Myanmar, un message court qui en dit long


PAR GERARD BLANC

Je viens de recevoir un communiqué de l’office de promotion du tourisme du Myanmar appelant à la solidarité internationale. Après l’avoir relu plusieurs fois, je suis convaincu que si le message avait été transmis par la junte militaire, il en aurait été rédigé autrement. Voici ce communiqué en substance : 

Après le coup d’Etat du premier février nous avons reçu beaucoup de messages de la part des instances touristiques du monde entier. Si la situation demeure encore incertaine, il n’y a, pour l’instant, pas eu de violence manifeste ni d’arrestations massives. La population, sur l’ensemble du territoire, a manifesté pacifiquement et s’est engagée dans un mouvement non-violent de désobéissance civile. La crise de la Covid-19 a déjà causé de graves dommages à l’industrie touristique du pays et à toutes les personnes vivant de cette activité. Il est vital pour une grande partie de notre population de pouvoir survivre et de ne pas perdre contact avec l’extérieur, tant maintenant que dans le futur. L’image qui s’est reflétée le 1er février 2021 est catastrophique et nous sommes conscients que notre activité touristique en dépend et en dépendra. Nous déploierons sans relâche notre énergie à présenter à nos visiteurs les valeurs et les charmes de notre pays et tous nos efforts pour que le Myanmar soit une destination attractive, sûre et pacifique.

Certes, il y a eu en tout cas des dizaines d’arrestations dont Aung San Suu Kyi, ou le cinéaste Min Htin Ko Ko Gyi, qui a déjà fait de la prison pour avoir critiqué ouvertement l’armée. Mais, pour l’instant, il ne s’agit pas d’arrestations massives comme cela avait été le cas en 1988. Ce n’est donc pas, pour l’instant, ce qu’on pourrait appeler des arrestations massives et une réaction violente de l’armée. Mais connaissant la manière forte déjà employée, on peut avoir quelque inquiétude sur le déroulement futur des événements. 

En contrepartie, le tourisme reste, pour ce pays, un moyen important d’existence et la privation de visiteurs venant de l’étranger risque d’être une double peine pour les habitants de ce pays qui, sans compter la pandémie, se trouvent dans une sale situation. Appeler à un quelconque boycott serait, à mon avis, une erreur.

Je me souviens d’avoir débattu devant un congrès d’Impressum, en compagnie de Manon Schick, alors directrice d’Amnesty international pour la Suisse, sur la pertinence d’effectuer des reportages ayant pour but de relater les valeurs touristiques et culturelles dans des pays dirigés par des pouvoirs totalitaires. La conclusion de Manon Schick avait été que les populations de ces pays étaient déjà suffisamment punies par leurs dirigeants et qu’ils ne méritaient pas un isolement complet. Nous avions alors parlé du Myanmar et Amnesty International, à cette époque, recommandait, par exemple, d’éviter de cautionner les chaînes hôtelières entre les mains financières de l’armée en favorisant les petites structures et les logements chez l’habitant. Le message général aux journalistes avait alors été le suivant : « Allez dans le pays, visitez-le et au retour, dans l’article que vous publierez, votre message pourra être, par exemple : Allez découvrir le Myanmar mais ne soyez pas dupes en ce qui concerne sa politique en matière de droits humains».

Ce que je comprends donc en lisant entre les lignes de ce communiqué est que le message n’est pas à la gloire du putsch militaire du 1er février 2021. Il serait plutôt favorable à la position pacifique du peuple birman qui lui résiste. 

Formulons nos vœux pour que la démocratie revienne à la place qu’elle mérite au Myanmar, et souhaitons que la pandémie de covid-19 soit bientôt derrière nous. Côté sécurité, il est comme toujours, recommandé de suivre les recommandations du DFAE et du Quai d’Orsay selon la situation qui évolue chaque jour.

Je pars

Dessin: Stephff

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