BNS, candidature à la présidence de Michel Santi, la balle est dans le camp du Conseil de banque

Le 9 avril 2024, l’économiste Michel Santi rend publique, dans une lettre ouverte au Conseil fédéral, sa candidature à la présidence de la Banque nationale suisse. Ce document contient un programme de réformes en 5 points.

Dans la foulée, Michel Santi écrit directement à la ministres des Finances fédérales, Karin Keller-Sutter:

Madame la Conseillère Fédérale, 

je ne sais si vous aviez été informée de ma missive au Conseil Fédéral envoyée le mois dernier. 

Le fait est que je me porte spontanément et en toute candeur candidat à la fonction de Président de la BNS pour laquelle je bénéficie des qualifications autant professionnelles qu’humaines. 

La gouvernance de notre banque centrale est à revoir de manière drastique.

J’ai publié l’an dernier un ouvrage aux éditions Favre: « BNS, une Banque Centrale ne devrait pas faire ça » et une déclaration de candidature avec 5 propositions phare pour la BNS.

Je serai heureux de vous les faire parvenir, ou de vous les porter moi-même.

Je vous prie, Madame la Conseillère Fédérale, d’agréer mes salutations respectueuses.

Michel Santi

Mardi 29 mai 2024, Michel Santi reçoit cette réponse d’une proche collaboratrice de Mme Keller-Sutter:

Cher Monsieur Santi

Au nom et sur mandat de la conseillère fédérale Karin Keller-Sutter, je vous remercie pour votre courriel dans lequel vous vous intéressez au poste de président de la Banque nationale.

Le Conseil fédéral est certes l’autorité de nomination, mais les candidatures sont examinées par le Conseil de banque de la BNS, qui propose ensuite au Conseil fédéral une personne à élire.

Je vous prie donc d’adresser votre candidature directement au Conseil de banque de la Banque nationale suisse.

Merci de votre compréhension.

Meilleures salutations

Renate Inoubli
Spécialiste des affaires politiques

Michel Santi ne se fait pas prier. Le même jour, il écrit au Conseil de banque de la BNS:

Mesdames, Messieurs,

Je suis candidat à succéder à Monsieur Thomas Jordan à la Présidence de la Banque Nationale Suisse et j’ai l’honneur de présenter en 5 points les réformes que je souhaiterai mettre en place en cas de nomination à cette fonction. 

I – Elargissement de la Direction Générale de 3 à 5 membres et adoption d’un règlement instaurant la présence minimale de 2 femmes à cet organe.

II – Création d’un fonds souverain helvétique dont les objectifs prioritaires consisteront en des actions sociales, éducatives, en faveur de notre système de santé, mais également pour des investissements substantiels sur tous les pans de l’Intelligence Artificielle, de la recherche et des entreprises existantes ou à venir dans ce secteur. 

La BNS peut et doit contribuer à stimuler intensivement ces technologies. L’IA génèrera au sein de notre économie des convergences qui résulteront en une croissance susceptible de se révéler exponentielle. 

III – POLITIQUE MONETAIRE:

Les crises financières du passé ont dévoilé la faiblesse des marges de manœuvre dès lors que le taux d’intérêt est réduit à zéro, ou vire au négatif comme ce fut le cas en Suisse.

Je ne suis pas certain que nous serons en mesure de faire face aux inévitables crises du futur sans affiner notre arsenal. 

A travers le monde, les diverses approches des banques centrales n’inspirent plus confiance. Aussi, les risques sont-ils majeurs en termes de contrôle de l’inflation, mais aussi de montants pharamineux que la Banque Centrale doit dépenser, gonfler son bilan, pour crever efficacement le plancher du taux nul, le tout dans un contexte de marchés financiers toujours plus massifs et qui risquent de basculer dans l’illiquidité en cas de fortes tourmentes. Il est certes possible d’aller encore plus bas dans les taux négatifs, mais il est très difficile à une économie et à une population de sortir indemne d’une situation quelque peu contre nature où le loyer de l’argent est négatif. 

Je suggère une approche nouvelle qui consiste à mettre en place un régime de double taux d’intérêt. Comme nous le savons, une Banque Centrale doit choisir de faire bénéficier soit les épargnants soit les débiteurs, en augmentant, respectivement en baissant, son taux. La dualité du taux d’intérêt autorise précisément de soulager les deux catégories en même temps, en procurant des liquidités à un certain prix aux emprunteurs, tout en rémunérant les épargnants selon un autre. La Banque Centrale majorera également – et de manière significative si nécessaire – la rémunération perçue par les banques sur leurs réserves, à charge à elles d’en faire profiter leurs clients. 

Un fait : le stimulus monétaire n’est plus confronté à aucune limite pratique en cas d’instauration de la dualité du taux d’intérêt. 

Une certitude : nous ne pourrons plus gérer les crises à venir, autant économiques que géopolitiques que sécuritaires, avec l’instrument mortifère du taux négatif qui pénalise hautement les déposants, qui fragilise le secteur bancaire et financier, qui encourage l’accumulation d’espèces. Les diverses politiques de Quantitative Easing ont, en outre, généré des flambées boursières et des inégalités aberrantes. 

La dédoublement du taux d’intérêt n’est pas une mesure révolutionnaire : il nécessite juste d’utiliser à meilleur escient un instrument traditionnel de la Banque Centrale, en évitant les effets collatéraux auxquels nous avons dû faire face des dernières années. En finalité, il agit en transférant de la richesse en faveur du secteur privé, il stimule l’économie, il combat efficacement la trappe de liquidités, il crève sans douleur le plancher du taux zéro. En somme, il confère à la politique monétaire une puissance illimitée.  

IV – 

Suspension immédiate de l’impression de la coupure de 1’000 francs qui affaiblit précisément notre politique monétaire. Les billets en circulation restent valables.

V – 

Mesure de protection de nos entreprises exportatrices à travers la garantie d’un cours minimum de l’euro/chf à 0.95 (plancher équivalent à définir pour les autres monnaies).
Il s’agira de compenser chaque entreprise exportatrice du différentiel à sa charge si le cours du marché est inférieur à 0.95. 

Lors de la crise de la Covid et de la mise en place des mesures d’urgence, la Suisse a démontré sa capacité à mettre en place de telles mesures. C’est donc à travers le système bancaire que chaque entreprise concernée effectuera sa déclaration. 

Il conviendra à l’évidence de prévoir une compensation inverse à régler par les entreprises importatrices dès lors qu’elles bénéficient d’un cours plus favorable que 0.95.

Je souhaite sincèrement que ces lignes et propositions retiennent votre attention.

Dans cette attente, je vous prie d’agréer, Mesdames et Messieurs membres du Conseil de banque, l’expression de ma haute considération.

Michel Santi

La balle est dans le camp du Conseil de banque de la BNS. Présidé par Mme Barbara Janom Steiner, il se compose de 11 personnes.

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