L’annonce, le sourire ravi et à peine retenu. La tête en arrière, un soupir de soulagement. Un regard vers elle, il lui serre le bras. Il y va.
PAR DAVID MARIN
Le discours a été préparé, mais sans subir le ridicule de devoir déplier une feuille arrachée d’un cahier spirale, d’un agenda de l’année passé. Il a été appris – presque – par cœur. C’est la répétition mentale par immersion imagée. Le moment a été visualisé, la réelle surprise est là. L’excitation se mélange à la satisfaction.
Ovation. Grande respiration. Les pas ont été légers. Pupitre, micro. Hésitation, surprise. Inspiration, tension, expiration.
«Je…(ndlr: grande expiration)…Merci ! Merci du fond du cœur… (ndlr: on ne parle pas de l’appareil digestif). Merci (ndlr: le festival, le président du festival, le président du jury): ça me touche (ndlr: et ça va peut-être faire que l’on me touche aussi tout en étant, quelque part, intouchable) énormément (ndlr: profondément? extraordinairement?) / ça me touche (ndlr: avec hésitation).»
«Je ne m’attendais (ndlr: absolument? pas du tout?) pas à cette récompense (ndlr: enfin, si, un peu / je la voulais beaucoup / mais je ne vais tout de même pas le dire, enfin…) et voilà qu’elle est… (ndlr: ici? là? entre mes mains? tombée du ciel?). Je suis tellement bouleversé et/ou ému que les mots ont de la peine à jaillir (ndlr: trop précieux?) – se former… (ndlr: silence, hésitation, grand soupir / l’émotion).»
«Dans la carrière d’un cinéaste / acteur / celui-ci – j’ai la chance de le vivre maintenant (ndlr: emphase), ici et maintenant – est un instant magique, mais éphémère. Car la seule raison, la cause, l’unique objectif est le… Cinéma. Une pensée / j’aimerais dédier ce prix / à une personne (ndlr: climax) qui m’a été proche – qui m’a accompagné (ndlr: un regard vers le passé, dans le vide, ailleurs) quand le désir de cinéma n’était – en moi – qu’en germe (ndlr: silence): le nom (ndlr: pas de polémique, fédérateur, pas trop éloigné dans le temps. Effet – applaudissements?).»
«J’aimerais… je souhaite également remercier (ndlr: l’acteur / le réalisateur): «tu sais que ce film a été écrit pour toi», «sans toi tout ça n’aurait pas été possible», « tu es exceptionnel-le (ndlr: bouleversant-e, magnifique, généreux). (Ndlr: ne pas oublier : la justesse). Tu as joué / mis en scène / avec une justesse incroyable / le jeu était juste, la direction était juste, parfaite, admirable, (ndlr: intense?) / (ndlr: voire finesse).»
«Je sais que ça peut paraître banal (ndlr: ça l’est, mais quand même), j’aimerais (ndlr: vas-y donc !), remercier le producteur qui a cru dans le film, en moi. Quand l’aventure de ce film a commencé (ndlr: gestation, écriture, réalisation), etc.»
«Je salue aussi (ndlr: mais pas trop, il ne faut pas non plus exagérer), je souhaite saluer le travail (ndlr: l’acharnement au travail?) des techniciens (ndlr: lumière/montage, par exemple – il est vrai qu’il reste un conflit à régler)… sans eux (ndlr: les ampoules – les lampadaires)…»
«Encore un mot, pour ne pas oublier (ndlr: cause humanitaire, guerre oubliée): c’est vraiment important. Le cinéma est partage, le cinéma est émotion (ndlr: le cinéma est engagement / le cinéma est générosité / le cinéma est la bénédiction des dieux?).»
(Ndlr: La voix cassée, les yeux qui brillent): merci, merci encore, merci du fond du cœur (ndlr: répétition, mais ça passe).»
«Merci Cannes! Au revoir!»
(Ndlr: Ne pas oublier de me confirmer la réservation au restaurant!)
Article paru dans « Un ristretto!«