Jura: pour un développement concerté


Il y a aujourd’hui 7 ans, les citoyens jurassiens refusaient le projet stratégique «Jura pays ouvert» proposé par le Gouvernement, suivant en cela une opposition idéologique autant qu’électoraliste menée notamment par les apparatchiks socialistes de l’époque.

La nécessité d’une politique globale
Ce projet avait pour objectif déclaré une croissance démographique certes ambitieuse. Mais il avait surtout l’immense mérite de montrer que, pour atteindre un tel but, plusieurs politiques sectorielles devaient être impliquées et coordonnées.

Victoire à la Pyrrhus de la gauche jurassienne, car le jour même de ce scrutin les citoyens acceptaient la baisse de la fiscalité cantonale, le seul volet du projet «Jura pays ouvert» qui intéressait tout particulièrement sinon exclusivement les milieux de droite. Voilà pour l’histoire.

Le Gouvernement jurassien actuel, dans son Programme de législature 2011-2015, revient fort heureusement sur une approche globale en proposant quatre axes stratégiques:

Réseaux et visibilité
Fiscalité et pouvoir d’achat
Nature et santé
Économie et formation

Intéressante mise en perspective !

Les défis de la démographie
Cependant, sans en faire ni un objectif, ni une mesure de réussite de son action, le Gouvernement fait explicitement référence aux défis démographiques auquel le canton du Jura est confronté. Ainsi au chapitre des menaces qui pèsent sur le développement du canton, il cite l’expatriation des jeunes diplômés ainsi que la stagnation et le vieillissement de la population. Il en déduit qu’«au plan démographique, (le Jura doit) provoquer une cassure positive dans la courbe de croissance de la population jurassienne, pour que ce taux se rapproche de la moyenne suisse». Il enchaîne en estimant indispensable de «rajeunir la population en freinant l’exode des jeunes Jurassiens et en accueillant de nouvelles familles venant de l’extérieur».

Nous sommes là au cœur du sujet. Et pour y voir clair, rappelons quelques évidences. L’évolution démographique est soumise à deux mouvements: l’accroissement naturel et les migrations.

Il n’est pas facile d’agir sur l’accroissement naturel, qui dépend lui-même de deux composantes: la natalité et la mortalité. Le taux de natalité est particulièrement bas chez nous comme dans les pays industrialisés. C’est ainsi que le taux assurant le simple renouvellement de la population (une moyenne d’un peu plus de 2 enfants par femme) n’est depuis longtemps plus atteint. Le phénomène est autant culturel qu’économique. Il serait peu réaliste d’espérer changer à court terme (5 ans!) les mentalités sur le sujet. En revanche, les pouvoirs publics peuvent avoir une influence sur les freins économiques notamment en décidant en particulier d’octroyer des allocations familiales généreuses et en multipliant des structures d’accueil de la petite enfance à coût supportable pour les familles.

La mortalité, quant à elle, ne se commande évidemment pas. On peut tout au plus attendre quelques effets positifs sur l’espérance de vie d’un environnement sain, d’une insécurité professionnelle minimale ou mieux inexistante et d’un droit à une retraite décente. Des facteurs sur lesquels l’État cantonal a toutefois des pouvoirs limités.

L’accueil, le maître mot
C’est donc en portant leur attention sur les migrations et en prenant des mesures adéquates que les collectivités publiques cantonales et communales peuvent espérer quelques effets démographiques positifs. Le programme de législature du Gouvernement jurassien propose à cet égard plusieurs pistes (qui s’ajoutent à celles décrites ci-dessus) telles que des mesures fiscales favorables aussi bien aux entreprises qu’au personnes physiques, une offre «suffisante et diversifiée de terrains constructibles», l’amélioration continue des dessertes routières et ferroviaires, l’encouragement des activités sociales, culturelles et sportives, un soutien renforcé à la diversification économique (notamment dans les biotechnologies et les cleantech), des actions ciblées en faveur de la santé et du bien-être, les efforts poursuivis dans le domaine de la formation et en particulier dans le plurilinguisme.

Aussi, pour contribuer à faire du Jura un « pays de retour (des jeunes formés dans les villes universitaires et, pourquoi pas, de Jurassiens de l’extérieur) et d’immigration » et pour piloter le processus, le Gouvernement a décidé la création d’un «bureau du développement démographique». Mais il est par ailleurs conscient qu’il ne peut pas espérer réussir seul son pari. C’est pourquoi il espère le voir partagé «par le plus grand nombre d’acteurs politiques et économiques et par la population». Il exprime cette attente dans ses conclusions. À ce stade, c’est un simple vœu. Toutefois, contrairement au projet «Jura pays ouvert», il ne propose aucune structure d’échange, de concertation et de participation pour les différents partenaires dont il attend l’implication. C’est là une faiblesse (actuelle?) du programme gouvernemental.

Article paru dans Courant d’Idées

 

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