PAR IAN HAMEL
Alors que le chaos règne à Mayotte et en Nouvelle-Calédonie, territoires français d’outre-mer, Leslie Varenne, une journaliste spécialiste de l’Afrique, raconte dans un ouvrage au vitriol que la France est devenue radioactive dans ses anciennes colonies, et que même ses plus proches voisins, comme l’Allemagne et l’Italie, préfèrent s’en distancer.
Au bout des 254 pages du livre « Emmanuel au Sahel. Itinéraire d’une défaite » (*), une question vient à l’esprit : pourquoi le plus jeune président de la Ve République commet-il autant de gaffes à répétition ? Pour ne pas dire d’erreurs catastrophiques pour l’image de la France. Des exemples ? Cinq jours après son investiture en 2017, foulant aux pieds les règles diplomatiques et les usages africains, le président français, en déplacement au Mali, ne se rend pas au palais présidentiel de Bamako, mais sur la principale base militaire de l’armée française. Ibrahim Boubacar Keïta, le « chef de l’État malien a donc été obligé de faire le voyage pour accueillir son homologue au pied de l’avion ». Le septuagénaire, dans son boubou blanc, est là à attendre au bas de la passerelle la descente du « gamin » (39 ans).
Emmanuel Macron et ses conseillers ignorent-ils que les Africains attachent une grande importance au respect des anciens ? Le président malien va tout de même faire bonne figure et engage la conversation. Mais il est presque aussitôt rabroué par le locataire de l’Élysée : « plus tard, on n’a pas le temps ». Ce qui fait dire à la journaliste : « un président qui ne sait pas qu’il ne sait pas ». Dès les premières lignes de l’ouvrage, elle rapporte les propos d’Emmanuel Macron, en 2017, quelques jours après son élection : « L’opération Barkhane ne s’arrêtera que le jour où il n’y aura plus de terroristes islamistes dans la région et où la souveraineté pleine et entière des États du Sahel sera restaurée. Pas avant ». On connaît la suite : alors que les terroristes occupent toujours plus de territoires, « l’opération Barkhane quittait le Mali, dans la foulée elle était sommée de plier bagage au Burkina Faso puis au Niger ».
La francophonie à une anglophone
Non seulement Emmanuel Macron ne respecte aucun usage, mais il se montre totalement incohérent. En d’autres circonstances, on se souvient qu’en 2019, il affirmait que l’OTAN était « en état de mort cérébrale », avant de prétendre en 2022 que la France était « son meilleur allié ». En Afrique, sa « politique du canard sans tête » décrédibilise et isole encore un peu plus Paris. En 2020, les chefs d’État ivoirien et guinéen décident tous les deux de se représenter pour un troisième mandat, ce qui est anticonstitutionnel. Que déclare le président français ? Que la 3ème candidature d’Alassane Ouattara en Côte d’Ivoire est parfaitement légitime, car il a fait « son devoir », mais que celle d’Alpha Condé en Guinée, ne l’est pas, et qu’il devait organiser lui-même « une bonne alternance ».
Encore plus absurde : alors qu’Emmanuel Macron ne parle que de « démocratie » et de « légitimité » sur le continent africain, lorsque Idriss Déby, le président du Tchad, meurt brutalement, il se précipite pour adouber la prise de pouvoir anticonstitutionnelle de Mahamat Idriss Déby, le fils du président, qui se coiffe du titre de président par intérim. Alors que la fonction aurait dû revenir au président de l’Assemblée nationale. Comment nommer une telle prise de pouvoir ? « Un coup d’État », répond l’auteure de « Emmanuel au sahel. Itinéraire d’une défaite ». Enfin, cerise sur le gâteau, le président français choisit, sans consultation, de confier l’Organisation internationale de la francophonie à une anglophone, Louise Mushikiwabo, ancienne ministre des Affaires étrangères du Rwanda. Une nomination qui fâche les « 95 millions d’habitants de la République démocratique du Congo, agressés à l’est de leur pays depuis 1996 par le voisin rwandais ». A se poser des questions sur le QI du successeur du général de Gaulle.
(*) Éditions Max Milo, parution mai 2024.