties n’ont plus cours depuis que le confinement dû au coronavirus les a brutalement interrompues. Bien entendu cette culture reprendra ses droits dès la fin de la pandémie, mais sa clientèle aura-t-elle changé? Une part de l’offre culturelle était de plus en plus l’apanage des aînés, le deviendra-t-elle davantage?

Quant au télétravail et à l’enseignement à domicile, prendront-ils fin avec l’extinction de la pandémie? Ou des habitudes, des idées et des pratiques auront-elles eu le temps de s’installer? Beaucoup d’entreprises se rendront compte que leur administration et leurs services ne fonctionnent pas si mal avec des collaborateurs travaillant depuis chez eux – et plutôt à moindre coût. Pour sa part, l’enseignement à distance était déjà bien développé au niveau universitaire avec les Moocs (Massive online open courses, cours en ligne ouverts à toutes et tous). Certes, cette modalité d’enseignement s’adresse davantage à des personnes qui se forment en même temps qu’elles travaillent. Et, du point de vue des étudiants comme des professeurs, ou des parents concernant les plus jeunes, il semble que le présentiel (mot qui, lui, s’impose ces derniers temps) est pédagogiquement indépassable. Mais, les supports numériques amplement expérimentés ces dernières semaines, garderont-ils une place centrale dans l’enseignement?

Si la consommation culturelle et de loisirs à domicile s’installe, si le développement de la numérisation du travail et de l’enseignement autant que la mutation de la télévision sur des supports multiples devaient perdurer, la conclusion est inéluctable: une bande passante de plus en plus importante deviendra indispensable. A la 5G, cinquième génération de transmission sans fil des données, de la fournir, au grand dam, sans doute, de ses opposants.

Evidemment, il ne s’agit là que de l’un des développements possibles au cours des prochaines années. Qui vivra verra!

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