Tribune libre – 13ème rente AVS, un vote de classe


Malgré les consignes de rejet du Parlement et du Conseil fédéral, malgré les moyens investis par les partis de droite et du centre, ainsi que par les organisations économiques et les syndicats patronaux, le résultat de la votation du 3 mars 2024 a déjoué les pronostics les plus optimistes. Acceptée à 58,2%, l’initiative « Mieux vivre à la retraite » pour une 13ème rente AVS lancée par l’Union syndicale suisse (USS) a, plus que toute autre votation, marqué une frontière, une frontière de classe. Tout le monde l’a constaté, personne ne l’a exprimé en ces termes. 

La presse et les médias unanimes se sont évertués à évoquer une «victoire de la gauche» tout en précisant, sans analyse sérieuse, que 55% de la base électorale de l’UDC s’était associé à cette victoire dite «de gauche».  Et puis, il y a le taux de participation estimé à plus de 57% du corps électoral, là encore, les travailleurs se sont mobilisés. Enfin, il y a la carte des résultats par communes qui ne laisse planer aucun doute sur le contenu de classe de cette votation. Le découpage par communes en fonction du taux d’acceptation correspond très exactement à la répartition des zones d’activités et de résidence de la population laborieuse du pays. Dans certaines régions horlogères ou rattachées à l’industrie des machines, l’initiative l’a emporté à des taux allant de 75 à plus de 90%.

Feignant la surprise, les commentateurs officiels (TV et grands médias), en chœur, ont insisté sur le fait que pour une fois, cette votation échappait au phénomène de division dit du «Röstigraben», pourtant annoncé et certainement attendu. Preuve s’il en est que les travailleurs ne se laissent pas aussi facilement diviser quand il s’agit de défendre leurs intérêts communs indépendamment des partis. 

Une leçon à retenir tant du côté de la «gauche» européiste (PS, Verts) que du côté du Conseil fédéral en prévision de la votation sur l’accord que la Suisse est actuellement en passe de conclure avec l’Union européenne. Pour l’instant, l’USS met en garde et se dit très inquiète du mandat de négociation établi par le Conseil fédéral, notamment en raison du peu de cas que ce dernier semble accorder à la défense des salaires. De son côté, l’UDC s’inquiète à juste titre des conséquences d’un tel accord sur les institutions de la démocratie directe qui, soit dit en passant et malgré leurs défauts, représentent une conquête démocratique en matière d’autodétermination et de souveraineté enviée par bien d’autres peuples.

Pour les salariés et électeurs qui se prononceront en votation populaire sur cet accord, trois questions devront être répondues : «Est-ce bon pour les travailleurs ?» ; «Est-ce bon pour les services publics ?» ; «Est-ce bon pour les conquêtes démocratiques ?».

Michel Zimmermann, militant ouvrier, Genève

Tags: ,

Laisser un commentaire

Les commentaires sous pseudonyme ne seront pas acceptés sur la Méduse, veuillez utiliser votre vrai nom.

Mentions légales - Autorenrechte

Les droits d'utilisation des textes sur www.lameduse.ch restent propriété des auteurs, à moins qu'il n'en soit fait mention autrement. Les textes ne peuvent pas être copiés ou utilisés à des fins commerciales sans l'assentiment des auteurs.

Die Autorenrechte an den Texten auf www.lameduse.ch liegen bei den Autoren, falls dies nicht anders vermerkt ist. Die Texte dûrfen ohne die ausdrûckliche Zustimmung der Autoren nicht kopiert oder fûr kommerzielle Zwecke gebraucht werden.