PAR PIERRE ROTTET
Le Pérou tombe de Charybde en Scylla! La Cour suprême du Pérou vient d’interdire les manifestations citoyennes. Manifester, protester sera dorénavant perçu comme un délit qui viole la Constitution, ont estimé le 17 mai les juges de ladite Cour.
Le Pérou glisse vertigineusement vers une dictature, sous l’influence d’une extrême droite fascisante. La décision des juges est un sacré coup de pouce en faveur des visées d’un pouvoir bien décidé à mettre en pièces ce qui reste de démocratie dans le pays. Déterminé à briser la protestation des indigènes de la Sierra, qui ont annoncé la reprise de la rébellion à Puno et une nouvelle « prise de Lima », le 30 mai prochain. Des indigènes néanmoins bien décidés à poursuivre leurs marches jusqu’à la démission de la présidente Boluarte dans un bras de fer de tous les dangers, après le verdict de la Cour suprême.
La décision des magistrats est aussi un pied de nez à la jurisprudence internationale qui reconnaît aux citoyens le droit de manifester pacifiquement. Un affront à la Commission interaméricaine des droits de l’homme (CIDH) dont le récent rapport sur les graves dysfonctionnements des forces dites de l’ordre péruviennes face à la rébellion indigène depuis la mi-décembre 2022 exprime un verdict sans appel: « Massacres il y a eu. Exécutions extrajudiciaires aussi». Constat qui coïncide en tous points avec le document de l’ONG Human Rights Watch, rendu public auparavant.
Qualifié d’ “ennemi du pouvoir”, le journaliste César Hildebrandt réagit aux menaces à peine voilées de la procureure de la nation Patricia Benavides concernant une levée possible de la protection des sources. « La procureure de la nation teste la manière de voir comment elle peut faire pression sur nous, nous intimider, nous faire peur. Cette dame se trompe lourdement… Allez donner vos ordres à vos collaborateurs, à vos conseillers, à vos congressistes et peut-être même à Madame Boluarte. Mais vous ne parviendrez pas à nous faire peur ».
