N’en déplaise à Mme Rousseau, la viande n’est pas la cause principale des incendies de forêt


PAR YANN LE HOUELLEUR, à Paris

Accro aux « tweets » dont elle bombarde ses concitoyens, Sandrine Rousseau, une députée aimant déclencher des polémiques, a fait jaser une fois de plus au cours de cet été.

Mme Rousseau, qui occupait auparavant d’importantes fonctions au sein de l’université, a été élue au printemps 2022, devenue l’une des figures de proue de la Nupes (la Nouvelle union populaire et sociale, fondée par Jean-Luc Mélenchon, un ancien socialiste qui prône la désobéissance civile, voire la rébellion).

Dernière « trouvaille » de Sandrine Rousseau : ostraciser les amateurs de viande, qu’elle a rendu responsables des feux de forêt, lesquels dévorent, chaque été, des dizaines de milliers d’hectares dans les pays autour du bassin méditerranéen. Que de raccourcis et d’amalgame de la part de la députée ! 
Il est vrai qu’en Amazonie, les « fazendeiros » (grands propriétaires terriens) sont coupables du rétrécissement de la plus vaste forêt tropicale. Qu’ils s’adonnent à la culture intensive  – souvent, en réalité, de la monoculture – ou à l’élevage, ces éleveurs sans vergogne parviennent à contourner les lois sur l’environnement, avec le soutien d’élus locaux et nationaux.

EMERVEILLEMENT INFANTILE – Mais quand on se limite à observer ce qui se passe en Europe et dans certaines régions touristiques, on ne peut tirer les mêmes conclusions.

Plutôt que la monoculture et l’élevage à grande échelle, rien n’interdit de pointer du doigt le tourisme de masse, cette aberration de la société des loisirs pétrie d’une sorte d’émerveillement infantile permanent. Avez-vous vu les reportages diffusés par tant de journaux télévisés montrant de gigantesques incendies en train de réduire en cendres les forêts et les champs d’oliviers tapissant l’île de Rhodes ?

Au mois de juillet (2023), des milliers de touristes ont dû fuir, en toute hâte, les plages attenantes et leurs hôtels pour rallier l’aéroport d’Athènes. Ces dernières années ont été construits des hôtels, pour certains monumentaux, qui défigurent le paysage, destinés à une clientèle toujours plus étoffée. Ce qu’on pourrait appeler «L’industrie du tourisme» alimente les atteintes à l’environnement et à la beauté des paysages, que ce soit dans des régions côtières ou montagneuses, tout comme elle dénature le patrimoine architectural dans les villes, à l’instar de Venise.

FRAPPES PUBLICITAIRES – Tous ces avions, tous ces paquebots gigantesques, toutes ces infrastructures en faveur des touristes  contribuent largement au réchauffement climatique. De surcroît, une telle industrie, parce qu’elle crée beaucoup d’emplois et qu’elle dégage un maximum de cash, ne tolère guère les accusations émanant d’esprits critiques. Une vraie omerta… Revenons à la Méditerranée : quel plaisir éprouvent-ils, vacanciers et touristes, à se retrouver serrés comme des sardines dans des stations balnéaires qui, soudain, voient leur population multipliée par cinq, six, sept… ? Beaucoup parmi eux ont sans doute succombé aux « frappes publicitaires » qui sur de nombreuses chaînes de télévision vantent des destinations paradisiaques… Pour reprendre l’exemple de la Grèce, le paradis convoité s’est mué en un enfer. Mieux valait choisir des points de chute moins fréquentés ou rester chez soi.

PERSPECTIVES EFFRAYANTES – On le voit : «l’industrie du tourisme» s’avère être une menace à l’encontre de l’environnement parmi les plus redoutables. Des études prévoient le doublement voire le triplement du trafic aérien d’ici quelques années. Perspective effrayante. En outre, le tourisme de masse est l’apanage des classes les plus aisées alors que les terriens dépourvus de revenus ne peuvent aller voir si l’herbe est plus verte et la mer plus bleue ailleurs. Ils restent chez eux.

Cela, Sandrine Rousseau se garde bien de le dire, elle qui doit sa victoire aux élections législatives aux bobos parisiens. («Bobo» est un mot issu de la novlangue qui désigne les Parisiens de la classe moyenne qui se veulent écolo alors qu’ils se montrent consuméristes.) Parmi ses électeurs, donc : des familles qui ont les moyens de manger de la bonne viande tandis que dans les cités, dans les banlieues, les citoyens se contentent d’une alimentation de qualité nutritionnelle souvent médiocre. En France (comme ailleurs), le surpoids ne cesse de gagner du terrain : 47 % de la population adulte.

Sur un chalet d’alpage dans le Pays-d’Enhaut. Photo le Médusé.



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