Peuples et gouvernants, le fossé se creuse


PAR CHRISTIAN CAMPICHE

Il est des lieux dans le monde où l’appréhension des faits requiert du tact, tant le poids d’un lourd passé, relativement proche, se tient tapi dans l’ombre, n’attendant que la première occasion pour revenir. L’Autriche, pour ne parler que d’elle, se rappelle au plus mauvais des souvenirs pour être le premier Etat européen, en dehors du Vatican, à décréter la vaccination obligatoire. Non sans confiner d’abord l’ensemble de la population. A se demander pourquoi le Premier ministre autrichien, revenant sur sa décision de ne sévir que contre les non-vaccinés, n’a pas décrété l’entrée en vigueur immédiate. Le délai de deux jours n’a-t-il pas permis à la contestation de se répandre comme une traînée de poudre? Que se passera-t-il dans trois mois, quand il s’agira de rendre exécutoire l’obligation de vaccination décrétée par Vienne?

Une chose est sûre, après bientôt deux ans de mesures liberticides imposées au nom de la santé publique, des portions non négligeables de populations se rebellent. Aux Pays-Bas, démocratie modèle, s’il en est, de violents heurts ont opposé des manifestants aux forces de l’ordre. La police a tiré, le sang a coulé. En Guadeloupe, des émeutes paralysent l’île depuis plusieurs jours, contraignant Paris à dépêcher des unités d’élite de l’armée pour rétablir le calme.

En Suisse on n’en est pas là, mais l’approche d’une consultation populaire sur le thème ne saurait exempter les collectivités de faire preuve de responsabilité en calmant le jeu. Or force est de constater que l’on pourrait faire mieux. Tout en poussant à la vaccination, une ministre vaudoise croit pertinent d’ajouter, devant les caméras de la télévision, que l’exercice des droits populaires permet à la Suisse d’échapper à la violence de rue. Touche du bois! Elle est rejointe par deux de ses collègues qui, comme le président à vie chinois, répètent à l’envi à leurs assujettis qu’ils doivent voter « oui » le 28 novembre. Faute de quoi, ils perdront l’accès à leurs privilèges. Et de jeter les foudres de l’opprobre sur la population non vaccinée, responsable des malheurs de la terre.

“La science a toujours raison”. Cette factice certitude relayée sans connaissances médicales ni chimiques, on la retrouve dans de nombreux commentaires discréditant les personnes qui osent seulement s’interroger sur le bien-fondé d’un vaccin développé en quelques semaines. Syndic d’Yverdon, Pierre Dessemontet est sur le papier géographe et « spécialiste de l’analyse spatiale ». Il faut croire que l’étude du cosmos mène à tout, notamment à l’expertise épidémiologique car dans le journal dominical, le député socialiste se fend d’un avis de professionnel sur le vaccin, un outil « efficace » contre le Covid. Tellement utile que « ceux qui le refusent nient l’évidence scientifique et colportent n’importe quel bobard ».

N’en déplaise à cet élu, il est des faits qui ne relèvent pas du « bobard ». Le flop de la semaine vaccinale, par exemple. Toujours plus verte d’esprit, la professeur de droit de la famille et ancienne conseillère nationale vaudoise Suzette Sandoz relève sur son blog les incohérences liées à l’information relative à l’argent fédéral investi dans la campagne en faveur du passe Covid, des dizaines de millions. Des chiffres publiés après coup dans les médias lui donnent raison, tant ils sont choquants. Près de 700’000 francs de fonds publics ont été affectés à l’organisation des concerts gratuits ratés – une moyenne de 80 à 100 personnes par événement, alors que l’on en espérait quatre à cinq fois plus. On a beau rejeter sans preuve aucune la faute sur les antivax, pour le contribuable, cela fait cher la place. Si on enlève le salaire des techniciens, à combien s’est élevé le cachet des musiciens? Car, on est bien d’accord, on ne parle pas d’Elton John ni des Rolling Stones! A ce tarif, on comprend avec le recul que le rappeur de service se soit fendu d’un plaidoyer sans demi-mesure en faveur du passe Covid. Rassurant, finalement: la jeunesse n’est pas idiote.

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Un commentaire à “Peuples et gouvernants, le fossé se creuse”

  1. Pierre-Henri Heizmann 23 novembre 2021 at 23:30 #

    Merci à vous Christian Campiche, d’illuminer avec vos analyses pertinentes, la morne plaine informationnelle qui entoure notre paysage médiatique.

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