Routes interdites à la Vallée de Joux: pour les Combiers, cette décision de bureaucrates est un affront


Pour protéger le grand tétras, la circulation motorisée sera bannie des voies forestières. Claude Karlen, président de l’association «Forêt pour tous» déplore les conclusions d’un  jugement du TF. Ces interdictions à la circulation motorisée sont une atteinte à la liberté individuelle.

PAR JEAN-FRANCOIS AUBERT

Les opposants aux diverses interdictions et restrictions de circuler sur les routes forestières de la vallée de Joux ont été vaincu par le grand tétras (lire ci-dessous «Le verdict du Tribunal fédéral»). Dès lors, les Combiers se voient privés d’une jouissance qu’ils détenaient depuis des siècles, celle d’accéder librement en tous lieux de leurs forêts. Que ce soient le Risoud ou celles tapissant le versant sud-est du Mont-Tendre, ces joux seront en grande partie interdites à la circulation motorisée. Les trois communes, par ailleurs propriétaires de forêts (Le Chenit, Le Lieu et l’Abbaye), devront donc prendre les mesures nécessaires dans les 18 mois à venir pour appliquer ces nouvelles contraintes sur l’ensemble du réseau «routier» forestier. Et ce n’est pourtant pas faute d’avoir lutté pour préserver ce droit intrinsèquement combier: un groupe de travail, composé de représentants des communes et villages, de la préfète, du garde-forestier et de l’association «Forêt pour tous» ont travaillé d’arrache-pied pour une solution raisonnable.

Ainsi voit le jour un plan sectoriel de circulation qu’approuve le Département de la sécurité et de l’environnement en juin 2007. Même s’il est restrictif en matière de liberté, ce plan tient compte autant que faire se peut, de la sensibilité des Combiers. Sachant que le WWF et Pro Natura  recourent contre cette décision, les trois communes de la Vallée ainsi que des propriétaires privés procèdent de même. Par arrêt (octobre 2010), la cour cantonale admet partiellement les recours et modifie le statut de certains tronçons compris dans le périmètre forestier.

Par voie de recours en matière de droit public, la Commune du Chenit et consorts demande alors au Tribunal fédéral d’annuler cet arrêt et de renvoyer la cause devant le Tribunal cantonal pour complément d’instruction et propositions supplémentaires en droits d’accès. Ce dernier, WWF Vaud et Pro Natura en proposent le rejet. Le TF suit les conclusions de ces trois acteurs et écarte du recours (arrêt du 7 mars 2012). En épilogue, l’affaire revient à son point de départ, autrement dit au plan sectoriel de circulation concocté par le groupe de travail cependant agrémenté de quelques restrictions supplémentaires.

Forêts particulières

A l’évidence, Claude Karlen (photo Jean-François Aubert), président de l’association «Forêt pour tous», déplore les conclusions de ce jugement. L’homme ne cache pas son émotion, pas plus que sa déception et son amertume face au camouflet infligé par, dit-il, «des scientifiques de l’Etat de Vaud ou de la Confédération qui n’ont pas une vision objective du Risoud». Depuis des siècles les Combiers gèrent admirablement leur patrimoine forestier: «Cette décision, prises par des bureaucrates qui ne connaissent rien de la région, de l’attachement et du respect que les indigènes vouent à leurs forêts, relève de l’affront».

Fédéralisme oblige, une loi fédérale s’applique de la même manière que ce soit à Zurich, à Appenzell, ou à la Vallée. Mais peut-être faudrait-il considérer l’application de ces lois sachant que la Suisse se distingue aussi par un régionalisme très ancré forgeant des sensibilités particulières. Peut-on comparer une forêt de l’Oberland, de la campagne zurichoise, du Jorat ou du Gros-de-Vaud à celles de la Vallée en général, du Risoud en particulier? «Sans aucun doute, non!, martèle le président de l’association. De par sa surface et son découpage en parcelles privées, communales et cantonales, cette dernière n’est comparable, en matière de gestion, à aucune autre forêt en Suisse».

Impunité aux machines forestières

Ce plan sectoriel, s’il pénalise tout un chacun, pèse encore davantage pour une certaine catégorie de la population. «Les personnes âgées, par exemple, pour lesquelles le Risoud est un album de souvenirs ne pourront plus se rendre aux endroits qui leur sont chers. Ou les familles qui cherchent le petit coin tranquille pour le pique-nique du dimanche. Cette privation est une atteinte à la liberté individuelle, pourtant à la première place sur l’autel des vertus helvétiques. En revanche, les machines forestières jouiront de l’impunité totale – même broyant tout sur leur passage – car, relève l’arrêt, «leur utilisation à des fins forestières devrait encore s’affirmer (…) pour procéder aux interventions sylvo-pastorales à la reconstitution et au maintien d’un habitat favorable à cette espèce menacée». Impunité également aux fonctionnaires du Service des forêts qui se baladeront avec leur 4X4 à travers le Risoud investis qu’ils seront du comptage et autres baguages du gallinacé. Des opérations qui, à voir le plan d’habitat, dérangent davantage l’oiseau que les occasionnelles voitures qui sillonnent cette forêt. Ainsi donc, sous couvert de la loi forestière, c’est bien le grand tétras qui est la pierre angulaire de ces interdictions de circuler».

Les comptages évaluent la population aux alentours d’une septantaine de coqs de bruyère. Ce nombre fluctue, l’oiseau sachant voler. Mais peinant à s’envoyer en l’air à cause de… la forêt. «Dès lors, s’il y a une diminution constatée, c’est que l’oiseau a émigré, souligne avec force Claude Karlen. Il est étonnant que ces bureaucrates ignorent l’extraordinaire densité de cette forêt, densité qui réduit d’autant les aires d’envol de ce gallinacé qui a déplacé son habitat du côté français davantage clairsemé».

Un droit ignoré

Il va sans dire qu’un remaniement routier d’une telle envergure engagera des coûts considérables pour les communes. L’Implantation de la signalisation aux centaines d’embranchements et croisées sur plus de 250 kilomètres de voies (180 km pour le Risoud!)  qui sillonnent les forêts de la Vallée dépassera allègrement les 100 000 francs. A cela, il faudra ajouter la construction de plusieurs places de parc pour voitures, en deçà des zones interdites à la circulation.

Et que penser de la parfaite ignorance du «droit du Risoud», inaliénable et imprescriptible (lire ci-dessous), dont ont fait preuve tous les acteurs partisans de la fermeture des routes forestières? Pour Claude Karlen, «ces gens n’en ont absolument pas tenu compte, reléguant ce droit authentique à l’anecdote plaisante sans aucune force de loi».

Sans rire, mais avec un sourire qui en dit long, le président de «Forêt pour tous», homme intègre, défenseur des acquis, militant des nobles causes («Mon hôpital pour la vie», association pour la sauvegarde de l’hôpital de la Vallée) se permet un écart, exprime sa rancœur par une dernière petite phrase lourde de sens: «Je souhaite vivement que les Combiers se montrent désobéissants».

Le verdict du Tribunal fédéral

Dernièrement, le Tribunal fédéral a rendu son verdict: le recours des trois communes de la vallée de Joux contre la décision de la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal est rejeté. Conséquence de cette décision: la majeure partie des routes forestières de la Haute Combe seront interdites de circulation motorisée. Ces voies traversent des zones considérées comme des habitats de première ou de seconde importance pour le grand tétras, un oiseau sur la liste rouges des espèces menacées.

Ainsi donc, le grand tétras impose son envergure aux communes du Chenit, du  Lieu et de L’Abbaye. Ne reste à celles-ci qu’à s’accommoder de cette nouvelle configuration routière des bois du Risoud et d’autres forêts de la Vallée de Joux. Autrement dit d’appliquer le plan de protection du Service des forêts du canton de Vaud. Dans son arrêt du 7 mars dernier, le TF rappelle que le grand coq de bruyère figure parmi les espèces en danger sur la liste rouge des oiseaux nicheurs menacés et rares de Suisse. Il estime qu’il relève de l’intérêt public que ces zones sensibles soient protégées par des interdictions de circuler sur ces routes.

Par ailleurs, les communes, qui demandaient dans leur recours de prévoir une dérogation générale en faveur des riverains, voient leur requête nulle et non avenue. Le TF, en effet,  confirme l’obligation aux riverains de quérir une autorisation préalable pour accéder aux chalets ou aux refuges exploités par des associations ou par des collectivités publiques. Une astreinte qui permettra de s’assurer que seuls les ayants droit emprunteront les routes pour des motifs fondés (’entretien, ravitaillement ou gardiennage).

A relever encore que, dans ses conclusions, le TF condamne les recourants, déboutés à s’acquitter des frais judiciaires pour un montant de 4000 francs. Et devront, de surcroît, verser une indemnité de 2000 francs à Pro Natura et Pro Natura Vaud (ces deux associations s’étaient opposées à la circulation motorisée pour la sauvegarde du grand tétras). JFA

Le droit du Risoud

Un acte de plus de 670 ans atteste que les habitants de la Vallée sont propriétaires d’une partie des forêts et y jouissent d’un droit d’usage – accès et circulation – imprescriptible et à perpétuité.

Ce droit d’usage, dont pratiquement tout Combier en sait l’existence, ou tout au moins en a entendu parler, relève d’un acte ancestral par lequel les habitants de la Vallée sont propriétaires d’une partie importante des forêts – administrées par les communes usagères –  et y jouissent d’un droit d’usage imprescriptible et à perpétuité. Dès lors, compte tenu de cette autorisation vieille de plus de six cent septante ans, ils peuvent accéder et circuler librement dans celles-ci.

En 1186, l’empereur d’Allemagne Frédéric Ier donne la vallée de Joux à Ebald de La Sarraz et restera dans cette famille jusqu’en 1344. Avant de décéder en 1336, Aymon de la Sarraz lègue ces terres à son fils François qui s’aperçoit bien vite que son père avait contracté de fortes dettes en faveur de l’abbaye du Lac de Joux. Afin de se renflouer quelque peu, François de la Sarraz vend la Vallée au comte de Savoie en 1344. Mais le baron désargenté n’avait pas perdu le sens des affaires. Il émit plusieurs réserves à cette vente, dont une constitue les fondements du droit du Risoud toujours en vigueur aujourd’hui. «Que moi, mes héritiers, mes successeurs,  mes gens de la Sarraz et de tout le district du dit lieu, tant ceux qui vivent à présent que leur postérité, nous ayons et nous devions avoir, à perpétuité, notre usage dans les joux, forêts (…) de la sommité du Mont Risoud à celle du Mont-Tendre».

Déjà des procès

Cette réserve eut une portée incalculable pour les habitants de la haute combe qui furent dans l’obligation de lutter (déjà) afin de sauver, du moins une partie, ce qui leur fut concédé en 1344. Car, il y eut, tout au long des siècles, d’innombrables procès contre ceux qui prétendaient les dépouiller: l’abbé du Lac, les communes du pied du Jura, les voisins de bourgogne, les seigneurs de la plaine, LL.EE de Berne et aussi, le canton de Vaud.

Ce droit de «bochérage» (forêt dont on exploite le bois) donne à chacun la possibilité d’exploiter la forêt, d’user de tout le bois nécessaire tant au chauffage qu’à la construction des maisons, sans condition quelconque. Deux cents ans plus tard, les Bernois font passer la vallée de Joux sous l’administration du bailli de Romainmôtier, donnent à la commune du Lieu toutes les Joux en deçà de l’Orbe (1543) et confirment ce privilège «pour user à leur bon plaisir et comme leur chose propre».

246 bornes 1719

Les limites de la forêt sont déterminées pour la première fois en 1627 et le nom de Risoud, qui avait désigné jusqu’alors la longue crête formant la frontière, sera dès lors celui d’une forêt délimitée par la première banalisation de LL.EE. La surexploitation menace le massif. En 1646, les Bernois interdisent tout abattage sur une largeur de 300 mètres le long de la frontière «pour motifs de stratégie militaire et pour faciliter la défense du Pays de Vaud». Sept ans plus tard naît la sylviculture à la vallée avec l’apparition des premiers forestiers formés et payés par Berne. En 1719, 246 bornes de pierres sont posées et délimitent ce qui est le Risoud actuel. Malgré les forestiers bernois, le massif est toujours surexploité. Le Chenit abuse du droit de bochérage et défriche près de 100 poses. La réaction ne se fait pas attendre: Berne limite les droits et élabore un premier règlement d’application puis crée des réserves de 100 poses (1766).

Evolution au XIXe siècle

Tout au long du XIXe siècle, les communes de la Vallée vont mener un dur combat pour sauvegarder ce qui peut l’être des privilèges de leurs habitants. Dès 1803, Vaud se considère comme l’héritier de Berne et réduit le droit d’usage et vend à son profit le bois retranché aux usagers. En 1832, l’Etat décrète que seuls les gardes forestiers auront le droit de marquer les bois d’usage, tout en accordant à chaque propriétaire un sapin par année et du bois de chauffage pour tous. Sur cette base, 1200 sapins et 2771 fayards sont abattus. En 1858, une convention intervient par laquelle Vaud reconnaît le fameux droit d’usage, mais se réserve le droit de le racheter en offrant un certain capital ou en remettant une partie de la forêt (au moins un tiers) en toute propriété, le long de la crête et de la frontière franco-suisse, la partie inférieur (jusqu’à la lisière) étant constitué de parcelles privées.  Les usagers (communes) choisissent unanimement les forêts. En 1901, après décision du Grand Conseil, recours des communes et jugement d’un tribunal arbitral, les trois communes entrent en possession de leur Risoud (746 ha), en qualité de représentants légaux des usagers. Les communes mettent dix ans à se partager le domaine forestier. Les lots, déterminés par les soins du Département de l’agriculture et du commerce sont attribués par tirage au sort.

La situation juridique de ces forêts n’a plus guère évolué depuis lors, les communes usagères étant toujours inscrites au Registre foncier, à titre de représentantes des citoyens propriétaires. Seule dérogation à ce droit, les communes administratrices ne déduisent plus, depuis plusieurs années, sur la décision fiscale des Combiers la redevance liée aux revenus perçus pour l’exploitation des bois du Risoud. Mais les doit d’usage et de propriété eux, subsistent bel et bien. JFA

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5 commmentaires à “Routes interdites à la Vallée de Joux: pour les Combiers, cette décision de bureaucrates est un affront”

  1. Alex Dépraz 30 mars 2012 at 15:14 #

    Article intéressant et fort bien documenté.

  2. Le passant ordinaire 31 mars 2012 at 05:27 #

    Voilà ce qui arrive lorsque l’on laisse le WWF et Pro Natura agir en toute impunité. Il est bien clair que ces bobos urbains et suburbains verdâtres n’ont qu’une idée en tête limiter la liberté de mouvement des citoyens.

    Après l’acceptation de l’initiative Weber ils pensent avoir le vent en poupe oubliant qu’un retour de manivelle d’une rare violence pourrait se produire ces prochaines années.

    Le plaisir d’une personne âgée à revoir des paysages qu’il a façonné par son travail, par son respect de la nature vaut tous les grands tétras du monde.

  3. Christophe Fournier 16 avril 2012 at 14:01 #

    Ces technocrates, comme le relève si bien Claude Karlen, n’ont aucune espèce d’idée du profond respect des Combiers, habitants ou exilés, pour LEUR Risoud.

    Les habitants de la Haute Combe ne sont pas écolos, car ils n’ont pas besoin d’une étiquette pour protéger leur patrimoine. Le Risoud est, de loin, une des forêts de Suisse la mieux entretenue, tant par son personnel forestier que par ses habitants, qui veillent au grain et qui, même s’ils y montent en voiture, ne laissent rien traîner après leur passage.

    Je propose à ces Messieurs du Tribunal Fédéral, ainsi qu’à ces écolos de façade, car bien qu’ils prônent le respect ab-so-lu de l’environnement, ils n’en roulent pas moins en 4X4 et autres véhicules pas moins polluants que celui du Combier moyen, ne serait-ce que sous le couvert de déplacement forestiers pour “étudier” l’habitat de leur fameux gallinacé.

    Pour moi, quand je parcours le Risoud, à pieds ou en voiture, j’entends au loin “Myster le Berger” cher à Sarclo, imageant le Grand Conus, figure mythique du Risoud.
    Qu’en penserait-il, blotti sous sa couverture au Poste des Mines ?

    Il leur chanterait, peut-être, “société tu m’auras pas”, en tous cas, c’est bien celle-là qui me vient directement à l’esprit, et que j’appliquerai lorsque, interdictions ou pas, je me rendrai, comme chaque Combier, dans les coins si chers à mon coeur et si bons pour le corps et l’esprit, entouré de ma famille et mes amis.

    Peut-être certains de ces Messieurs devraient-ils essayer?

    Je tiens à remercier Claude Karlen qui, aussi loin que je me rappelle, sait se battre, comme il le fait, pour des causes justes et nobles.

    Mes chaleureux remerciement vont également à Jean-François pour son article fort bien développé et argumenté, au plaisir d’en deviser au coin du feu au Chalet Capt.

  4. Guex Claude 27 avril 2012 at 10:12 #

    Cet article entretient une complète confusion car le libre accès à la totalité de la forêt n’est en rien touché; simplement est enfin mise en place une restriction de circulation MOTORISEE( et encore partielle), totalement conforme avec la législation fédérale qui prime sur tout droit cantonal ou communal…
    Droit du Risoud: ce “droit” du temps de la féodalité n’a tout simplement plus lieu d’être dans un état démocratique.
    Enfin, ce sont surtout les baillis bernois qui ont sauvegardé la forêt: s’ils n’étaient pas intervenus, cette grande forêt ne serait sans doute plus qu’un souvenir!

  5. Serge Fischer, Pro Natura Vaud 2 mai 2012 at 16:23 #

    Depuis l’arrêt du tribunal fédéral sur la circulation forestière dans la Vallée de Joux, que de propos abruptes et fielleux ont été déversés contre les associations de protection de la nature, sous prétexte qu’elles soutiennent l’application d’une loi de portée générale, qu’elles estiment favorable à la forêt ; tout comme le respect de l’égalité de traitement entre citoyens, une des exigences de base d’un Etat de droit démocratique, fut-il d’essence fédérale !
    En outre, les restrictions d’accès qui font l’objet de ces levées de boucliers sont très raisonnables, et un nombre de tronçons non négligeable restera ouvert à la circulation, conformément aux dispositions de la législation vaudoise, qui n’est –et de loin- pas la plus sévère en la matière. Et rappelons tout de même que seuls les véhicules motorisés sont concernés ; le libre accès de nos bois à tout un chacun reste donc garanti par la Constitution, précieux privilège que nous envient les citoyens de nombre de pays voisins !
    Certes, chacun est libre d’avoir un avis personnel sur la pertinence de certains points de la réglementation forestière, mais se baser sur un acte promulgué il y a près de 700 ans (le Droit du Risoud) pour justifier le libre accès de l’automobiliste du XXIème siècle dans les forêts combières relève d’une mauvaise foi évidente.. et assez croustillante : Claude Karlen et tous ceux qui se réfèrent à cet argument anachronique du droit médiéval ne reprochent-ils précisément au WWF ou à Pro Natura d’être par trop soucieux de l’application de textes légaux…actuels ?
    Tout aussi retournable est l’argument, souvent entendu, qui voudrait que le nombre de véhicules utilisant les routes forestières est si faible qu’il rend toute restriction inutile ; on se demande alors les raisons qui peuvent bien pousser ces véhéments protestataires à perdre tant d’énergie pour conserver un privilège de principe qui s’avère finalement, selon leur propre aveu, d’un usage anecdotique.
    On rappellera également que le principe général d’interdiction de circuler s’applique à l’ensemble des forêts du pays, et non seulement celles qui abritent le grand tétras, ce bouc émissaire devenu si commode dans certains discours anti-écologistes basiques: opposer la nécessaire protection de cet oiseau en voie de disparition à l’entrave de la liberté de circuler en voiture n’a donc aucun sens.
    Enfin, et peut-être surtout, il serait temps de tordre le cou à l’insupportable principe arguant que le fait de vivre dans une contrée confère à ses habitants le droit d’y faire, et d’en faire, ce qui leur plait. En l’occurrence, non, la Vallée de Joux n’est pas la propriété exclusive des Combiers. De même que le monde est désormais trop petit pour que la destruction de la forêt amazonienne ne puisse être considérée que comme une affaire strictement brésilienne, la Suisse est trop exiguë pour que la protection de sa diversité paysagère, de son sol, ou de ses valeurs naturelles dépende uniquement du «bon (ou du mauvais) vouloir» autochtone…

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