Progrès, fatalité ou adaptation?


Le développement fait partie de notre évolution.

PAR EMILIE SALAMIN-AMAR

Voilà des siècles que nous avançons dans ce sens vers ce que nous appelons le progrès. Disons que c’est une tradition que d’aller de l’avant et non une fatalité. A ce jour, nous pourrions dire que dans les pays dits industrialisés, nous sommes arrivés à un certain niveau de vie, de confort dans presque tous les domaines. Alors, on pourrait se poser la question qui suit: doit-on continuer cette course folle vers l’innovation sans fin, ou bien prendre le temps de ralentir cette frénésie du «vient de sortir» qui risque bien de nous mener très prochainement à la perdition.

Il va sans dire qu’il est hors de question de faire du sur place. Ni même d’empêcher les chercheurs et autres trouveurs d’imaginer et de créer de nouveaux objets, à condition qu’ils ne soient pas inutiles et qu’ils n’augmentent pas la masse de nos déchets dont nous ne savons plus quoi en faire. Quand nous aurons rempli les mers de plastiques, tué les poissons, étouffé la flore sous-marine, allons-nous enfin nous réveiller? Reste à savoir dans combien de temps? Quand la Terre et nous-mêmes suffoquerons? Et si d’aventure, nous prenions conscience trop tard, que ferons-nous? Où irons-nous? Nous n’avons pas de plan «B», nous n’avons pas d’autre choix que de vivre et de mourir sur notre petite planète. Ce qui veut dire que nous sommes en danger, qu’il y a urgence à freiner la production, la surconsommation à outrance au nom de la globalisation, du commerce et du profit à tout prix. 

Actuellement, nous pourrions dire que le monde est gouverné par les marchands, les spéculateurs en tous genres. Ce commerce mondial génère plus de mal que de bien. Cette concurrence que se livrent les pays producteurs de biens dont nous n’avons nul besoin dérègle les économies internes afin de les rendre totalement dépendants les uns des autres. Par ailleurs, le formatage des cerveaux qui se propage tel un virus par le biais d’Internet fait naître en nous, pauvres consommateurs sans défense, une addiction volontaire aux nouveaux médias propagateurs de publicités toutes plus alléchantes les unes que les autres afin de succomber à la tentation d’achats compulsifs. Alors, que sommes-nous devenus? De pauvres gogos, ou des moutons allant de plein gré à l’abattoir, trottinant bien malgré nous sur le chemin de la perdition sans espoir de retour? 

Afin de ne pas perdre notre âme de consommateur intelligent, s’il en reste encore une once,  il nous faudra lutter contre la fabrique du consentement. Il s’agit d’une lutte féroce pour vendre à tout prix. Il est vrai que les firmes multinationales ne manquent pas d’imagination. Après la réclame classique, elles s’attaquent au cerveau en créant un besoin, un manque, une envie chez le consommateur. On pourrait dire que les industriels de nos jours ont la mainmise sur nos cerveaux. Plus la connaissance avance dans ce domaine, plus cela profite aux marques qui nous manipulent sans vergogne, à distance. Une simple image, une couleur, une forme, un graphisme font que nous succombons à la tentation d’achat, et ce, de manière totalement inconsciente. Des essais ont été faits sur des volontaires et l’on a pu observer sur des images IRM quelles régions du cerveau s’activaient au moment où ils dégustaient, ou tout simplement, quand on leur promettait de boire, après l’examen, certains sodas de marques connues. L’idée seule de cette promesse excitait chez ces volontaires la zone de récompense. Alors, comment ne pas succomber à la tentation d’achat lorsque l’on fait ses courses? Il en est de même au niveau de la téléphonie, de tous les appareils numériques ainsi que pour tous les produits de consommation. Habilement manipulés, nous ne savons, ni ne pouvons plus résister.

Alors, à ceux qui rêvent de décroissance, je dirai qu’il leur faudra s’armer de patience, car c’est dans la nature profonde des êtres humains d’aller de l’avant et non pas à reculons. Compétition et prestige obligent. Sauf s’il y avait une terrible catastrophe qui nous contraindrait alors à faire des pas en arrière.

L’Essor

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