Macron est-il Jeanne D’Arc? Mieux ou pire, Napoléon?
PAR CHRISTIAN CAMPICHE
Pour propulser le nouveau président sur le devant de l’histoire, le « storytelling » du nouveau président français ne recule devant aucune référence mythique. Les faiseurs d’image ont capté l’air du temps. Dans un pays en proie au doute, ces professionnels de la com’ vendent l’homme providentiel, Moïse guidant son peuple. L’illustre Corse qui, sabre au clair, franchissait un rideau de balles sur le pont d’Arcole, oui, ce bicorne-là a de quoi se retourner dans sa tombe.
Clichés twitterocompatibles. Macron n’est pas Bonaparte. Macron n’est pas de Gaulle non plus. Même s’il en revendique l’héritage « ni droite, ni gauche ». S’il revenait aujourd’hui, nul doute que le général à la haute taille et au verbe grave s’enquérerait de savoir comment le nouvel occupant de l’Elysée compte restaurer le prestige de la France, autrement que par des ventes d’armes. Quid de l’amitié avec les pays arabes? Quid des relations avec l’ancienne Union soviétique, cette Russie, aujourd’hui cible de sanctions, à qui de Gaulle passait tout, ou presque, tellement il la respectait. Tempi passati. Au soir de son élection, Macron-la-main-tendue a refusé de recevoir les journalistes de Sputnik, l’ancienne agence Novosti.
Les mythes se bâtissent au rythme du clairon et s’évanouissent dans un clapotis de gondoles. Quand il va voir Mme Merkel, Macron est le « sauveur » de l’Europe. Comme Charles Martel, arrêtera-t-il les maures aux portes de Poitiers? Dans l’attente de ce haut fait d’armes hypothétique, personne ne se demande si l’Europe dont on lui a confié le destin est celle d’Erasme ou celle d’Alan Dulles, mentor de la CIA. Car l’Europe qui émerge des ruines de la guerre est bien la création de ce grand manipulateur des intellectuels du Vieux-Continent. Si bien que toute velléité ultérieure d’en faire une entité indépendante et forte tiendra d’un leurre entretenu par les dirigeants allemands à la botte de Washington.
Dévoués à la cause du divin énarque, volée promotion Senghor, les médias de l’hexagone vont jusqu’à exhumer un personnage dont Macron affirme qu’il fut son père spirituel, feu Paul Ricœur. Sur France Culture, tel historien et professeur parisien se livre à moult contorsions de pensée pour démontrer de quelle manière le jeune président pourrait s’imprégner du mysticisme humaniste du philosophe personnaliste. En omettant de signaler que le mouvement personnaliste dont se réclamaient plusieurs grands européens à l’instar d’Alexandre Marc et Denis de Rougemont, se caractérisait par la détestation de tous les ismes. Communisme, capitalisme et… libéralisme, un dogme que Macron n’est pas près de renier, même si ses thuriféraires persistent à qualifier d’ «égalitaires» ses options mondialistes.
La France perd de son influence dans les pays arabes. Pendant ce temps, la Chine…
http://lecourrierdumaghrebetdelorient.info/focus/monde-arabe-quand-la-chine-bondit-sur-le-moyen-orient/
Macron, le protocole et le symbolique, le sabre et la bourse:
http://1dex.ch/2017/05/emmanuel-macron-protocole-symbolique/#.WR0dMFLpPBI
Tu es bien sévère et je trouve partial (j’avoue l’être aussi en faveur de Macron) mais objectivement :
– Ton storrytelling Bonaparto-arco-gaullien ne tient pas, même si juste avant de lire La Méduse, j’ai regardé l’âge de Bonaparte à Arcole. Comme aucun des trois, il ne se positionne en sauveur de la nation.
Il a juste observé les causes de la paralysie et en a déduit la suite. Il n’est pas le seul. 80% des français l’ont également senti (enquête Cevipof de science -po)
– Non, il n’a pas été « fait » par les médias qui au début l’ont traité de bulle, de feu de paille et autres gentils qualificatifs. Puis il est devenu un « sujet journalistique » parce que original, différent, un bon sujet de couv’
– Quant à Sputnik-Novosti, je le comprends puisque plusieurs enquêtes convergent vers elle dans l’attaque informatique et les ragots abjects dont il a été victime juste avant le deuxième tour de l’élection…. On connaît les liens de Marine avec Moscou et l’intérêt de Moscou à déstabiliser l’Europe.
– Pourquoi ne pas simplement admettre qu’il est brillant, qu’il a vu une opportunité, la saisie été en plus a eu de la chance.
Pourquoi vouloir qu’il ne soit que le jouet de forces plus ou moins occultes? Pourquoi lui dénier une qualité de pensée, une liberté d’esprit, Ricoeur ou pas, que tout universitaire de qualité devrait avoir, n’en déplaise aux egalitaristes Belkacemien enfin dégagée.
– Pour moi – et jusqu’à preuve du contraire – il fait partie de ces hommes politiques comme la France sait en produire parfois (rarement).
La constitution de son gouvernement montre la même intelligence et le même pragmatisme.
J’espère que les électeurs lui donneront une majorité pour qu’il fasse ses preuves. Je jugerai après si besoin est. Mais pas avant sur la base de préjugés et de supputations.
(cf mon long post de ce matin sur FB)
Je suis d’accord avec Manuel Ruch de laisser la chance à Emmanuel Macron, et à son gouvernement ainsi qu’aux députés que les citoyens éliront aux législatives, avant de juger…
… mais, lorsque je vois que le nouveau président de la République française a réservé son premier déplacement à l’hôpital militaire Percy de Clamart (Hauts-de-Seine) pour rencontrer trois soldats blessés en opération au Mali et en Afghanistan, et que, selon Le Monde du 14 mai 2017* citant l’Elysée, le chef de l’Etat « a souhaité, comme premier déplacement, se rendre au chevet des soldats blessés au combat, pour défendre notre nation et la liberté dans le monde »., cela démontre pour moi quel est son ordre de réflexion et de préoccupation !
* http://www.lemonde.fr/election-presidentielle-2017/article/2017/05/14/emmanuel-macron-a-l-elysee-pour-son-investiture_5127476_4854003.html?xtmc=visite_soldats_blesses&xtcr=3
Et puis: c’est quoi ce grand rassemblement national tous azimuts de la droite à la gauche où n’existe plus qu’un vaste centre heureux, où la droite n’a plus de raison d’être car il n’y a plus de riches à enrichir et où la gauche n’a plus de raison d’être parce qu’il n’y a plus de pauvres à défendre ? Comment croire à un montage pareil ?
La clairvoyance de l’article de Christian montre que nous sommes dans une sorte de spirale que les citoyens n’identifient pas vraiment. Pas à temps. Et de balancer de la droite à la gauche ou de la gauche à la droite ne résout rien. Ne résoudra rien. Les affaires du monde ne reposent pas sur la personne, quelle qu’elle soit, mais sur une compréhension profonde de la complexité du monde. Et ensuite, agir en fonction d’intérêts qui encore une fois dépassent la personne en question. Le culte de la personnalité est un leurre.
La France aura les conséquences de ses choix – et non seulement, ce choix-là. Il est évident qu’il faut voir…
La question me semble donner un contenu et un sens à la pensée et à la conscience politique. Là ou ailleurs.
La route est encore longue. Ne jamais cesser d’analyser, de dire, de répéter, pour comprendre et faire comprendre. Et surtout repérer les germes des pistes futures de transformations possibles.