Pour la Cour d’appel de Paris, Tariq Ramadan n’a jamais fait l’objet du moindre complot


Depuis le 20 octobre 2017, date de la première plainte pour viol contre Tariq Ramadan en France, le prédicateur n’a jamais cessé de dénoncer un complot fomenté contre lui. Dans son réquisitoire, daté du 7 mars 2024, le Parquet de la Cour d’appel de Paris évacue en moins d’une page cette accusation. Tariq Ramadan n’a jamais fait l’objet du moindre complot.  

PAR IAN HAMEL

Depuis bientôt sept ans, jour après jour, l’ancien enseignant dans un collège de Genève répète sur les réseaux sociaux que des femmes, richement payées, l’ont accusé, sans preuve, de viols. Des « menteuses » soutenues par « ses pires ennemis ». Tariq Ramadan cite notamment l’auteur de cet article, auteur en 2007 de « La vérité sur Tariq Ramadan », livre paru aux Éditions Favre en Suisse, et de « Tariq Ramadan. Histoire d’une imposture », publié en 2020 chez Flammarion en France (1). A la télévision tricolore, Tariq Ramadan a même utilisé le mot de « traquenard ».   

Dans son réquisitoire, en page 4 (illustration ci-dessous, avec la page 1), le parquet de la Cour d’appel de Paris constate en quelques lignes que Tariq Ramadan « n’a de cesse de dénoncer l’existence d’un complot entre des accusatrices qui pour certaines ont eu des contacts entre elles (ce qui n’est pas contesté) ou ont voulu fomenter un piège pour prendre Monsieur Ramadan en situation flagrante d’adultère ». Seulement voilà, « l’enquête n’a nullement permis d’établir que ces éléments avaient pu discréditer la parole des plaignantes ».   

« Mes ennemis bien connus »

De la même façon, Tariq Ramadan fait état « de l’existence d’un complot ourdi par ceux qu’il appelle “ses pires ennemis“, à savoir notamment Caroline Fourest, Khalil Zeguendi, Ian Hamel, Jean-Claude Elfassi, Alain Soral ». Non seulement, « aucune de ces personnes n’est partie à la présente procédure », mais le réquisitoire constate qu’« aucun élément ne vient corroborer le thèse du complot en permanence rappelée par Monsieur Ramadan ». Un exemple parmi d’autres : comment Jean-Claude Elfassi, qui est juif, aurait-il pu comploter avec Alain Soral, connu pour ses propos antisémites ? Quant à l’auteur de l’article, il n’avait jamais rencontré ni les accusatrices de Tariq Ramadan, ni les autres personnes qualifiées de « ses pires ennemis » par le prédicateur.  

Pourtant, Tariq Ramadan consacre la presque totalité de son livre, « Devoir de vérité », paru le 11 septembre (sic) 2019, à dénoncer ce complot imaginaire (2). En page 51, il écrit : « A la question de savoir pourquoi ces femmes mentaient, je répondais qu’il s’agissait clairement d’une conjonction d’intérêts convergents réunissant mes ennemis bien connus ». En page 109, « Ceux qui les encourageaient à “témoigner“ – Ian Hamel, Jean-Claude Elfassi, Caroline Fourest, Alain Soral, Maamar Metmati, Lucia Canovi, jusqu’au site Oumma.com ou autres – avaient ce même dessein, mais leur agenda était plus idéologique et politique ». Oumma.com, est le principal site musulman francophone. Tariq Ramadan lui reproche de n’avoir pas pris sa défense.     

Procès pour un seul viol

En page 149, il assure que « les éléments du dossier prouvent clairement qu’il n’y a jamais eu de viols et que les plaignantes ont menti ». Page 168, enfin, il écrit : « j’ai dit et je répète qu’un grand nombre de “mes ennemis de toujours“ apparaissent dans cette affaire et qu’une collusion évidente existe entre ces femmes et d’autres protagonistes connus pour leur hostilité à mon égard. Tout cela s’apparente à un traquenard ».   

Le réquisitoire est loin d’être totalement négatif pour le prédicateur puisque le parquet ne réclame un procès pour viol que pour une seule des quatre accusatrices. Mattieu Bourrette, l’avocat général, demande que ne soit retenu contre Tariq Ramadan qu’un seul viol aggravé, avec violences, commis à Lyon en octobre 2009 sur une femme surnommée « Christelle ». Si le prédicateur est toujours présumé innocent, le quotidien Libération estime qu’en raison des révélations sur des « relations sexuelles très brutales et [des] pratiques en contradiction avec la stricte morale islamique, le théologien a été quasiment mis au banc des milieux musulmans » (3). 

Pour sa part, Le Monde évoque « des rapports dont l’instruction a montré qu’ils se distinguaient par une très grande brutalité, l’islamologue ayant un goût pour des pratiques de domination telles que l’ondinisme » (4). L’ondinisme n’étant rien moins qu’une attirance sexuelle pour… l’urine. Tariq Ramadan est soupçonné de se soulager sur ses partenaires. Enfin, Matthieu Bourrette, rappelle que « la plus grande circonspection doit être observée face à la parole de M. Ramadan ». 

La Cour d’appel de Paris doit encore se prononcer le 27 juin sur l’appel de Tariq Ramadan contre son renvoi devant la cour criminelle.  

(1) 474 pages, paru en janvier 2020. L’ouvrage a été traduit en arabe en 2021. 

(2) 283 pages, Presses du Châtelet.  

(3) Bernadette Sauvaget, « Affaire Ramadan : dans l’attente d’une décision déterminante de la cour d’appel », 29 mars 2024. 

(4) Jérôme Lefilliâtre, «  Audience décisive dans l’affaire Tariq Ramadan », 30 mars 2024.  

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