Crise électorale, un très mauvais signal pour l’avenir politique des Etats-Unis


PAR BERNARD ANTOINE ROUFFAER

Les dernières élections aux USA ne se passent pas… de manière idéale. Les accusations de fraude électorale vont bon train, dans un camp comme dans l’autre. Le vieux système de consultation populaire datant du XVIIIe siècle, peu sécurisé, bien adapté à la vie politique de petites villes mais vulnérable, est-il en train de s’effondrer?

Le soupçon de fraude électorale n’est pas un phénomène propre à cette élection aux Etats-Unis. L’histoire politique de ce pays draine d’autres exemples de dérives semblables à tous les niveaux et à toutes les époques (1876, 1960, 2000…). Relevons que même la Suisse, notre pays si discipliné, n’est pas immunisée: un débat y existe depuis de nombreuses années sur la fiabilité du vote par correspondance. Reste qu’à l’échelle actuelle, la déviance démocratique est un très mauvais signal pour l’avenir politique de l’hyper-puissance.

Les grands médias ont déclaré le candidat démocrate Biden élu. C’est un peu prématuré. D’abord parce qu’il revient aux autorités légales supervisant le processus électoral de faire cette déclaration, et non aux journalistes. Ensuite parce que les assemblées élues des différents États qui composent cette fédération auront fort probablement, faute de consultation populaire lisible et fiable, leur mot à dire dans la désignation des Grands électeurs. Pour finir, comme de coutume aux USA, pays qui regroupe une part massive des avocats que compte cette planète, c’est bien devant les cours de justice que le différend politique pourrait être tranché. Chaque peuple a ses coutumes.

D’un point de vue légal, le résultat des élections, selon la Commission électorale, sera proclamé le 8 décembre seulement, et les Grands électeurs voteront le 14. Et ce résultat pourra toujours être, encore, contesté devant les tribunaux. Quant au président Trump, il exerce son mandat, de par la loi, jusqu’au début du mois de janvier 2021.

Historiquement, le vote des chefs de clan réunis en collège fut inventé, dans les brumes de l’Antiquité, comme substitut à la guerre civile. Et cela fonctionne plutôt bien. Mais il y a une condition essentielle à remplir pour que ce processus éteigne les feux de la violence : que le vote se déroule dans les règles. Au moins pour l’essentiel. Est-ce encore le cas aux États-Unis?

Imaginons que l’ensemble des partis en lice aux USA décident d’user des mêmes méthodes de subversion observées récemment: campagne médiatique permanente, demande systématique de destitution, décrédibilisation quotidienne de l’adversaire, propagation de nouvelles infamantes, manifestations, émeutes, incendies, intimidations, tripatouillages électoraux divers, auto-attribution de victoire, etc… Les portes de la guerre civile seraient grandes ouvertes.

Certains analystes ont fait observer que ces méthodes de progression vers le pouvoir politique ressemblent étrangement aux « révolutions de couleur » qui ont ébranlé les pouvoirs pro-russes dans un certain nombre de pays de l’Est depuis le début de ce siècle… Des techniques de déstabilisation mises au point, autre autres, par des organismes et agences liées aux complexes sécuritaires occidentaux, et plus spécifiquement nord-américain. Observons-nous un spectaculaire « retour de boomerang » ?

La condition première de la vie démocratique est le respect ; respect des institutions, respect des citoyens, respect de l’adversaire, respect des lois. Sans respect, un peuple s’engage rapidement sur la pente glissante qui mène aux supplices de la guerre intérieure.

Puissent les mânes des Grands Hommes de l’histoire des États-Unis d’Amérique inspirer un peu de sagesse à leurs descendants.

Photo DR: En 1876, le républicain Rutherford B. Hayes est élu face au démocrate Samuel Jones Tilden avec une petite voix d’écart.

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