Le risque Huawei

PAR CHRISTIAN CAMPICHE

L’installation d’antennes relais dans le clocher des églises n’est pas une nouveauté. Avant l’apparition de la 5G, personne ne s’en souciait, ou presque. Mais aujourd’hui elle fait jaser. 

Dans le canton de Fribourg mais également d’autres régions de Suisse, des habitants des environs des lieux de prière s’inquiètent pour leur santé. A plusieurs reprises ils ont réussi à contraindre l’opérateur télécom à renoncer à son projet. Lausanne bouge aussi. Des paroissiens de la Basilique Notre-Dame du Valentin ont réalisé qu’une antenne 5G était programmée sur le clocher de l’édifice datant du 19e siècle. Ils se demandent s’il est opportun de faire appel à une technologie destinée certes à une utilisation honorable – la chirurgie à distance ou la voiture électrique – mais dont l’innocuité n’a pas encore été définitivement prouvée. Ils s’étonnent aussi du silence qui entoure l’enquête publique. Des réticences qui n’empêchent pas les responsables de la paroisse, contactés par l’auteur de ces lignes, de faire confiance aux avis lénifiants des instances en charge de la santé de la population, OMS et Office fédéral de l’environnement en tête. On ose croire au moins que l’opérateur sera généreux en termes de rémunération, au vu de l’importance symbolique du bâtiment et de son emplacement au coeur de la métropole vaudoise.

Les conséquences de la 5G sur la santé monopolisent le débat mais cette inquiétude légitime élude bizarrement une autre question, en soi tout aussi importante. Elle est d’ordre politique et stratégique car les équipementiers télécoms ne sont pas légion. Ils se comptent sur les doigts de la main. Un aux Etats-Unis, deux en Europe, deux en Asie dont le Chinois Huawei. Ce dernier inspire de sérieuses craintes en raison des risques qu’une entité liée à un régime pratiquant la répression de minorités, la propagande anti-religieuse et la censure fait peser sur la sécurité nationale des démocraties. En cas de crise mondiale, rien ne garantit la protection contre un dysfonctionnement majeur que pourrait provoquer une simple manipulation du réseau de commande. Les pays anglo-saxons ont déjà fait leur choix. L’heureux élu ne sera en tout cas pas Huawei. Le Français Bouygues veut bien réfléchir à revoir sa collaboration déjà étroite avec le groupe chinois mais il demande une compensation sonnante et trébuchante. En Suisse, le deuxième opérateur du pays, Sunrise, convole sans état d’âme avec Huawei, contrairement au leader de la téléphonie Swisscom qui, prudent, soignerait plutôt l’option européenne offerte par le Suédois Ericsson.

Un flottement helvétique qui conduit à ne pas se gratter la tête pendant des heures pour comprendre ce que convoite Huawei sur les bords du Léman. L’équipementier vient de renforcer son antenne – c’est le cas de le dire – vaudoise en lui adjoignant un bureau à St-Sulpice, à deux pas de l’EPFL.

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