Religions de paix et d’amour?


Dieu est-il paix et amour? Ces deux notions sont-elle de l’ordre du sacré? Ou alors ne seraient-elles que des règles de vie définies et décidées par les hommes? Et donc sujettes à caution comme à interprétation?

PAR JEAN-CLAUDE CREVOISIER

A voir, dans l’histoire du monde, les guerres menées au nom de diverses divinités, la question se pose. La religion définie, selon le dictionnaire, comme “le rapport que l’homme entretient avec l’ordre du divin ou d’une réalité supérieure, se concrétise sous la forme de systèmes de dogmes ou de croyances, de pratiques rituelles et morales”. Des systèmes trop souvent fermés et concurrentiels, parfois contradictoires, exclusifs et même antagonistes.

Les textes dits sacrés ont, pour la plupart et pour les plus importants, des origines lointaines. Leurs auteurs, qui se réclament quasiment tous d’une inspiration divine, sont cependant le produit d’un temps et d’une civilisation donnés. Et, comme chacun le sait, toute parole même écrite permet plusieurs lectures et de trop nombreuses interprétations. C’est d’ailleurs ces variations qui ont de tout temps favorisé l’émergence de multiples églises au sein d’une même religion. Ces traductions différentes du souffle divin ne seraient jamais dramatiques si les hommes ne s’écharpaient pas, au nom de l’usage que les clercs font de la Parole.

Cela se vérifie aussi bien chez les juifs et les musulmans que chez les chrétiens.

Les chrétiens n’ont d’ailleurs aucune leçon à donner sur ce point. Tant leurs divergences ont permis, et jusque dans un passé pas si lointain, au mieux des anathèmes et trop souvent des massacres. La Saint Barthélémy et l’Inquisition chez les catholiques, l’Irlande du Nord chez les protestants, pour ne prendre que quelques moments historiques. En outre, l’église catholique romaine a longtemps pactisé avec le pouvoir contre le peuple; par exemple en Espagne notamment en 1936 (relisons Bernanos) et en Amérique latine depuis sa colonisation et au moins jusqu’au siècle dernier. Aujourd’hui encore, dans la nébuleuse chrétienne, la paix, l’amour, l’égalité, la justice sont encore loin d’être généralisés et définitivement acquis.

Et, plus encore dans la société catholique, la femme reste une paroissienne de seconde zone. L’accès à la prêtrise lui est toujours interdit. Sa place est certes plus enviable que celle de la femme musulmane, mais… En fondant quelque espoir sur le pape François, nous laisserons ici de côté le statut qui est réservé actuellement dans cette église en particulier aux divorcés et aux homosexuels, .

Cela étant, après la tragédie de “Charlie Hebdo”, les responsables (en tout cas occidentaux) des trois religions monothéistes ont tous voulu rappeler leur attachement à la paix, à la tolérance voire à l’amour du prochain, quel qu’il soit. Tous ont affirmé, sur le moment, qu’il n’y avait aujourd’hui pas de place, dans leur religion, pour les fanatiques et les tueurs. Nous en prenons acte.
Encore faudrait-il que ces chefs religieux déclarent et réaffirment constamment, au plus haut niveau, ensemble et publiquement, reconnaître le caractère universel et donc transcendant de ces valeurs (et d’autres encore telle la liberté d’expression, l’égalité hommes-femmes et la justice). La paix confessionnelle, la paix tout court et la cohabitation dans la concorde sont maintenant à ce prix.

Courant d’Idées

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