Le Bitcoin n’est qu’une pure machine à spéculer et à enfler des bulles


PAR MICHEL SANTI

Les excités de cette «révolution monétaire» s’y réfugient soit par méfiance vis-à-vis de leur Etat, soit par perte de confiance en leur monnaie dont ils estiment qu’elles ne vaudra plus grand-chose demain du fait de l’activisme des banques centrales. Soit pour les deux raisons, qui sont hélas un peu confuses dans des esprits n’ayant en général aucune culture historique, prompts à échafauder et à privilégier les scénarios les moins vraisemblables. Il faut donc impérativement se débarrasser de ses euros et de ses dollars, bref de cet argent traditionnel qui est l’attribut d’un Etat souverain ayant à leurs yeux failli. Ne surtout plus accorder sa confiance à un ordre politico-monétaire dont le seul objectif serait de dévaloriser toujours un peu plus notre argent et notre pouvoir d’achat. Honnir une monnaie adossée à du vent depuis qu’elle a été décorrélée de l’or suite aux effondrements des accords de Bretton Woods au début des années 1970. Ces libertariens – ceux-là mêmes qui aux Etats-Unis sont les plus fervents adeptes des armes à feu – ne jurent désormais plus que par le Bitcoin qu’ils jugent tellement plus fiable que l’étalon-or qui a été lui aussi, après tout, le reflet de choix politiques et donc d’un système organisé autour d’une banque centrale, d’une production, de créanciers, de débiteurs, bref de structures.

Il ne produit pourtant rien, le Bitcoin. Il n’a strictement aucune matérialité ni présence physique. Il ne représente aucune participation dans une société ou dans une propriété immobilière. Il n’offre pas de revenu, ne paie pas d’intérêt ni de dividende. Le Bitcoin ne peut être jaugé qu’en fonction de lui-même, que comparé à lui-même, car nul indice de référence n’est capable de nous indiquer si son niveau de prix est conforme à sa réalité économique vu que cette dernière n’existe tout bonnement pas. En fait, personne, nul analyste, aucun investisseur ni spéculateur n’est en mesure de démontrer ou d’expliquer si cette entité digitale qu’est le Bitcoin est surévaluée ou sous-évaluée. Car le Bitcoin n’a aucune valeur, juste un prix, lequel est déterminé par des hordes de joueurs qui tentent de le propulser et par d’autres qui le vendent pour prendre leurs profits pendant qu’ils le peuvent encore. Vous l’aurez compris, l’essence même du Bitcoin est que son prix peut osciller entre 0…et l’infini car sa nature fait en sorte qu’il est impossible de lui fixer une limite de prix, même théorique. Son prix pourrait bien centupler en l’espace de 48 heures sans aucune conséquence fondamentale, sans aucun effet monétaire sur l’économie, mais simplement grâce à un casino attirant encore et toujours plus de joueurs.

Le prix du Bitcoin à un moment donné bien spécifique est donc juste un chiffre qui n’a aucun fondement. Et ce même prix pourrait bien redevenir 0 sans que le vrai monde et que l’économie réelle n’en soient affectés. Seuls ceux qui en seront encore détenteurs seraient les perdants car personne n’a besoin de Bitcoin, à part les flambeurs et les spéculateurs qui refusent d’admettre l’aspect purement artificiel de la constitution de son prix. Le Bitcoin n’est, en réalité, pas un phénomène monétaire mais juste la toute dernière création de ce néolibéralisme qui ne cesse de nous produire des machines à spéculer, à enfler des bulles, dans l’espoir de multiplier ses gains, accessoirement de tout perdre.

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