Chronique Catalane – Une foule impressionnante dans les rues de Barcelone pour scander l’indépendance

PAR FRANÇOIS GILABERT

D’aucuns croyaient le mouvement indépendantiste moribond, affaibli par la répression continue de l’Etat espagnol, le manque d’unité des partis indépendantistes, deux années de pandémie. Il n’en est rien. Lundi 11 septembre, les Catalans fervents partisans d’un Etat indépendant sont à nouveau, par dizaines de milliers, descendus dans la rue pour réclamer la souveraineté de leur pays.

Une foule impressionnante a inondé les rues de Barcelone pour se rendre vers les quatre lieux de ralliement. Portant t-shirts et banderoles, drapeaux indépendantistes, pancartes, les manifestants ont surgi des bouches du métro, provenant des quatre coins de Catalogne, transportés par plus de deux-cents autocars. Et toujours dans une ambiance profondément pacifiste, agrémentée par des chants, les tambours, démonstrations de châteaux humains, sans heurts ni violence. Des personnes de toute origine sociale, de toutes les générations, enfants, parents, retraités.

La mobilisation organisée par l’ANC (Assemblée Nationale catalane, entité civile souverainiste) à Barcelone avait pour thème « Via fora », expression tirée du Moyen-Âge et qui servait de cri de ralliement accompagné de sons de cloches pour appeler les hommes à défendre un village en danger d’agression. Les manifestants marchaient derrière les banderoles sur lesquelles étaient inscrits les thèmes suivants : « souveraineté économique, liberté, langue, pour le pays ». Les quatre colonnes de manifestants ont convergé ensuite vers la place d’Espagne, qu’ils souhaiteraient rebaptiser « Place du 1^er octobre », en hommage au référendum d’indépendance du 1^er octobre 2017.

Rythmée par les cris «indépendance, Puigdemont Président, unité», la marche était l’occasion d’échanger sur la situation politique, la fragilité de la langue catalane, les divergences entre partis souverainistes dont les manifestants ont critiqué le manque de courage, la répression insistante de l’Etat espagnol, la judiciarisation de la politique. Etaient également commentées les négociations actuelles entre le parti « junts » et Pedro Sanchez, non sans que se manifeste un certain scepticisme sur les avantages à tirer d’un éventuel soutien à son investiture, préalable espéré d’une amnistie pouvant déboucher sur un nouveau référendum d’auto-détermination et le non-renoncement à une déclaration d’indépendance unilatérale.

La démonstration de force était bel et bien réelle. Elle s’accompagnait d’un esprit de résistance et d’espoir retrouvé.

Illustration: La foule investit le Fossar de les Moreres, près de l’église gothique de Santa Mara del Mar. Ici sont enterrés par milliers les résistants massacrés par l’armée espagnole le 11 septembre 1714, date qui coïncide avec la perte de l’indépendance catalane. Photo C.